| Samedi 3 Novembre 2001 |
« Il… » Je sens que la fameuse Joey n’est pas 100% emballée par le plan d’Akutenshi qui semble avoir été de la traîner jusqu'à moi avant de l’abandonner ici. Pauvre chou… J’en ai vu des fans timides mais, généralement, quand des amis les aidaient à venir nous parler, à moi et aux garçons, ils restaient avec ledit fan tout du long pour le soutenir. Conscient que ça ne doit pas être évident pour Joey de trouver son aise, je lui laisse le temps de trouver ses mots sans la presser ou parler à sa place.
« Il aime… beaucoup ce qui est sucré … surtout. » Le regard de la jeune fille se tourne en direction du buffet où son ami s’est éclipsé à l’instant. J’ai un petit rire à ce qu’elle affirme. Déjà, elle est un peu plus confiante. Ça n’est pas encore exactement ça mais on est sur la bonne voie!
Il aurait tort de se priver dans ce cas. Tout a l’air délicieux.Je me demande qui, dans le groupe, a décidé de ce qui serait présenté au buffet. Enfin, au fond, je sais que c’est Ha-Ru qui a eu le dernier mot… Mais j’observe tout ce qui est posé sur la table et j’essaie de deviner qui a eu l’idée de quoi. Je suis certain que Minjun et U-Ram ont bien donné en matière d'idées. Ils ont tendance à devenir gourmands dans ce genre d’occasion.
Un instant, mon regard suit Akutenshi qui se sert sans hésiter et engloutit rapidement ce qu’il choisit. Merlin… J’aimerai beaucoup pouvoir manger comme ça, sans m’inquiéter de gonfler à la fin de la soirée. Quelque chose me dit que le japonais fait partie de ces gens qui peuvent manger et manger sans prendre un kilo. Quelle chance…
Je reviens cependant bien vite au moment présent et à moi pour converser avec Joey. Elle est venue me voir et elle fait l’effort d’essayer de se détendre pour discuter alors je ne vais pas rester planté silencieusement en attendant qu’elle se lance dans une tirade.
Je fais la remarque que j’espère que Akutenshi ne va pas disparaître et j’affirme que je suis heureux de faire la connaissance de la jeune sorcière, laquelle affirme que c’est réciproque. Je vois qu’elle n’arrive pas à donner plus que ça alors je continue à l’aider en demandant si elle s’amuse bien. C’est la moindre des choses, après tout, que de m’en assurer.
« Oui merci, j’espère que la fête… te plait aussi ? Vu que c’était une fête surprise… » Je hoche doucement la tête. C’est encourageant, vraiment ! Je suis sûr qu’il manque un tout petit quelque chose pour la décoincer. Le bon mot, ou le bon sujet, ou… Je ne l’ai pas encore, mais ça va venir. Moi, Dae-Hyun Gyeon, je n’abandonnerai jamais un challenge en matière de socialisation ! C’est pas pour rien que je m’occupe du côté sociable au sein du Globe.
Beaucoup ! C’est la première fois qu'on m’organise une fête surprise! En attendant, je réponds à la question de Joey avec enthousiasme. Je ne m'étends pas sur l’idée que je ne voulais pas de fête de base et que c’est la raison pour laquelle ce n’est pas moi qui l'ai organisée. Après tout, tout a l’air de se passer à merveille et je m’amuse bien, en fin de compte, alors pourquoi préciser que, de base, je n’étais pas convaincu? Et puis j’ai passé un bon moment avec Vicky avant la fête, alors j’ai bien profité quand même de papoter avec mon amie.
D’ailleurs, ma pensée à Vicky me fait penser à quelque chose. Des liens se forment dans mon esprit et, d’un coup, Joey ne m’est plus
si inconnue. Il y a des chances que Vicky m’aie parlé d’une autre Joey dans sa vie, mais il y a aussi des chances que ce soit
elle. Du coup je tente le tout pour le tout et je lance le sujet “Vicky Prewett”.
« Oui absolument ! Oh c’est très gentil à elle ! C’est elle aussi qui m’a fait découvrir le groupe ! » Mon sourire s’élargit. Joey a l’air tout à coup à l’aise, elle parle avec facilité, elle ne bégaie pas, elle à l’air heureuse. Je suis ravi ! J’ai donc réussi à trouver
le truc. Décidément, j’assure ! Bon, plus sérieusement, ça me fait sincèrement plaisir de voir Joey se détendre comme ça. J’ai envie de tout sauf de mettre les autres mal à l’aise, moi. Du coup, de surcroît, je me montre tout particulièrement enthousiaste également. Je reviens sur le fait que Joey serait une fan, maintenant qu’elle a l’air assez à l’aise pour en parler. J’aime bien avoir des retours des gens qui écoutent ce qu’on fait, les garçons et moi, en matière de musique. Ça motive et ça aide à s’améliorer s’il le faut ! Et, sincèrement, je suis de ceux qui pense qu’on peut
toujours s’améliorer.
