Il est presque vingt heure quand je quitte mon appartement dans le Londres moldu. Je vis là où je vivais avec ma mère avant sa mort. Ça fait cinq jours que je ressasses sans cesse ce qui s'est passé au dîner de dimanche, ce que j'ai vu. Jem a tué un sorcier sous mes yeux. Enfin, il voulait le faire sans que personne ne le voit, mais j'ai trouvé très étrange qu'il quitte le repas pour quelques minutes, alors je l'ai suivi en restant à l'intérieur de la maison. Je l'ai vu par une fenêtre. Je savais que Jem était capable de tuer, je le savais, parce qu'il me l'avait dit, il avait éliminé toutes les personnes qui m'avaient fait du mal en janvier, pour s'assurer de ma sécurité après mon enlèvement. Mais de là à m'imaginer qu'il le faisait régulièrement, ça non... Est-ce que c'est un tueur à gage ? Quelque chose de la sorte ? Je ne peux pas croire que l'homme si tendre et attentionné envers moi se trouve être le pire psychopathe de la planète. Ce n'ai juste pas possible, pourquoi faut-il que je tombe sur des hommes complexes, que je ne cerne pas, qui me déçoivent, qui me... arrrrg !
Je sais que j'aime le mystère, le danger, comme toutes ces héroïnes débiles dans les livres. Je suis une héroïne débile de livre qui craque sur les mauvais garçons, ça en est ridicule. Je ne me suis pas démontée, j'ai descendu les marches, j'ai fais le tour de la maison, sans rien laisser paraître devant les invités, de toute façon même pas Calvin n'a fait attention à moi... Et je suis allée directement trouver Jem dehors. Pour qui se prend-t-il pour tuer sur ma propriété ? Nous étions au manoir Barjow, et un cadavre s'y trouvait. Alors sans regarder le mort aux pieds de Jem, je l'ai engueulé. Il a tenté de m'intimider, en me disant que je n'aurai jamais du voir ça. Mais je lui ai fait comprendre que j'étais une Oubliator, et qu'ici, je pouvais LUI faire oublier que je l'avais vu. J'aurai aussi pu rester cachée derrière ma fenêtre, sans qu'il sache ce que j'avais vu ! Alors il allait pas me faire la leçon, non !
De toute façon j'étais tellement remontée à cause du comportement de Calvin à cette soirée, quel odieux petit ami il a été ce soir là, c'était humiliant. J'ai l'impression que depuis notre dispute le 16 février, les choses sont pires. Il a l'air d'être vraiment dérangé par ma présence, presque écœuré. J'ai eu beau l'allumer comme je sais le faire, être aussi sexy et entreprenante que possible, il n'a même pas voulu. Depuis quand les hommes repoussent des avances d'une femme aussi jolie ? Je sais pas, mais même en s'astiquant toute la journée, il y a de la place pour ça non ? Et puis c'est moi... je suis censé être sa Caroline, mais là rien, il est resté de marbre. Alors on s'est encore pris la tête à plusieurs reprise cette semaine. Je lui ai dit qu'on pourrait passer voir Andrew pour son anniversaire avec Alice. Mais il déteste Andrew ! Évidemment... il ne fera aucun effort, même s'il y a Alice. Alors me voilà, seule à nouveau, sans compagnon, de toute façon mieux vaut être seule que mal accompagnée, n'est-ce pas ?
Je regarde à droite et à gauche qu'il n'y ait personne et sort ma baguette magique pour fermer ma porte à clef avec un sort. Je ne me sens plus en sécurité depuis mon enlèvement. Je deviens même parano dans la rue quand je suis seule. Je sursaute quand un papier apparaît devant moi, je l'attrape pour y lire un mot d'Alice, ce soir elle ne peut pas nous rejoindre, beaucoup de travail au 7ème Ciel, elle nous souhaite une bonne soirée avec Calvin.
Je broie le papier dans mes mains de rage. « Calvin ne vient pas ! Encore une fois ! » J'inspire lentement tout l'air disponible autour de moi tout en fermant les yeux pour essayer de garder mon calme. Andrew ne sait pas que nous devions venir, donc techniquement, si je ne viens pas, il n'en saura rien. Je ne vais quand même pas passer la soirée ainsi ? Ça fait pitié non, « coucou on était censé être 3 mais je suis toute seule maintenant » ?
Je regarde alternativement ma bouteille d'hydromel de centaure et mon élixir de phénix et je me dis que j'ai besoin de boire, de boire et de rire avec Andrew. Lui au moins il accepte de faire des entorses à son boulot, surtout quand c'est sa belle sœur préférée ! Et vu que je suis la seule... il ne dira pas non. Et puis je ne me suis pas habillée et maquillée pour rien, ça serait un gâchis de ne pas porter cette petite robe noir plus de quelques minutes. De plus ça sera l'occasion de me plaindre de Calvin sachant qu'Andrew n'ira pas m'en faire des éloges. Alors je transplane jusqu'à son domicile. Je prends le soin de sonner et je me positionne de manière assez délicate tout en brandissant les deux bouteilles d'alcool devant moi. Quand il ouvre la porte, d'un éclatant sourire, j'étonne un
« Joyeux Anniversaire ! »
Je lis sa surprise sur son visage et j'éclate de rire. Je m'approche et l'embrasse sur la joue avant de rentrer sans sa permission chez lui. J'espère qu'il n'est pas en charmante compagnie ? Mais un rapide coup d’œil me dit que non. De toute façon ça m'étonnerai, il m'a dit qu'il était célibataire, en plus je suis sûre qu'il ne sait pas quel jour on est aujourd'hui !
