Nous sommes le jeudi 29 novembre 2001. Sirius, fils aîné de Seth et Saoirse Green, a fait son entrée à l'UMS début septembre dans le cursus de Musique, bien décidé à s'opposer à ses parents sur tous les plans. Un mois après son pétage de plombs à Halloween, Sirius se rend à sa première séance de "thérapie" avec Louve Iceni, héritière du trône d'Irlande.
Cause you can be the beauty and I could be the monster
Cette séance était une mauvaise idée. En faites, Sirius se disait qu’il aurait cent fois préféré étudier avec Dae-Hyun la guitare et le chant. Cela faisait un mois qu’ils s’entrainaient ensemble tous les deux et Sirius devait avouer qu’il commençait à bien apprécier leurs séances ensemble. Au point en tout cas de regretter d’avoir annulé celle-ci !
Mais depuis Halloween, Sirius n’avait pas revu Louve et malheureusement, la princesse héritière du trône d’Irlande n’avait pas oublié sa demande : il lui avait demandé de l’aide. A ce souvenir, il en avait presque honte. Il avait hurlé à la lune quoi ! Et il l’avait supplié de l’aider.
D’un autre côté, il avait carrément pété les plombs. Il avait récemment fêté ses 19 ans mais il avait encore des sauts d’humeur, pire qu’un adolescent. Il lui était toujours aussi difficile de contrôler sa rage, notamment quand quelqu’un le provoquait. Il sentait ses griffes comme si elles allaient vraiment sortir et ses muscles, ses os, tout son corps …
D’un geste mécanique, il se massa l’épaule comme si c’était réellement en train de lui arriver. Mais ce n’était pas le cas. La Pleine Lune était prévue pour demain soir et même s’il se sentait tendu, il n’était pas énervé pour se mettre dans le même état qu’un mois plus tôt. Grognant légèrement, signe de sa mauvaise humeur évidente et de sa mauvaise foi, il pressa tout de même le pas en direction de Druid’s Oak. La jeune femme lui avait donné rendez-vous sur un terrain à l’arrière du village, où ils seraient visiblement tranquilles et loin d’être embêté par qui que ce soit.
Les mains dans les poches, il arriva au point de rendez-vous où Louve Iceni l’attendait visiblement déjà.
« Bonjour … » grommela-t-il en jetant son sac dans un coin de la clairière.
Ils étaient entourés d’arbre, si bien que cela les cachait très bien en réalité du reste du monde. Ils étaient même à l’abri du vent hivernal qui soufflait depuis le début de la journée.
« Bon, me voilà. » dit-il.
Il regarda sa montre. 11h10. Visiblement, Louve et lui avaient tous les deux ce moment de libre entre 11h et 14h le jeudi. Cette idée le gonflait car il avait d’autres Fléreurs à fouetter le jeudi, en pleine semaine. Notamment travailler sa musique avec Dae.
« Ça serait possible de se voir à un autre moment la prochaine fois ? J’ai dû annuler un rendez-vous important. »
Devais-je préciser qu’il était vraiment de mauvaise humeur ? Pourtant, il regardait à peine Louve. Il se rappelait de la sensation de la dernière fois. Elle l’avait saisi par le cou et l’avait soulevé de terre comme s’il ne pesait pas plus lourd qu’un Botruc. Et quand il avait croisé son regard, son loup avait paru reconnaître quelque chose qui lui était familier : un Alpha. Cette pensée fit pousser un soupir d’agacement à Sirius.
« Bon, on est censé faire quoi ? »
Il haussa les épaules, évitant toujours le regard de la princesse. Il pensa à Jared, se disant que s’il le voyait parler et s’entraîner avec la future héritière du trône, il se foutrait certainement de sa gueule. Mais Jared n’était pas là. Et après tout, c’était pour Shanna qu’il faisait ça, n’est-ce pas ?
Cause you can be the beauty and I could be the monsterAvec Sirius Green Jeudi 29 novembre 2001
Mon frère, ma sœur, et moi-même avions été élevés dans l'idée que nous avions les pouvoirs, et le devoir d'aider les malheureux que nous pouvions croiser. C'était l'une des raisons pour laquelle j'aidais Jared. Bleddyn l'avait sauvé d'une très mauvaise aggression, et je lui avais sauvé la vie en lui administrant les soins appropriés. Pour moi, ça me semblait tellement normal. J'avais la chance d'avoir la richesse et le pouvoir. Je ne voulais pas avoir de regret d'avoir laissé une brebis égarée sur ma route. Et c'est pour les mêmes raisons que j'aidais, ou que je voulais aider Sirius Green. Un demi-loup-garou qui avait énormément de mal avec sa nature. Son identité. J'avais promis de l'aider, et c'est pour cela que je me dirigeais vers le lieu de rendez-vous. Je ne savais pas si j'aurais le temps de déjeuner, mais tant pis. Si je devais sauter quelques repas avant mes cours de droit institutionnel sorcier pour aider quelqu'un, je ferai ce service sans hésiter.