« Oui j’adore votre musique ! Vicky m’a fait découvrir et depuis j’écoute les morceaux en boucle ! » Je ris à l’excitation de la jeune sorcière. Il est évident qu’elle essaie de se contenir et je ne lui tiendrais pas rigueur de laisser la joie parler ; il faut voir comment je parle quand je suis avec mon frère et que je le félicite quand il nous annonce une bonne nouvelle. En un mot ;
incontrôlable. En bien. Je crois. J’espère.
J’ai pas envie de spoiler, mais je suis déjà entrain de travailler sur une nouvelle chanson de mon côté. Je fais mine de murmurer à Joey.
C’est rien de bien concret, des phrases et des rimes que j’ai commencé à gribouiller après ma première nuit avec Oscar Swan. J’étais juste… Très inspiré à ce moment-là. Je me rappelle même que Sirius Green les a presque lues et que je lui ai demandé rapidement de ne pas le faire. J’aurais été super gêné si jamais il avait tout lu… Parce que je compte bien repasser sur le texte pour l’adapter au format de chanson et surtout pour qu’on puisse le faire écouter au monde. Que ça ne soit pas
personnel quoi, parce qu’à ce moment-là le texte était aussi subtil que si j’avais écrit
OSCAR SWAN en gros au milieu de la page et dessiné pleins de petits cœurs tout roses autour.
Déjà, je n’ai pas envie que tous ceux qui écoutent la musique comprennent que je parle du fait d’être tombé amoureux d’un garçon après avoir couché avec et je n’ai pas envie qu’on sache qu’il s’agit d’Oscar. Mais aussi, Sangwoo ne laisserait
jamais passer que l’une de notre chanson vise quelqu’un en particulier. D’après lui, si les fans soupçonnent que l’un d’entre nous puisse être amoureux de quelqu’un d’autre ça pourrait nous faire perdre de l’audience parmi ceux qui aiment s’imaginer une romance avec une Idol. Personnellement, j’ai tendance à penser que ça n’est pas une grande perte que de se débarrasser de ces fans pleins de rêves pleins de délusion - il me font même plutôt peur -, mais c’est Sangwoo le chef, il sait ce qu’il fait et je lui fais confiance.
D’ailleurs, je pense que Sangwoo n’aimerait pas qu’on apprenne ma relation avec Oscar non plus. Du coup c’est peut-être pas plus mal que Oscar ne soit pas prêt à l’annoncer, j’ai un peu de temps pour trouver comment je vais gérer ça. Je comprend encore mieux maintenant pourquoi mon frère a quitté son groupe quand il a eu un enfant avec Ji-Eun. Il est vraiment question de choisir entre l’amour et la carrière…
Enfin, inutile de m’inquiéter ! Je suis sûr que Sangwoo comprendra et qu’il sera plus indulgent que le producteur de mon frère, à l’époque…
Retour à la réalité, à nouveau. Je n’y peux rien d’être rêveur mais, ça va, j’ai appris à me ramener sur terre assez rapidement la plupart du temps. Comme Joey semble bien, je lui propose même d’aller voir les autres garçons. Après j’admet que je compte sur eux pour la faire ressortir avec des souvenirs super cools parce que je ne suis pas sûr de ma capacité à faire plaisir à une fan. Peut-être que ce que j’ai fais ça suffit mais il ne faut pas oublier que c’est une jeune fille qui a vaincu sa timidité après avoir été larguée ici par son ami… Elle mérite un petit truc non?
Agh, j’ai beau préciser que je ne ferais pas ça avec tous les fans, j’avoue que j’ai tout le temps envie d’offrir un cadeau aux fans que je rencontre. Enfin, pas ceux qui sont creepy, on s’entends. Le truc c’est que je ne peux pas devenir le BFF de toutes les personnes qui écoutent notre musique. C’est une dure facette de la notoriété quand on a besoin de proximité avec les gens, comme moi. Je crois que les autres le vivent mieux : Minjun est timide alors il préfère ne pas trop parler aux autres, U-Ram il est content tant qu’il peut draguer, Ha-Ru doit le vivre un peu comme moi mais il l’a accepté très vite et Byung-ho… Je ne sais pas ce qu’il en pense. Je crois que tout lui va, mais c’est difficile d’en être sûr, il n’en parle pas et il ne montre rien.