« C'était censé être une petite fête improvisée, mais Calvin a décliné une fois de plus et Alice m'a fait faux bond pour son club. Alors me voilà avec Monsieur Hydromel et Monsieur Élixir ! Des boissons rares débusquées par mon frère en déplacement d'affaire. »
Je souris mais mon visage fait une sorte de grimace suppliante. Dis oui dis oui !
« J'espère que... que tu n'avais rien prévu. Je suis sûre que tu avais oublié ton anniversaire ! »
Pitié Andrew, ne m'abandonne pas, pas toi ! Je le regarde, clairement il n'avait rien de prévu vu sa tenue. Je crois ne jamais l'avoir vu ainsi, aussi... décontracté. Je veux dire il est toujours tiré par quatre épingles, et là je le retrouve sans cravate et sans sa chemise nouée jusqu'au cou. Il est... différent, agréablement différent, il fait plus vulnérable sans son armure en costume, plus abordable. Évidemment il reste très beau, comme tous les Scott. C'est vrai que j'ai toujours craqué pour Calvin à Poudlard, il faut dire que je n'ai croisé Andrew que deux années. Mais Anthony et Andrew ne sont pas en reste. Et Alice est un pur canon, si je n'étais pas hétéro... Je ne préfère pas me prononcer pour Angelo. BREF concentrons nous sur le roi de la journée.
« Une petite pause dans le travail, toi tu sais faire ça. Pour moi ? Pour ta Barjow préférée ? »
Je penche ma tête sur le côté, avec un sourire qui se veut timide mais pétillant. Je bas des paupières comme pour finir de le faire craquer avec ma bouille d'ange démoniaque. Ça marche à tous les coups avec mon frère et mon père, et ça marché aussi avec Calvin. Après tout Andrew est un peu comme un frère non ? Depuis le temps qu'on se connaît. Et il finit par céder.
« Ouiiiii ! »
Je lui saute dans les bras, les bouteilles toujours dans mes mains qui m'empêchent de vraiment l'enlacer. Puis je défais mon emprise.
« Des verres ?! »
Je le suis dans la cuisine où il sort deux verres. Je pose les bouteilles sur le bar et il les ouvre avant de nous servir.
« A tes 36 ans ! Comment un avocat aussi sexy que toi se retrouve seul le jour de son anniversaire ? »
Je sais ce qu'il va me répondre, c'est un trait de caractère qu'il partage avec son frère. Le boulot, le boulot, toujours le boulot. Mais venant d'Andrew je saurai le supporter. En plus, il n'a rien à voir avec son frère, et je suis là pour OUBLIER son frère, et Jem. Bref je ne veux plus penser aux mecs qui me déçoivent. Andrew ne m'a jamais déçu. J'attrape mon verre et le bois d'une traite, puis j'avance à nouveau mon verre vers Andrew pour qu'il me serve une deuxième fois. Ce qui le fait lever un sourcil de surprise.
« J'ai eu une semaine particulièrement éprouvante. Et je crois que c'est la fin avec Calvin. »
J'émets un rire d'abord joyeux avant qu'il s'étouffe dans ma gorge et que je baisse la tête, la mine affreusement triste, aux bords des larmes. Mais je me retiens, inutile de jouer encore à l'hystérique devant lui.
Je relève ma tête et tente un sourire plus convainquant, plus fort, plus solide.
« J'ai besoin de rire, d'avoir un ami. Et de boire !»
Je n'ai pas de copines, en dehors d'Alice, qui travaille ce soir. J'ai toujours été entouré d'hommes et dans un milieu très obscur, aussi obscur et insolite que les choses que l'ont vend chez Barjow et Scott. Mes connaissances ne sont pas vraiment des amis, ils sont des clients, et j'ai appris à ne jamais me lier, jamais me confier. Chaque confession pourrait être utilisée contre ma famille, contre Calvin. J'avance toujours en eaux troubles, et en dehors de ma famille - qui se résume à mon père et mon frère - des Scott, d'Alice, de Calvin, d'Andrew, je ne peux pas vraiment être moi même. Ce milieu veut ça, mais aujourd'hui j'en souffre plus que jamais. Je ne peux pas parler de Calvin à mon frère, il me dirait qu'il m'avait prévenu, il irait lui foutre sur la gueule, et je ne peux pas me permettre de mettre la boutique au milieu de mes histoires de cœur.
J'ai un poids sur le cœur, depuis des semaines, je n'ai parlé de mon enlèvement à personne, je ne le peux pas. Ça n'a pas été médiatisé, je pense même qu'Andrew n'est même pas au courant. Je vis dans la peur, chaque jour, alors oui, j'ai besoin de boire et de rire avec quelqu'un de confiance. J'ai besoin d'un ami, j'ai besoin d'Andrew.
"Il avait suffi de peu : de l'attention, une main tendue
et un peu d'amour. Parfois, dans la vie,
on a besoin de trois fois rien pour être sauvé"
et un peu d'amour. Parfois, dans la vie,
on a besoin de trois fois rien pour être sauvé"