« Tourne-toi, dos à moi. » J'obéis à ma mère. Elle est couturière professionnelle, et tous les ans, elle regarde mes uniformes scolaires pour savoir si je dois en racheter, ou si elle peut se contenter d'apporter des retouches. Mon frère aussi passait par cette étape, mais maintenant qu'il est à l'UMS, il ne subit plus cette vérifications en détail. « J'ai l'impression que ta jupe à l'arrière est un peu plus courte… Tu aurais pris un peu de fesses, non ? » « Maman ! » Je rougis en la reprenant. Déjà, je ne me sens pas trop à l'aise dans mon corps. Je me trouve trop grosse, avec trop de formes. J'aimerais être une brindille.
Lucas, mon copain, dit que la préfète de Poufsouffle a un corps de rêve. Elle est toute mince, avec une poitrine normale et des fesses légèrement rebondies. Mais quand il dit ça, généralement, il me tape sur les fesses en me disant que je ne dois pas essayer de lui ressembler. Parce qu'il trouve que quand je prends du poids, ça ne va pas dans mes formes, mais dans mes hanches et mes bras, voir mon ventre. Il préfèrerait que je sois mince, quitte à avoir moins de formes. Aussi, je n'aime pas que maman fasse allusion à mon corps, parce qu'on est dans le salon, et que Keith est dans la cuisine en train de faire bouillir de l'eau. Je ne veux pas qu'il entende ça !
Et évidemment, il rentre et s'asseoit dans le canapé alors que ma mère s'occupe de mon chemisier. « Tout a l'air bon ici. Mais tu sembles avoir pris de la poitrine en plus de ça ! Ma fille devient une vraie femme. » « Mamaaaaan… » Je crois que je suis rouge tomate. Pourquoi elle parle de mes fesses et de mes seins devant le meilleur ami de mon frère ? Et pourquoi ce dernier n'est pas au sous-sol, dans la chambre de Oscar, à boire des bières ? « Bon, tout à l'air ok. Tu n'auras pas besoin de nouvel uniforme pour ta dernière année. Mais si tu veux, on pourra organiser un après-midi mère et fille pour t'acheter de nouveaux sous-vêtements ! » « Si tu veux… » Je marmonne, morte de honte qu'elle parle de culotte et de soutien-gorge devant Keith. Et alors qu'elle sort du salon en sifflotant, je suis seule, face à lui, dans mon uniforme, avec une jupe visiblement plus courte que d'habitude, et la sensation de ressembler à un hippopotame. C'est d'ailleurs sûrement ce qu'il pense, vu son regard…