« C’est très gentil merci mais je ne veux pas t’importuner davantage. Je sais que c’est ta fête d’anniversaire et je ne veux pas t’embêter plus. Je suis vraiment contente d’avoir déjà pu te rencontrer. » Joey se courbe poliment avant de conclure sa réponse.
« Je serais ravie de te revoir à une autre occasion. Toi et le reste du groupe. » Elle recule un peu et je comprends que notre conversation va s’arrêter ici. J’ai très envie de prendre sa main, de lui affirmer qu’elle ne va importuner personne… Mais mon sens plus rationnel prend, heureusement, le dessus. C’est son choix, je ne vais pas la forcer où ça pourrait la mettre mal. Et si elle était trop timide? Si elle ne le sentait pas? Je ne sais pas comment ça s’est passé dans son cerveau alors je préfère respecter sa décision plutôt que de risquer de rendre les choses désagréables. On peut finir sur cette note, c’est pas mal.
Très bien, mais n’hésite pas à aller leur parler dans la soirée si tu en as envie ; ils aiment tout autant rencontrer de nouvelles têtes que moi. A part Minjun, mais je n’ai pas besoin de le préciser puisqu’il est avec les autres et que je sais que, de ce fait, ça ira si quelqu'un lui parle. Puis il est doué pour fuir les conversations, c’est un grand garçon.
J’espère qu’on se reverra. Bye Bye, Joey! Une dernière exclamation ainsi qu’un salut de la main et je laisse la jeune fille s’éloigner. Elle va sûrement rejoindre son ami au buffet. Leurs combines pour faire tomber l’affreux Ian Wen ne concerne plus qu’eux, à présent.
J’espère qu’elle est heureuse, en tout cas, et qu’elle va bien s’amuser pour le reste de la soirée.
Pour ma part, je compte passer à autre chose. Peut-être aller voir d’autres personnes? Peut-être même les garçons? Je ne cache pas que je pense aussi à aller faire coucou à Oscar Swan et c’est d'ailleurs à ce moment-là que mon regard tombe sur lui. Je fronce les sourcils en comprenant bien qu’il y a quelque chose qui ne va pas. Oscar semblait parler avec une rouquine qui vient de s’enfuir, semble-t-il. Aurait-il un soucis…?
Il est dans ma nature de vouloir aider les gens autour de moi, particulièrement s’il s’agit d’un ami ou… De quelqu’un qui m’est aussi cher qu’Oscar Swan. Du coup je n’hésite pas avant de marcher en sa direction. Je crois que je ne remarque même pas que mes jambes me portent à lui jusqu’à arriver à son niveau. Je pose instinctivement la main sur le bras d’Oscar, inquiet.
J’ai tendance à être plutôt tactile comme garçon, je le sais. D’ailleurs je dois toujours me contrôler pour ne pas poser mes pattes partout sur Sirius quand on travaille ensemble. Mais jusque-là il ne me semble pas que mon côté tactile aie déjà été un problème avec Oscar Swan. Je me rappelle très bien notre première vraie conversation, à cette fameuse soirée. J’ai glissé ma main dans celle d’Oscar lorsqu’il se confiait à moi et quand je l’ai retirée par peur d’en avoir trop fait, il a affirmé que ça ne l’avait pas dérangé.
“Au contraire”, il m’a dit, et il a repris ma main. Je peux encore sentir la chaleur de sa main serrant doucement la mienne, ses doigts glisser entre les miens, et cette douceur…
Cette douceur disparaît aujourd’hui pour laisser place à une violence que je ne reconnais pas en Oscar. Je ne vais pas prétendre que je sais tout de lui parce qu’on couche ensemble parfois et qu’on parle. J’ai conscience qu’on ne connaît pas une personne aussi facilement et aussi rapidement. Mais tout de même… J’ai l’impression que j’ai affaire à quelqu’un d’autre lorsqu’il se dégage du contact de ma main sur son bras avec violence. Mon regard plonge dans le sien moins d’une seconde, juste le temps qu’Oscar ne s’en aille, mais j’ai le temps de lire une forte émotion dans ses yeux. Laquelle? De la tristesse? De la colère? … De la
peur?