Je n'eus pas à attendre longtemps. Je l'entendis arriver avant même qu'il n'ouvre la bouche. « Bonjour … »« Bonjour, Sirius. » Avec son air hagard et ses mains dans ses poches, il semblait ravi d'être ici, avec moi. « Bon, me voilà. Ça serait possible de se voir à un autre moment la prochaine fois ? J’ai dû annuler un rendez-vous important. » Je ne pus m'empêcher de froncer les sourcils en croisant les bras, la tête haute. Semblait-il oublier que son loup intérieur m'avait considéré comme son alpha ? Je le savais, je l'avais senti. J'étais persuadée que de nouveau, il snobait son animal intérieur. C'était normal, il rejetait sa nature. Mais devait-il se montrer aussi désagréable avec moi ? « Je peux très bien te laisser ici, seul avec tes sentiments et ta rage que tu ne sauras jamais contrôler sans aide, pour aller prendre mon déjeuner. » Je le fixait, alors que lui ne me regardait à peine. « Et je sais très bien que tu ne demanderas aucune autre aide que la mienne. Alors je te prie de cesser de faire l'enfant et de me faire confiance. »
Sirius finit par pousser un soupir, ce que je considérais comme une bonne nouvelle, ou presque. « Bon, on est censé faire quoi ? » Je m'approchais de lui, pour me planter devant lui. Je lui demandais de tendre sa main, paume vers le ciel. Une fois cela fait, je posais une pièce d'or, bien au milieu. « Referme doucement tes doigts dessus, sans serrer. Et concentre-toi sur cette pièce. Sur les bruits autour de toi, et sur les battements de ton cœur. » Je me tus, pour fixer sa main. Au bout de quelques secondes de concentration de la part de Sirius, une plume blanche apparut entre ses doigts. « Un poète ? Etonnant. » Je récupérais la plume, que je retransformais en pièce, avant de la montrer à Sirius. « C'est une relique importante en Irlande. Elle se transforme soit en épée, soit en plume, soit en couronne, en fonction de si tu es un combattant, un poète ou un dirigeant. Ça nous aidera à savoir comment prendre ton entraînement. » Cette relique était l'une des plus importantes en Irlande. Selon les croyances, Boadicée la portait autour du cou quand elle était en guerre. Puis après, elle la transmit à sa fille, qui lui donnait cette magie de la métamorphose. C'est comme ça que les missions des enfants royales sont nées. A l'origine, on était choisi par la pièce. Maintenant, par l'ordre de naissance, mais cette pièce était ressortie régulièrement par la Grande Prêtresse durant les fêtes religieuses ou les grandes cérémonies. Beaucoup d'Irlandais aimaient savoir à quelle catégorie ils appartenaient. Ils disaient que ça les aider à prendre des décisions.
« Bien, puisque ton cœur semble te voir comme un poète, il faut se baser sur ça. Ça veut dire que tu ne peux ni combattre, ni ordonner ton loup, mais tu dois l'apprivoiser. » Je savais que cette idée n'allait pas lui plaire. Il refusait son existence, il ne voulait avoir rien à faire avec lui, alors je comprenais que faire ami-ami avec son animal ne lui plaisait pas. « Vois-le comme un animal domestique. Tu ne peux pas nier son existence, il est là. Plus vite tu l'accepteras, et plus vite tu sauras te contrôler. Ce n'est que quand tu es en colère que tu le ressens ? » Je savais que c'était dans ce genre de moment qu'il le sentait le plus. Mais était-ce le seul ? Je tendis la main, pour qu'il me donne la sienne. Je pris doucement son poul, en essayant de me concentrer sur mes sens lupins, et sur les siens. « J'essaie de rentrer en communion avec ton loup. Pour essayer de le comprendre. Et pour savoir comment t'aider. » Je finis par lâcher sa main, en ayant eu les premières informations nécessaires pour lui donner des conseils. « Ton loup profite de ta colère pour essayer de prendre de la place. Ce ne sera pas facile, mais tu dois apprendre à gérer ta colère. Cela passe par la respiration, la relaxation… Tu dois te trouver un point d'ancrage, quelque chose qui te ramène à la réalité. Tu en as un ? » :copyright:️ Justayne
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I'll show you how a real queen behaves, No damsel in distress, don't need to save me
Nous sommes le jeudi 29 novembre 2001. Sirius, fils aîné de Seth et Saoirse Green, a fait son entrée à l'UMS début septembre dans le cursus de Musique, bien décidé à s'opposer à ses parents sur tous les plans. Un mois après son pétage de plombs à Halloween, Sirius se rend à sa première séance de "thérapie" avec Louve Iceni, héritière du trône d'Irlande.
Cause you can be the beauty and I could be the monster
Louve croisa les bras et le remit aussitôt à sa place. Sirius aurait surement réagi en grognant ou en aboyant mais à cet instant, c’était comme si une force l’en empêchait. Comme si une muselière avait été attachée autour de son museau pour l’empêcher de protester. Alors, comme il ne lui restait pas grand-chose d’autre à faire à part écouter, il demanda ce qu’ils étaient censés faire à présent.
La princesse avait paru attendre cette question puisqu’elle s’approcha aussitôt de lui avec quelques instructions. Sirius roula des yeux mais obéit toutefois. Il tendit sa main devant lui et l’ouvrit, paume vers le ciel. La jeune femme posa alors une pièce en or dans sa main. Ce n’était pas un Gallion. En vérité, il ne reconnaissait pas la monnaie. Il fronça les sourcils et allait lancer une phrase sarcastique mais Louve qui devait commencer à le connaître enchaina aussitôt sur la suite.
« Referme doucement tes doigts dessus, sans serrer. Et concentre-toi sur cette pièce. Sur les bruits autour de toi, et sur les battements de ton cœur. » « Sérieux ? » demanda-t-il.
Mais face au regard sévère de Louve, il ferma aussitôt les yeux. Bon sang, c’était pire que les premiers cours avec Dae-Hyun cet exercice. Tout ce truc de se concentrer sur soi, il détestait. Quel était l’intérêt ? Pourtant, cela semblait être à la mode. Il n’entendait parler que de ça depuis quelques mois. A croire qu’ils s’étaient tous passés le mot. Ou peut-être était-ce un truc d’étudiant ?
Les yeux toujours clos, Sirius s’efforça de sentir la sensation de la pièce entre ses doigts. Si elle avait été en argent, elle l’aurait certainement brûlé. Mais c’était une pièce en or. Légère et pourtant lourde quand on s’y concentrait bien dessus. Comme si elle renfermait un secret. Il tendit l’oreille. Une légère brise passait entre les arbres et non loin de là un écureuil se dépêchait d’emmener sa dernière trouvaille en nourriture dans son tronc. Il entendait aussi les battements de cœur de Louve, réguliers, calmes. Et les siens. Plus agités, plus nerveux. Il prit une inspiration pour s’obliger à se détendre mais cela ne changea pas grand-chose à dire vrai.