Je reste planté là une petite seconde ou deux, confus. Je sens les regards des sorciers qui ont assisté à la scène se poser sur moi. Une petite voix dans ma tête me somme de laisser tomber. De laisser Oscar tranquille. Mais je n’arrive pas à m’y résoudre. Je ne
peux pas abandonner Oscar comme ça. Pas après ce que j’ai vu, avec cette rouquine et dans son regard. Je ne peux pas laisser un ami si facilement, ça n’est pas dans ma nature.
Du coup, avant de perdre totalement Oscar de vue, je me lance à sa suite. Je ne sais pas encore ce que je vais faire, ce que je vais dire… Si j’ai un rôle à jouer, seulement, là dedans. Et pendant que j’avance, la voix dans ma tête se fait de plus en plus forte et me supplie d’abandonner, de m’arrêter.
N’y va pas… N’y va pas! Et pourtant? Je n’écoute pas. Je continue à avancer.
Je crois avoir perdu Oscar le temps d’un instant mais je continue à marcher dans la direction où je l’ai vu avancé en dernier et je finis par arriver dans un coin éloigné de la salle de fête. Je crois qu’il s’agit d’une sorte de remise mais j’avoue que je suis bien trop concentré sur l’idée de retrouver le Gryffondor pour faire attention au décor. Bientôt, je repère la silhouette d’un garçon et je devine très vite que j’ai retrouvé Oscar Swan.
Alors que je l’interpelle, le garçon fait volte-face et pointe sa baguette dans ma direction. Je me fige brutalement dans mes mouvements et pâlit face aux étincelles violettes qui crépitent au bout de sa baguette.
« Dae … Je … » Oscar abaisse sa baguette et je reprends mon souffle, remarquant que j’ai commencé à le retenir en me figeant. J’imagine que je l’ai pris par surprise mais, juste une demi-seconde, j’ai vraiment cru qu’il allait m’attaquer. Je n’aurais jamais craint ça d’Oscar avant… Mais, et s’il avait s’agit de
l’autre Oscar Swan? Celui qui est plus violent? Celui qui me repousse? Si ça avait été lui alors peut-être qu’il m’aurait—
Non.
Non.
Jamais Oscar ne m’aurait blessé comme ça. Il n’y a pas de Oscar violent, stupide Dae-Hyun. Tu le vois bien… Il n’y a qu’un Oscar inquiet. Ou triste… Ou effrayé… Je ne sais pas trop ce que c’est, mais je sais qu’il n’est pas bien. Il a réagi en conséquence. Il n’a rien contre moi.
Tu n’es pas bien… Qu’est-ce qu’il se passe? Il y a un problème?Ma voix n’est pas confiante du tout. Elle est effacée et tremblotante, je suis encore un peu sous le choc d’avoir été menacé de sa baguette et d’avoir, plus tôt, été violemment repoussé. Mais j’essaie tout de même de questionner Oscar.
Bien sûr qu’il y a un problème. Ma question vise plutôt à l’inviter à m’en parler. Je crois que je peux me permettre ça… Il s’est déjà confié à moi dans le passé et ça l’a beaucoup aidé, il me l’a dit… Alors pourquoi cette fois serait différente? Je suis sûr que je peux l’aider… Si seulement il me laisse essayer.
« Je … non enfin … si. Il y a un souci. » Une lueur d’inquiétude mélangée à de l’intrigue danse dans mon regard. Oscar soupire et respire un bon coup. Il à l’air de ne pas savoir où se mettre. Son regard me fuit, il passe une main dans ses cheveux. Et enfin il parle.
- Olympe … ma petite sœur … elle était là.- Oh…Olympe.
Mon esprit fait très vite le lien. La rouquine qui le fuyait, plus tôt. Olympe Swan. Sa petite sœur. Il y a un souci avec sa petite sœur.
Je comprends tout de suite pourquoi il se met dans de pareils états. Je sais que je ne réagirais pas mieux s’il y avait un problème avec HimChan ou Ji-Soo. On a déjà eu quelques accrocs, qui n’étaient sûrement pas aussi graves que ce qu’il se passe aujourd’hui entre Oscar et Olympe, et j’ai vu que je ne réagissais pas super bien à cela. Il n’y a qu’à voir lorsque HimChan flippait pour Ji-Eun et Da-Eun, leur fille. Je crois que je m’inquiétais plus que lui encore… C’est ça, être hypersensible.
D’ailleurs mon hypersensibilité ne doit pas aider là tout de suite non plus…
Inconsciemment, je fais un pas en avant et Oscar réagit très mal. Il recule rapidement et se cogne même contre une étagère derrière lui. Du coup je m’arrête subitement d’avancer. J’ai un léger pincement au cœur quand bien même j'essaie de ne pas le prendre personnellement. Je me répète qu’Oscar ne va pas bien et qu’il n’a rien contre moi en boucle dans ma tête pour ne pas l’oublier. Je n’ai nullement envie d’agir comme si tout tournait autour de moi, il n’a sûrement pas besoin que je joue à la victime.