Pourtant, quelque chose changea. Il le sut quand la pièce qui tenait serrer entre ses doigts changea de matière. Il ouvrit les yeux et desserra la paume de main pour voir que la pièce s’était métamorphosée en une plume blanche.
« Un poète ? » dit Louve. « Etonnant. » « Un poète ? » répéta-t-il.
Il n’était pas bien sûr de suivre. Pourquoi parlait-elle d’un poète alors qu’une plume était apparue dans sa main ? La rouquine reprit alors la plume qui se métamorphosa à nouveau en pièce à son contact.
« C'est une relique importante en Irlande. » commença-t-elle à expliquer. « Elle se transforme soit en épée, soit en plume, soit en couronne, en fonction de si tu es un combattant, un poète ou un dirigeant. Ça nous aidera à savoir comment prendre ton entraînement. »
Sirius garda les sourcils froncés comme s’il avait besoin de plus de temps pour comprendre les explications fournies par Louve. Louve avait posé sur lui une relique qui pouvait analyser sa personnalité et le répartir en trois catégories. Cet artefact ressemblait à celui du Choixpeau magique à Poudlard, peut-être datait-il de la même époque ? Mais, franchement, Sirius avec une âme de poète ? Cependant, il devait bien l’avouer : dirigeant ou combattant ne semblaient pas plus appropriés pour lui. Il supposa que c’était sans doute son penchant pour la musique qui avait induit ce choix.
« Bien, puisque ton cœur semble te voir comme un poète, il faut se baser sur ça. Ça veut dire que tu ne peux ni combattre, ni ordonner ton loup, mais tu dois l'apprivoiser. »
Sirius laissa échapper un rire nerveux.
« Fantastique. » dit-il d’un ton sarcastique en croisant à son tour les bras sur son torse. « Et comment suis-je supposé l’apprivoiser ? » « Vois-le comme un animal domestique. Tu ne peux pas nier son existence, il est là. Plus vite tu l'accepteras, et plus vite tu sauras te contrôler. »
Hum … il avait déjà entendu ça quelque part. Peut-être sa mère ? Ou son oncle ? Il n’avait jamais bien essayé de les écouter à ce sujet. Ils ne pouvaient savoir ce qu’il ressentait. Ils ne pouvaient comprendre.
« Ce n'est que quand tu es en colère que tu le ressens ? » reprit Louve.
Sirius haussa les épaules.
« Oui, la plupart du temps. »
La colère était ce qui le poussait le plus hors de lui. En même temps, il devait avouer qu’il ne connaissait pas grand-chose d’autre. Il n’avait jamais été tout à fait heureux, ni réellement triste. La colère et … la peur étaient les principales émotions qu’il ressentait. Louve s’approcha alors de lui et tendit la main pour prendre la sienne. Sirius déglutit. Il détestait le contact. Il lui était difficile de toucher les autres, même quand sa sœur voulait le prendre dans ses bras, il ne pouvait s’empêcher de se raidir instantanément. Le contact humain le rebutait sans qu’il ne puisse l’expliquer parfaitement. A moins que ce n’était l’idée que quelqu’un le touche ?
« Qu’est-ce que tu fais ? » demanda-t-il après l’avoir finalement laissé prendre sa main.
La princesse semblait chercher son pouls.
« J'essaie de rentrer en communion avec ton loup. Pour essayer de le comprendre. Et pour savoir comment t'aider. »
Pour essayer de le comprendre ? Si elle y arrivait, Sirius voulait connaître son secret. Il avait l’impression d’être analysé et observé par l’œil scrutateur d’un médicomage.
« Ton loup profite de ta colère pour essayer de prendre de la place. » dit-elle en relâchant sa main. « Ce ne sera pas facile, mais tu dois apprendre à gérer ta colère. »
Sirius hocha la tête, l’air dubitatif. Gérer sa colère ? Il ne connaissait que ça. Néanmoins, si cela pouvait aider, il était prêt à essayer. L’image de Shanna semblait flotter perpétuellement au-dessus de la tête de Louve. Alors, il devait faire un effort. Pour elle.
« Cela passe par la respiration, la relaxation… Tu dois te trouver un point d'ancrage, quelque chose qui te ramène à la réalité. Tu en as un ? » « Pas vraiment, non. » répondit-il, rentrant les mains dans ses poches.
Bon, il allait devoir fournir un effort supplémentaire s’il voulait vraiment que Louve continue à l’aider. Il prit une inspiration et se força à réfléchir.
« Hum, la musique je dirais. » dit-il finalement en haussant les épaules. « Quand j’écris, quand je joue, ça m’aide. J’oublie tout le reste et je ne me concentre que sur ça. »
Cela parut convenir à Louve qui hocha la tête. Ils allaient donc commencer par ça. Sirius prit une nouveau inspiration et se mit en position comme lui demanda Louve. C’était parti.
Jeudi 20 décembre 2001
Chaque jeudi, Louve et Sirius se retrouvaient dans la clairière légèrement éloignée de Druid’s Oak. Au départ, ils tâtonnaient. Louve ne connaissait pas vraiment Sirius, et inversement. Elle cherchait à provoquer sa colère et les premières séances, ce n’était pas grand-chose. Elle visait souvent le côté loup avant de progressivement se diriger vers sa famille. Sirius tiqua plusieurs fois quand elle mentionna son père et elle parut le remarquer puisqu’elle riva ensuite ses accusations sur lui. Petit à petit, Louve semblait mettre le doigt sur ce qui pouvait provoquer sa colère : sa famille, son contrôle non existant à gérer son loup, son incapacité d’être un parfait sorcier au Sang-Pur.
Sirius détestait de plus en plus ces séances. Il était agressif et au lieu d’apprivoiser son loup, il essayait par tous les moyens de le combattre, de le refouler. Louve le corrigeait, lui rappelant son point d’ancrage. Mais, si au départ, une faible mélodie parvenait à le ramener à la raison, un simple grognement ou un jappement le ramenait à sa condition : il n’arriverait jamais à apprivoiser son demi-loup.
Il y avait des progrès parfois. Une fois, le 20 décembre, Sirius était arrivé plutôt joyeux à son entraînement. La veille, alors que les étudiants des Sept Arts Magiques avaient organisé une exposition durant toute la semaine, Sirius avait joué de la guitare pour accompagner la projection d’un court-métrage. Il avait adoré ça. Et il savait que son professeur lui mettrait certainement une bonne appréciation à la fin du semestre pour son implication. Aujourd’hui, ce jour-là, à l’entraînement, les attaques de Louve lui avaient semblé vaines car il était incapable de quitter son petit nuage.
Cependant, la séance du 24 janvier avait été particulièrement difficile. Il fallait dire que la pleine lune approchait ainsi que le week-end chez les Parkinson. Sirius détestait ce week-end et rien que le fait de devoir y assister le mettait dans une colère noire. L’année n’avait pas non plus bien commencé pour lui avec l’incendie dans le QG des Pendragon. C’était Oscar Swan et Shanna qui étaient venus le sortir de là. S’il était reconnaissant envers son président, une drôle de sensation avait germé dans son ventre en voyant les regards que lançait sa sœur vers Oscar. La séance avec Louve avait donc été très éprouvante et elle avait décidé une nouvelle approche : la peur. Elle lui avait parlé de la possibilité qu’il reste bloqué en loup, que la transformation s’enclenche, qu’il soit rejeté par tous ses amis, par sa famille car il serait devenu une sorte de monstre. Il n’y avait pas de doute, elle savait y faire.
Le loup prenait le dessus sur toutes ses pensées et ses muscles se tendaient de manière douloureuse. Même siffloter un air de Bono ne parvenait pas à le calmer. Mais Louve semblait toujours s’arrêter avant que cela ne devienne trop pénible. Toujours … jusqu’à …
Jeudi 7 février 2002
La lune avait entamé sa décroissance. C’était normalement une bonne période pour Sirius qui se sentait redevenir humain à ce moment-là. Mais pas aujourd’hui. Non, une colère persistait depuis plusieurs semaines. Il y avait tout d’abord Oscar et la relation étrange qu’il entretenait avec sa sœur Shanna. Le week-end chez les Parkinson qui avait réveillé son hostilité envers Jared et bien qu’une trêve avait été trouvée autour d’un joint d’aconit tue-loup, Sirius ne mourrait pas d’impatience à l’idée de le retrouver. Son amitié étrange avec Ian Wen qui semblait le perturber bien plus depuis sa rencontre avec Thorvaldsen. L’enquête avec Akutenshi qui réveillait en lui tous les pires sentiments pour cet individu. Ses notes au premier semestre qui ne s’étaient pas révélées aussi bonnes qu’il l’avait espéré. Son père qui lui avait envoyé un hibou afin de l’inviter à manger ce dimanche avec sa mère pour discuter.
Bref, ce n’était pas la joie et Sirius se sentait sur le point d’imploser. Il semblait avoir eu un instant de répit avec la drogue de Jared, puis avec la discussion qu’il avait eu avec Margrethe une semaine auparavant. Mais tout ce qu’il avait refoulé semblait revenir progressivement. De plus, il n’avait pas vraiment bien dormi cette nuit et un mal de tête menaçait de pointer le bout de son nez.
Il écoutait Louve, mais il n’avait pas besoin de déclencheurs. Il se sentait déjà suffisamment énervé. Son loup grogna malgré lui et il crispa la mâchoire. Oui, il devait l’apprivoiser, il savait. Il ferma les yeux alors que Louve reprenait ses assauts de provocation.
« J’en ai marre ! » dit-il d’une voix qu’il essayait de paraître calme. « Ca fait déjà une heure qu’on bosse là-dessus et je suis crevé. »
Loin d’attendre la validation de Louve, Sirius fit demi-tour et commença à attraper son sac quand la jeune femme insista. Son loup grogna à nouveau et il se retourna d’un bond vers elle.
« Arrête ! J’te dis que je suis cané. Ca va mal tourner … »
Il jeta son sac violemment au sol. Il ne savait pas trop s’il lui avait échappé au juste ou s’il avait juste envie de frapper quelque chose. Il détourna le regard alors que Louve continuait son jeu. Bordel, d’habitude, elle ne forçait pas autant. Il fallait qu’il parte. Il tourna les talons mais, plus rapide, la princesse se mit face à lui.
« Arrête ! » dit-il en haussant cette fois-ci le ton.
Il avait envie de la pousser, mais c’était une princesse. Au cours des autres séances, il s’était toujours plus ou moins retenu. Elle disait que ça faisait parti de l’épreuve et qu’il fallait justement qu’il résiste. Mais … bordel, il n’y arrivait pas.
Louve toucha alors une partie sensible et lui parla de son père. Le regard que Sirius lui lança était terriblement hostile et n’était surtout plus brun mais ambré.
« Mon père … est ... un salaud ! » rugit-il en se lançant en avant.
Louve l’évita de manière élégante, loin d’être impressionné. Précipité en avant, Sirius tomba à genoux et se cambra en arrière alors que ses muscles le faisaient souffrir. Le loup voulait rugir. Il voulait prendre le dessus. Lui hurler de la dévorer, de la déchiqueter en pièces, de la ….
« NON ! Arrête ! » dit-il.
Mais Louve l’encourageait encore une fois de faire appel à son point d’ancrage. Sirius serra les poings sur l’herbe encore gelée du matin. Il cria de douleur. Il avait la sensation de sentir ses os se briser. Et si cela arrivait vraiment ? Comme l’Epouvantard lui avait montré. Et s’il se transformait vraiment ? Il ne serait plus en mesure de protéger sa sœur ni qui que ce soit. Il ne servirait à rien.