N’empêche que j’ai un peu mal…
« Non, reste où tu es. »AïeJ’essuie un nouveau pincement au cœur en essayant de ne rien laisser paraître. Rien de plus que mon inquiétude de base, du moins.
D’accord, je ne bouge pas.Il n’a rien contre toi. Tu n’es pas une victime. Aide-le.Je me redresse et fait un pas en arrière pour permettre à Oscar de respirer. Je vais essayer de me concentrer pour lui laisser son espace vital. Il en a besoin, c’est évident. Le tactile n’est pas toujours efficace. C’est rien, je peux faire sans.
- Et Olympe… Ça ne va pas avec elle? Qu’est-ce qui est arrivé?- J’en sais rien ! Je me fige à nouveau.
Non… S’il te plait.. Ne crie pas…J’ai l’impression d’être redevenu un enfant. Un petit gamin tout timide qui se met à pleurer dès qu’on hausse la voix sur lui. Pourtant je n’ai aucun traumatisme lié à ça ; on ne m’a jamais trop ou injustement crié dessus. Mes parents ont toujours essayé de se faire comprendre autrement qu’en haussant le ton.
Peut-être que c’est ça? Peut-être que je n’ai tellement pas l’habitude que ça me fait peur? Je ne sais pas trop. Tout ce que je sais c’est que mes lèvres tremblent et que j’ai envie de pleurer, maintenant.
Mais je ravale rapidement mes émotions.
Il n’a rien contre toi. Tu n’es pas une victime. Aide-le.Je me mord les lèvres et je m’interdis d’être triste. Je n’ai pas le droit d’être triste. Ce n’est pas
moi qui suis en détresse là. Je dois me concentrer sur Oscar…
Je dois…—
« Tout ce que je sais c’est que je n’ai pas réussi à la protéger et … tout ça … parce que … j’arrêtais pas de penser qu’elle allait s’apercevoir de quelque chose entre toi et moi. »..
Quoi?Le regard d’Oscar se plante dans le mien et je n’arrive pas à émettre le moindre son. Il n’a pas réussi à protéger sa sœur parce qu’il pensait à nous? Un silence, d’abord, puis la petite voix dans ma tête me chuchote :
“C’est de ta faute” « Je t’aime … énormément. Pas comme un petit-ami le devrait, sans doute. Je t’aime beaucoup mais … notre relation devient trop pesante. Je suis navré. Je … je sais que tu avais dit qu’on prendrait notre temps mais, je ne peux pas … continuer. »C’est de ta faute.J’ouvre la bouche pour parler mais les mots se bloquent dans ma gorge. Je ne sais pas comment réagir. Je n’arrive pas à m’arrêter sur une émotion. Les mots frappent les paroles de mon esprit et se mélangent.
“Je t’aime”, “Trop pesante”, “Je ne peux pas continuer”.
« Dae, tu as vraiment compté pour moi. Mais je ne peux pas t’offrir ce que tu veux. Je … ne peux pas. »Je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas..
Oscar a dit que j’ai vraiment compté pour lui. Au passé. Pourquoi? Est-ce qu’il a fait exprès? Est-ce que ça veut dire que— Est-ce qu’il veut dire que…—
Tu ne comptes plus. Tu ne comptes plus parce que tu as tout gâché. Parce qu’il n’a pas pu aider sa sœur et que c’est de ta faute. Tu ne comptes plus et c'est de ta faute.Tu —Les mots se bloquent. Ma voix chancelle et se casse. Des larmes me montent aux yeux. Je ne suis pas sûr de réussir à finir ma phrase. Si je continue à parler je vais pleurer… Je vais pleurer et je ne peux pas pleurer parce que
(c’est de ta faute)c’est Oscar qui n’est pas bien, et je ne vais pas faire la victime. Je ne suis pas la victime. Je ne suis pas le centre du monde.
Je ravale au mieux mes larmes.
... Tu me largue?Souffle.
Respire.
Ne pleure pas. Surtout ne pleure pas.
Je m’arrête là. Je n’avais pas mieux à dire et si je rajoute encore un mot je vais craquer. Et je ne peux pas. Je ne dois pas. Je n’ai pas le droit. Je n’ai pas le droit de pleurer…
« Je … je regrette Dae. Mais oui … je pense qu’il faut … mettre un terme à notre relation. »… Pourquoi ça fait si mal ?
J’ai l’impression que Oscar vient de planter une dague dans mon ventre. C’est douloureux… C’est
si douloureux…
Pourquoi? Pourquoi ça doit faire si mal? Qu’est-ce que j’ai fait de travers? Tout allait si bien et puis —
C’est de ta faute.… Est-ce que je mérite ce qu’il m’arrive? J’aurais dû lui laisser plus d’espace. J’aurais dû le laisser tranquille. Je n’aurais pas dû être là ce soir-là. Il aurait mieux fallu que l’on ne se rencontre jamais. J’aurais dû---
Je ne sais pas. Je ne sais plus. Je n’arrive pas à comprendre. Je n’arrive pas à voir où est-ce que j’ai merdé… Parce que j’ai merdé, n’est-ce pas? Si Oscar me largue…
Oscar Swan. Ce garçon si gentil, si beau, si drôle, si… Si parfait. Tellement parfait. S’il me largue…
C’est que j’ai merdé.
C’est que j’ai fait quelque chose de mal.
C’est que j’ai fais une connerie et qu’il faut que je disparaisse.
C’est de ma faute.J’ai envie de pleurer.
J’ai envie de hurler.
J’ai envie de casser ces foutues étagères.
J’ai envie…
J’ai envie de
vomir.
J’ai
terriblement envie de
vomir.Je n’écoute plus Oscar. Je ne sais pas ce qu’il dit mais je sais qu’il faut que je m’en aille. Tout de suite. Je n’arrive plus à supporter tout ça. Je n’arrive plus à rester là et à retenir mes larmes. Il faut que je m’en aille.. Il faut que je m’en aille.
Un instant je suis totalement figé. Et la seconde d’après, je m’enfuis à mon tour. Comme Olympe avant ça. Et Oscar juste après.
Je ne sais pas trop où je veux aller, où je
dois aller. Quand j’arrive dans la salle de fête, je sens qu’on me regarde. Je ne vois même pas exactement
qui me regarde tant j’ai du mal, moi, à regarder les gens. Mon regard parcourt la pièce à la recherche d’une issue, d’un coin où m’enterrer. Mes larmes rendent le décor flou. Mon cœur frappe violemment ma poitrine, j’ai l’impression qu’il va s’arrêter de battre. J’ai aussi l’impression que chaque battement est douloureux. Comme si mon cœur s’était déchiré et qu’il continuait à battre malgré les plaies ouvertes qui envoient une douleur vive dans tout mon corps chaque fois qu’il le fait. Et mon souffle… Je n’arrive pas à respirer. Pas correctement. Je manque d’air… Et si je m’évanouissais? Si je perdais connaissance? Si je me réveillait et que tout ça n’était qu’un terrible cauchemar?
Je crois que je vois quelqu’un s’approcher. … Ha-Ru? Non…
Non non non non ! S’il vient et qu’il me parle alors je devrais faire semblant d’aller mieux. Je devrais essuyer mes larmes et sourire et lui assurer que tout va bien, que je vais bien. Parce que s’il essaie de me consoler et que ça ne fonctionne pas alors il sera triste à son tour…
Je ne réfléchis pas davantage. Il faut que je m’en aille. Alors je traverse toute la pièce en courant, tête baissée, espérant qu’on ne m’arrête pas. J’arrive bientôt au niveau d’une porte que je passe sans réfléchir. Pas l’extérieur non… Mais les toilettes. Ça me va tout autant. Il n’y a personne apparemment, alors je referme la porte derrière moi et j’appuie mon dos contre celle-ci, comme pour m’assurer que cela empêchera quiconque de rentrer.
Pendant un instant j’essaie de reprendre mon souffle. Je suis essoufflé d’avoir couru alors que je peinais déjà à respirer avant ça. J’essaie de contrôler ma respiration, yeux fermés, l’arrière de ma tête appuyé contre la porte. J’inspire et expire. Une fois. Deux fois. Trois--
De ta faute.Ma trêve n’est que de courte durée.
D’un coup, tout me retombe dessus. La réalisation soudaine qu’Oscar et moi c’est fini. Ses paroles. La douleur dans ma poitrine. Les larmes. Tout revient d’un coup et c’est si fort que je me laisse tomber au sol, assis par terre, toujours appuyé contre la porte, et je me met à pleurer. Je serre les dents, j’essaie de respirer… Mais rien n’y fait. Les larmes coulent toutes seules.