Son esprit, qui se bloquait comme à l’entraînement de l’Occlumencie, tomba alors une barrière. Soudain, le loup bondit et se jeta sur Louve qui n’eut cette fois-ci pas le temps de s’écarter avant que Sirius ne la griffe. Car il l’avait vraiment griffé. Il regarda sa main, ou plutôt ses ongles devenus des griffes rougies du sang de Louve. Horrifié, il tomba en arrière et se força à s’accrocher au sol. Criant, haletant. Il essayait de rassembler les barrières qui maintenaient le loup enfermé. Il essayait de penser à son cours de musique. Au dernier morceau que Dae-Hyun lui avait parlé.
« J’y … arrive pas. » haleta-t-il, au sol.
Les larmes perlaient à ses yeux en même temps que la colère refusait surface. Il ne voulait pas pleurer. Il ne pleurerait pas. Il n’était pas un gamin, putain. Il donna un furieux coup de poing au sol alors que Louve l’assommait encore avec l’idée d’apprivoiser.
« J’Y ARRIVE PAS PUTAIN ! » cria-t-il, en s’acharnant sur le sol.
Sa voix était soudain devenue forte, puissante et … loin de celle qu’il utilisait habituellement. Son poing rencontra une pierre dans le sol et un craquement se fit entendre dans ses phalanges.
« Que … que m’arrive-t-il ? » dit-il, la voix saccadée.
Il avait peur. Il avait définitivement peur. A genoux sur le sol, il ne sentait même plus la douleur de sa main en sang. Il tourna la tête vers Louve. Ses yeux étaient toujours ambrés et tous ses poils étaient hérissés, comme en alerte. Il secoua la tête, impuissant.
« Je … ne peux pas l’apprivoiser. » dit-il. « Il est … trop fort. »
Et un jour, le loup prendrait le dessus. C’était évident. C’était clair comme de l’eau de roche. Un jour, Sirius Green n’existerait plus et il deviendrait une bête monstrueuse. Telle était sa malédiction.
Cause you can be the beauty and I could be the monsterAvec Sirius Green Jeudi 29 novembre 2001
Faisons le point. Sirius était donc un poète colérique qui refusait d'admettre sa nature lupine. Fantastique. Cela n'allait pas être facile du tout, mais… Je devais voir ça comme un entraînement. Si je n'arrivais pas à l'aider, comment je pourrais aider tout un pays ? Il fallait que j'apprenne à mieux le connaître. Et cela allait passer par les questions. Comme son point d'ancrage. « Pas vraiment, non. » Je ne pus m'empêcher d'hausser un sourcil. Il ne m'aidait pas beaucoup, là. Heureusement, Sirius croisa mon regard et se reprit aussitôt. « Hum, la musique je dirais. Quand j’écris, quand je joue, ça m’aide. J’oublie tout le reste et je ne me concentre que sur ça. » Je finis par lui sourire doucement. « Maintenant, on sait par quoi on va commencer. »
Jeudi 7 février 2002
Cela faisait un peu plus de deux mois que je voyais Sirius tous les jeudis. Au début, je me dis qu'il fallait affronter le dragon par les cornes, et le mettre en colère pour qu'il prenne conscience de l'importance de son point d'ancrage. Je me dis que sa nature lupine pouvait aider, et un jour, je me rendis compte que c'était l'évocation de sa famille, et surtout son père, qui le tendait. Je lui lançais des atrocités pour qu'il essaie de se reprendre, en vain. Ce que je n'arrivais pas à lui faire faire était d'apprivoiser son loup. Sirius essayait toujours de le faire taire, mais je ne comprenais pas pourquoi il refusait sa moitié d'identité.
Certaines semaines étaient plutôt efficaces, alors que d'autres… Je me rendis compte que cela dépendait de son humeur de départ. Quand il arrivait détendu, ses efforts payaient. Quand il arrivait anxieux, en colère, nerveux, la séance était aussi pénible pour lui que pour moi. Le repousser dans ses retranchements ne marchait pas forcément, mais comme il n'y avait ni progrès ni recul flagrant, je ne savais pas encore comment faire. J'échouais à l'aider, et cela se ressentait sur nos entraînements. Aujourd'hui ne faisait pas exception à la règle, d'autant que Sirius était arrivé déjà très agacé. Bien que je n'avais pas vraiment besoin de le mettre encore plus en colère, Sirius ne réagissait pas beaucoup. J'aurais pu penser que c'était bon signe, si je ne voyais pas ses jointures devenir blanches à force de s'énerver.
« J’en ai marre ! Ca fait déjà une heure qu’on bosse là-dessus et je suis crevé. » Il tourna alors les talons, et je fronçais les sourcils. Je rêvais, où il abandonnait ? Il n'avait pas le droit d'abandonner ! Est-ce que moi, j'avais abandonné, pour Aliocha et moi ? Non, j'avais tenu tête à mon père devant tous les ministres pour larguer Connor. Et il m'avait donné un défi impossible à relever ! Est-ce que je comptais abandonner Aliocha ou ma couronne ? Certainement pas, j'avais relevé le défi. Sirius n'avait pas le droit d'abandonner. « Tu vas où ? Reviens ici, nous n'avons pas terminé ! » Je me mise à le suivre, d'un pas décidé. « Arrête ! J’te dis que je suis cané. Ca va mal tourner … » J'haussais un sourcil alors qu'il me fit face. Il pensait vraiment me faire peur ? « Excuse-moi, mais tu n'as pas un master à valider tout en gouvernant un pays et en relevant un défi débile donné par ton roi ! Je préfèrerai largement chercher le corps de mon ancêtre pour pouvoir enfin sortir avec l'homme que j'aime plutôt que d'aider un petit con arrogant et colérique ! » Quelle bonne blague ! Si mon père me pensait capable de retrouver un trésor national inestimable aussi connu que le corps du Christ, Sirius pouvait bien contrôler sa fatigue. Sauf qu'il ne semblait pas l'entendre de cette oreille, et tourna les talons une seconde fois. Mais je finis par le dépasser pour me mettre devant lui.
« Arrête ! » Il me connaissait mal. Il jeta son sac alors que je me rapprochais de lui. « Tu crois que ton père aimerait te voir abandonner comme ça ? » Vraiment, je pouvais être horrible. Et plus le temps passait, et plus je me sentais mal à l'aise de faire cela, mais je ne voyais pas encore d'autres solutions. « Mon père … est ... un salaud ! » Par tous les dieux, enfin une réaction. Je l'évitais aussi facilement qu'un enfant, et je le regardais tomber par terre. « Aller, debout, ce n'est pas terminé ! »« NON ! Arrête ! » La furie était là. Je me rapprochais, plus docile. Est-ce que nous y étions ? Est-ce qu'il pouvait y avoir un changement ? Il ne fallait plus que je l'accule. Non, maintenant, je devais l'encourager. « Pense à ton point d'ancrage, Sirius. Pense à la musique ! » Je ne pus m'empêcher de serrer les poings quand je le vis hurler. Ma culpabilité monta encore d'un cran, et atteignit son apogée. Est-ce que ce n'était pas de la torture, ce que je faisais ? Je fermais les yeux, pour échapper à ce spectacle, juste un instant.
Ce fut une erreur.
Au moment où je rouvrir les yeux, Sirius était en train de se jeter sur moi. Je ne pus me détourner, cette fois, et je le sentis me griffer. Choquée, je le regardais, les yeux grands ouverts, alors que lui regardait sa main. Il tomba en arrière. « J’y … arrive pas. » Je me sentais tellement mal. Il fallait qu'on arrête l'entraînement, et que je le calme. Mais il fallait pour cela qu'il dompte son loup. Si ça continuait, nous allions finir dans une impasse. « Tu vas y arriver, Sirius. Tu es fort. Tu vas y arriver. Respire. »« J’Y ARRIVE PAS PUTAIN ! » Je sursautais quand il hurlait, et quand il tapait dans le sol. N'avais-je pas fait une énorme erreur ? « Que … que m’arrive-t-il ? » Je finis par me mettre à genou, pour être à sa hauteur, et le regarder dans les yeux. « Je suis désolée, Sirius. Tout est de ma faute. J'ai réveillé le loup. Mais tu vas pouvoir le calmer. » Et si il ne pouvait pas, je savais que je le pouvais. Mais je ne voulais pas utiliser la carte de l'alpha. « Je … ne peux pas l’apprivoiser. Il est … trop fort. » Bon. Il semblait que j'allais devoir le faire. Je fis appel à mon loup, pour que mes yeux deviennent ambrés à leur tour. Je regardais dans ceux de Sirius, avant de rugir : « DISPARAIS DE MA VUE ! » Evidemment, ce n'était pas à Sirius que je parlais, mais à son loup. Je ne quittais pas son regard, je gardais mes yeux ambrés jusqu'à ce que les siens redeviennent normaux. Signe que le loup avait disparu.
« Tout va bien ? Oh, Sirius, je suis tellement désolée. Je crois qu'on va arrêter cet entraînement. Je suis vraiment désolée. Ce n'est pas toi le problème, c'est moi. » Je le pensais vraiment. Comment j'avais pu lui faire subir ça, et ce, pendant des semaines ? C'était presque de la torture. Je me sentais mal, et je ne savais pas comment me racheter. « Je me doute que tu m'en veux à mort, mais tu veux bien rester encore un peu ? Je pense que l'on devrait parler. Juste… parler, je te le promets. » J'allais amplement comprendre si Sirius comptait partir. Mais, à ma plus grande surprise, il finit par se rasseoir à mes côtés. Je le regardais un instant, alors que j'avais encore le poids de ma culpabilité sur les épaules. « Je ne pensais pas tout ce que je t'ai dit toutes ces semaines. Tu le sais, n'est-ce pas ? Je pense que tu es plein de potentiel. » Je lui souris gentiment. Je me sentais hypocrite, mais, contrairement à toutes les dernières semaines, j'étais sincère. « Je sais de quoi je parle. Je t'ai entendu jouer de la musique. Tu es douée, tu sais ? »
Je finis par étendre mes jambes sur le sol, en posant mes mains dans mon dos, pour prendre appui dessus. Ma tête tomba légèrement en arrière pour regarder le ciel. « Ça fait un moment que je me disais que cette méthode n'était pas efficace, mais en fait, je pense que ce n'était pas fait pour un poète. Si tu acceptes de me laisser une seconde chance… Je trouverai quelque chose. » Je voulais trouver quelque chose. Cela devenait presque une obsession. Et ça avait été pareil avec Jared. Je l'avais harcelé jusqu'à ce qu'il accepte notre aide, avec Bleddyn. Maintenant que le jeune homme semblait enfin nous faire confiance et être sur le bon chemin, je recommençais, mais avec Sirius. J'avais besoin d'être utile. Et je pense que Sirius s'en était rendu compte, et se demandait pourquoi j'agissais comme ça. Je continuais de regarder les nuages et les branches, le temps de mettre mes pensées en ordre. « J'ai peur de monter sur le trône. C'est mon but dans la vie, pourtant. J'ai été élevée pour devenir reine, et je ne pourrais pas faire autre chose, mais j'ai peur d'être une mauvaise dirigeante. Je connais la politique et l'économie sur le bout des doigts, mais… » Je finis par tourner la tête pour regarder le demi-loup. J'essayais de prendre l'air le plus blasé du monde, pour que mes yeux ne se mettent pas à briller. Je me sentais suffisamment coupable de lui avoir imposé ces fichues séances, je n'allais pas en plus pleurer à cause de mes angoisses. « … comment je peux être sûre que j'aide vraiment mon peuple ? Alors, je pense qu'en plus de vraiment vouloir t'aider, j'essaie de faire mes preuves. Pour me rassurer. »
Bien, après être passée pour une hypocrite, je passais pour une faible. Cette journée ne nous réussissait pas, à Sirius et moi. Je finis par me redresser pour poser une main sur mon genou, l'autre effleurant ma joue encore en sang. Je surpris le regard de Sirius. « Oh, ne t'inquiète pas pour ça, je le mérite, je n'aurais pas dû baisser ma garde. J'irais voir un Irlandais de ma connaissance, Jared Parkinson, pour qu'il me soigne. Il est bon médecin, et puis, il me doit bien ça. » Je veux dire, je lui avais quand même sauvé la vie ! Ok, à l'aide de mon frère et de son carnet, mais quand même. Une vie pour une égratignure, ce n'est franchement pas cher payé. Mais quelque chose m'avait fait tiquée en voyant son visage. « Pourquoi ta veine du front a palpité quand j'ai prononcé le nom de Jared Parkinson ? Regarde, elle recommence. » Je me moquais doucement en pointant sa veine du doigt, mais il avait l'air vraiment irrité. Avant qu'il ne me réponde, je lui demandais plus doucement : « Et pourquoi tu es autant en colère, tout le temps ? » Peut-être que le comprendre m'aiderait à mieux l'aider. Et peut-être que parler à quelqu'un d'extérieur et de neutre pouvait aider, aussi ? Je devais garder en tête que c'était un poète. Ce n'était pas sa colère qui allait l'aider, au fond. J'avais eu tout faux, sur toute la ligne. :copyright:️ Justayne [/b][/color]
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I'll show you how a real queen behaves, No damsel in distress, don't need to save me
Nous sommes le jeudi 7 février 2002. Sirius, fils aîné de Seth et Saoirse Green, a fait son entrée à l'UMS début septembre dans le cursus de Musique, bien décidé à s'opposer à ses parents sur tous les plans. Mais ses colères sont de plus en plus difficiles à gérer, notamment quand sa partie lupine refait surface.