Je ne peux pas… Je n’arrive pas à l’accepter. Oscar disait qu’il ne pouvait plus vivre comme ça… Mais moi? Comment suis-je censé faire? Moi non plus, je ne peux pas. Je n’arrive pas à me dire que je vais devoir passer à côté du garçon que j’ai perdu et garder la face. Je n’arrive pas à me dire que je n’aurais plus le droit de le tenir contre moi. Je n’arrive pas à imaginer que je ne pourrais plus serrer sa main dans la mienne. Que je ne pourrais plus l’enlacer. Ou l’embrasser. Ou juste l’aimer… Je ne pourrais plus l’aimer. Je n’ai plus le droit de l’aimer. Et je suis seul, à nouveau. Non… Je ne
peux pas être seul à nouveau ! J’ai passé dix neuf années seul. J’avais enfin
quelqu’un. Et juste comme ça? Je suis de nouveau seul.
Seul.
Si seul…
Et cette voix qui refuse de se taire.
C’est de ta faute.
De ta faute.
De ta faute!Un instant j’ai envie de hurler. J’ouvre les yeux, mon cœur s’emballe et se serre, mes lèvres tremblent…
Puis plus rien. Le vide. C’est comme s’il n’y avait plus rien dans ma tête. Comme si je ne ressentais plus rien. Rien d’autre que cette douleur à la poitrine. Cette douleur
atroce.
Je me redresse pour aller me passer de l’eau sur le visage. Alors que je me retrouve face à mon reflet, je m’arrête un instant.
… Merlin que je suis laid.
Tout mon maquillage coule sur mon visage et je n'arrive pas à supporter l’image que me renvoie la glace. Je suis si pathétique… Il est évident que Oscar m’aie largué. Comment aimer un garçon comme moi? J’ignore même comment il a pu accepter de m’aimer jusqu'à aujourd'hui.
Je recommence, n’est-ce pas? Je joue encore à la victime. C’est comme si je ne pouvais pas m’empêcher de voler la vedette. Comme s’il fallait que je m’auto-flagelle pour me convaincre que je suis encore le personnage principal dans l’histoire. Que je suis à plaindre. Pourquoi est-ce que je pleure, seulement? Je ne peux pas chouiner à propos d’un malheur que
j’ai causé.
De ta faute.Je me dépêche de nettoyer mon visage. Quitte à être laid autant me débarrasser des traces de maquillage partout sur ma face. Je lève à nouveau la tête vers le miroir et je marque un silence. J’ai bien la gueule d’un gars qui vient de pleurer et je crois qu’il n’y a rien que je puisse y faire. Tant pis… Je ferais avec.
Je sens à nouveau les larmes monter et j’essaie de m’empêcher de céder à nouveau. Je tremble un peu et une petite larme ou deux m’échappent mais je garde le contrôle.
J’ai assez donné aujourd’hui.
Je vais sortir de cette pièce et je vais m’en aller. Je rentrerais aux Estudines et je me cacherai dans ma chambre. Je ne verrais personne et je pourrais souffler. Et déchirer ce foutu texte qui doit encore traîner sur mon lit. Personne ne veut l’entendre de toute manière… Surtout pas moi.
Je frotte mes yeux une dernière fois et j’inspire un grand coup avant de sortir de ma cachette.
Quelques personnes ont remarqué que je suis ressorti, celles qui se trouvent le plus proche des toilettes, mais je vois qu’une grande partie n’y fait pas attention. Je me demande si tout le monde a capté ce qu’il s’est passé… Il y a des chances. Il y a beaucoup moins de présents qu’à mon arrivée, déjà.
Dans un coin, je remarque que les garçons sont en train de discuter. Ils portent un air inquiet sur le visage. J’hésite à aller les voir avant de filer… Je suis vraiment partagé entre l’idée de les rassurer et le
besoin de m’enfuir. Le temps que je me décide, le regard de Byung-ho croise le mien. Il semble surprit et je me dis qu’il va interrompre les autres dans leur discussion pour leur montrer que je suis sorti. Mais il n’en fait rien. Il reste silencieux et lève un pouce en ma direction, un sourcil levé. Il ne me faut pas longtemps pour comprendre qu’il me demande si je vais bien. Soulagé, je lève un pouce en retour pour lui répondre. Ça ne va pas vraiment et il doit s’en douter mais je n’ai pas envie de parler à tout le groupe. J’ignore s’il a compris que j’aurais sûrement besoin de souffler ou s’il n’est juste pas doué pour consoler les autres, mais en tout cas Byung-ho a fait exactement ce que je voulais. Il pourra dire aux autres que je vais bien et les rassurer, et moi je n’aurais pas à les affronter.