Cause you can be the beauty and I could be the monster
Jamais Sirius ne s’était souvenu d’être allé aussi loin. Plus tard, il l’avouerait : Louve avait repoussé toutes les limites avec lui. Elle n’hésitait pas à aller creuser loin et profond. Elle le faisait sortir de ses gonds. Mais Sirius était trop effrayé pour comprendre à quel point cela était nécessaire.
Toujours à genoux sur le sol, les larmes perlant à ses yeux, son corps tout entier tremblant sous la rage et la peur, il vit Louve se baisser jusqu’à lui et rugir :
« DISPARAIS DE MA VUE ! »
Un souffle parcourut tout son être entier. Il tressaillit une nouvelle fois mais il sentit quelque chose se détacher. C’était comme si son loup s’était emparé de son cœur et de son cerveau et qu’il avait décidé de se retirer face à son Alpha. Sirius prit une grande goulée d’air et se laissa tomber en avant, ses deux mains le rattrapant. A quatre pattes, il reprenait son souffle, regardant le sol gelé.
Le loup était parti. Mais la peur était toujours là. Terrifié, c’était ce qu’il était. Et si Louve n’avait pas été là, qu’aurait-il fait ? Sirius n’était pas un loup-garou. Il ne l’était pas. Mais ce qu’il ne contrôlait pas pouvait faire bien des dégâts. Jamais il ne transformerait quelqu’un d’autre en loup-garou mais il pourrait faire du mal tout autant. Il pourrait tuer. Se délecter du sang coulant dans sa gorge. Admirer le spectacle de mettre en pièce un corps.
Il tressaillit à ses pensées et sentit la bile lui monter tandis que Louve commençait à s’excuser, toujours penchée à côté de lui.
« Tout va bien ? Oh, Sirius, je suis tellement désolée. Je crois qu'on va arrêter cet entraînement. Je suis vraiment désolée. Ce n'est pas toi le problème, c'est moi. »
Il ne répondit pas, trop absorbé par les sensations qui le terrifiaient encore. Il ne savait même pas quoi répondre. Voulait-il arrêter les entraînements ? Pensait-il qu’elle était le problème ?
« Je me doute que tu m'en veux à mort, mais tu veux bien rester encore un peu ? Je pense que l'on devrait parler. Juste… parler, je te le promets. »
Il releva la tête, doucement, et regarda Louve qui était toujours accroupie à côté de lui. Elle s’en voulait, c’était indéniable. Ses yeux étaient morts d’inquiétude et elle semblait croire que Sirius allait transplaner à tout moment pour la faire fuir. La vérité, c’était qu’il était bien incapable de faire une quelconque magie à cet instant et même de partir tout simplement. Pour aller où ? Faire quoi ? N’était-il pas un danger dans cet état ?
Il hocha alors faiblement la tête et s’efforça de retrouver une position plus humaine. Il s’assit sur l’herbe et posa ses deux mains sur le sol froid. Il voulait retrouver des sensations moins brûlantes, moins terrifiantes.
« Je ne pensais pas tout ce que je t'ai dit toutes ces semaines. » reprit Louve. « Tu le sais, n'est-ce pas ? Je pense que tu es plein de potentiel. »
Son cœur retrouvait un battement plus régulier et il entendait cette fois-ci plus clairement ce que lui disait la princesse. Il ne tourna pourtant pas la tête vers lui et continua de fixer un point devant lui, dans la terre.
« Je sais de quoi je parle. Je t'ai entendu jouer de la musique. Tu es doué, tu sais ? »
La musique. Dae. Ses pensées étaient tellement hachurées qu’il peinait à remettre de l’ordre dans son esprit. C’était comme s’il avait été habité par un animal et que penser comme un être humain était compliqué. Pourtant, il voulait redevenir humain. Il le voulait. Alors il se força à réfléchir un peu plus concrètement à ce que disait Louve. Il devait revenir.
« Ça fait un moment que je me disais que cette méthode n'était pas efficace, mais en fait, je pense que ce n'était pas fait pour un poète. Si tu acceptes de me laisser une seconde chance… Je trouverai quelque chose. »
La jeune femme étendit ses jambes et mit ses bras en arrière, dans son dos, pour admirer le ciel au-dessus d’eux. Il risqua un regard vers elle, comme profitant qu’elle ne le regardait pas pour voir quelle était son attitude. Elle semblait elle aussi terrifiée, comme ayant vraiment réalisé qu’elle était allée trop loin. Avait-elle eu peur de lui ? De ce qu’il aurait pu faire ? Ou avait-elle eu peur d’échouer dans ce projet ? Sirius se mordit la lèvre et secoua la tête.