Je me dirige vers la porte de sortie avec une boule au ventre. Je ne sais pas si j’ai
envie de me retrouver seul, maintenant. Là tout de suite la tristesse et la douleur sont devenues amertume. Je n’ai le goût à rien. Je n’ai plus envie de pleurer ou de sourire ou juste d’exister. Mais je sais qu’une fois seul je vais à nouveau être submergé de mauvaises pensées. Je vais continuer à m’auto-flageller et je vais me refaire le film de notre relation à Oscar et moi et regretter. Et pleurer, aussi. Surtout. Beaucoup. Je n’ai pas trop envie d’être seul à nouveau mais je n’ai rien de mieux à faire ici…
Je crois que mon regard doit chercher
quelque chose malgré tout. N’importe quoi qui ne me condamnerait pas à aller m’enfermer seul. Qui me donnerait une bonne raison de rester. Je crois que tout mon être, en fait, attend un signe. Parce qu’à la seconde où je repère une fille éloignée du reste du monde, je m’arrête. Je suis devant la porte et j’ai lancé un dernier coup d'œil à la pièce comme pour être certain que plus rien ne m’empêchera de partir.. Et puis je l’ai vue. Je fronce doucement les sourcils. La fille en question est en train de regarder ses mains et… Elle n’a pas l’air bien.
J’ignore à nouveau royalement la voix dans ma tête qui me somme de me barrer avant d’empirer mon cas parce que j’ai
besoin de faire quelque chose. Peut-être égoïstement, il me faut une victoire ce soir. J’ai toujours donné mon maximum pour le bonheur des autres et maintenant plus que jamais il faut que je reste fidèle à cette façon de faire. Je sais que ça ne va pas tout effacer, que j’aurais toujours mal, que je vais finir seul à un moment et qu’à ce moment-là je vais indéniablement me remettre à pleurer. Mais si là tout de suite je peux oublier un instant ma douleur et aider quelqu’un…
Si je peux repousser un peu le moment où je serais fatalement livré à moi-même, alors…
Arrivé au niveau de la jeune fille, je lui fais signe pour qu'elle lève les yeux vers moi. Sans un mot, je lui fais ensuite signe de me suivre. Je lui tends même ma main pour l’inviter à la saisir mais, qu’elle le fasse ou non, je la laisse me suivre jusqu’à l’extérieur de la pièce. Il y a un petit hall, si l’on peut dire, entre la porte d’entrée et la salle où se passe la fête. Une fois la porte de la salle principale fermée, le bruit qui provient de l’intérieur est étouffé. Il ne disparaît pas mais il devient un bruit de fond qu’on peut ignorer facilement. En plus, il ne fait pas trop froid, comme on n’est pas dehors. Je décide qu’on peut rester là pour l’instant. Juste un moment.
Tout va bien?Porte fermée, je me tourne vers la jeune fille et lui parle enfin. Ma voix est calme, douce. Je n’ai même pas à faire d’efforts pour me contenir ; je n’ai
rien à contenir. D’habitude je dois m’empêcher de sautiller, de m’exclamer, de faire des grands gestes… Mais là je suis vidé de tout enthousiasme, croyez-moi. Malgré tout, j’offre un petit sourire à mon interlocutrice.
Je ne veux pas être intrusif, mais j’ai cru voir que tu étais pas bien et… Je ne voulais pas te laisser comme ça.Quelle belle soirée, n’est-ce pas? Tout le monde a vraiment l’air de s’être amusé, tiens. Je ne peux pas en vouloir aux garçons d’avoir voulu faire un truc pour me faire plaisir mais j’espère que ça suffira à ce que, la prochaine fois que je le demande, personne n’organise rien.
Dae-Hyun Gyeon, au fait.Je me présente rapidement avant de rire nerveusement.
Enfin, je pense que tu le sais...Je gratte un peu l’arrière de ma nuque. J’ai l’impression que tout le monde , ce soir, sait qui je suis. Je ne sais pas si j’aime cette idée. Ma notoriété en tant qu’Idol était déjà pas négligeable alors maintenant même les gens qui ne savaient pas … Savent. Ils vont sûrement se souvenir de moi comme du “mec dont la fête d’anniversaire est partie en vrille”. Peut-être même qu’ils ajouterons “et il est parti pleurer aux toilettes. La honte”.
Et toi, comment tu t’appelle?Je me concentre à nouveau sur la fille. Je suis là pour ça, non? Arrêter de penser à moi, et penser aux autres. Penser à elle. L’aider elle. Si seulement j’arrive à l’aider, elle…