« Je suis … terrifié à l’idée de recommencer. » dit-il, la voix un peu cassée après avoir hurlé à s’en déchirer les cordes vocales.
Il était gêné d’avouer ceci mais il était tellement vulnérable à cet instant qu’il avait l’impression qu’il pouvait tout confier sans risque.
« Je … je n’ai jamais eu aussi peur. » admit-il.
Louve ne répondit pas tout de suite et Sirius s’inquiéta qu’elle l’ait entendu. Elle continuait de regarder le ciel, comme ayant trouvé un intérêt particulier à la forme des nuages. Et puis alors …
« J'ai peur de monter sur le trône. »
Sirius fronça les sourcils et serra ses deux mains entre elles. Il ne s’était pas attendu à une telle réaction. Pourtant, il était sincèrement curieux de connaître la suite. Alors il garda le silence et l’écouta.
« C'est mon but dans la vie, pourtant. J'ai été élevée pour devenir reine, et je ne pourrais pas faire autre chose, mais j'ai peur d'être une mauvaise dirigeante. Je connais la politique et l'économie sur le bout des doigts, mais… » « Mais ? » dit-il.
Louve tourna alors la tête vers lui et Sirius croisa son regard. Elle ne semblait pas sur le point de pleurer, mais avait presque un air blasé en disant cela. Comme si elle racontait une étape de sa vie qui était depuis longtemps derrière elle.
« … comment je peux être sûre que j'aide vraiment mon peuple ? »
Sirius fronça les sourcils, intrigué par ses propres paroles. Il n’avait jamais discuté avec qui que ce soit de la famille royale et ne s’était à vrai dire jamais bien intéressé à leurs vies. Contrairement aux Parkinson qui avaient dédié leur vie à les servir, Sirius n’en avait que faire. Pourtant, il était assis là avec Louve Iceni, princesse héritière du trône d’Irlande, à discuter de ce que ça faisait d’être promise à la couronne et de supporter le poids d’être un bon gouvernant. Il n’avait jamais songé à ça, c’était évident. Pourtant, maintenant qu’elle en parlait, il sentait une bouffée d’empathie pour la jeune femme. Une véritable première !
« Alors, je pense qu'en plus de vraiment vouloir t'aider, j'essaie de faire mes preuves. » continua-t-elle. « Pour me rassurer. »
Il baissa les yeux et poussa un long soupir. Il savait qu’il devait dire quelque chose de gentil. Ce n’était juste pas naturel chez lui. En général, Shanna était là pour le seconder dans ce genre de discussion.
« Tu … tu t’en sors pas trop mal tu sais. » dit-il, son regard ne voulant pas croiser le sien, comme gêné d’avoir fait une telle confidence.
Elle ne répondit pas mais changea de position. Sirius la vit poser une main sur sa joue. Celle qu’il avait griffée. Son cœur se serra et il ne sut où regarder pendant un instant.
« Je regrette … je me suis laissé emporter et je … »
Et il avait blessé quelqu’un. Ça aurait pu être n’importe qui, dans n’importe quel autre contexte. Sa mère, sa sœur, Fey, May … Il n’était jamais à l’abri de péter carrément les plombs et de laisser l’animal le dominer. C’était ce qu’il craignait à chaque fois qu’il se disputait avec son père. Et c’était pour cela qu’il s’enfuyait toujours de la maison. Pour ne pas laisser sa rage exploser davantage. Pour ne pas risquer de blesser qui que ce soit.
« Oh, ne t'inquiète pas pour ça, je le mérite » répondit Louve avec un haussement d’épaule. « Je n'aurais pas dû baisser ma garde. J'irais voir un Irlandais de ma connaissance, Jared Parkinson, pour qu'il me soigne. Il est bon médecin, et puis, il me doit bien ça. »
Sirius fronça les sourcils et se força à ne pas tourner la tête, surpris, vers Louve. Cet idiot de Parkinson était décidément partout. « Bon médecin ». Ouais, il était surtout très con.
« Pourquoi ta veine du front a palpité quand j'ai prononcé le nom de Jared Parkinson ? Regarde, elle recommence. »
Il secoua la tête, en colère. Bon sang, mais elle remarquait tout ou quoi ?!
« Et pourquoi tu es autant en colère, tout le temps ? »
Sirius soupira et croisa à nouveau le regard de Louve. Si sa première réplique avait été dite sur le ton de la moquerie, la deuxième avait été plus douce, plus sincère. Il la regarda, étudiant son visage comme cherchant une réponse qu’il n’avait pas. Les cheveux roux de Louve tombaient sur ses épaules comme un grand châle flamboyant. Avec une couronne et une cape royale, elle serait certainement magnifique.
« J’en sais rien … » répondit-il.
A son tour, il regarda le ciel. Et il soupira à nouveau. Il se sentait encore vulnérable de l’expérience vécue. Il tremblait toujours légèrement mais ce n’était rien comparé à tout à l’heure. Ce fut peut-être pour cela qu’il se confia. Pour la première fois, Sirius posa des mots sur ses émotions.
« Je me déteste. Je me suis toujours détesté. » souffla-t-il.
Louve devait tendre l’oreille pour l’entendre, mais avec son sang de louve, elle ne devait avoir aucun mal. La voix de Sirius n’était pas plus élevée qu’un murmure, comme s’il craignait d’être entendu dans cette grande clairière vide.
« Je crois que ça a commencé avant que je rentre à Poudlard. » poursuivit-il, les vannes désormais ouvertes. « J’avais peur du noir et je demandais souvent à ce qu’on me raconte une histoire pour m’endormir. »
Il esquissa un sourire timide à Louve.
« Mon parrain le faisait sans se poser de question. Ma mère ne finissait jamais ses histoires tellement elle partait dans tous les sens. Et puis il y avait mon père. Il ne savait jamais quoi raconter. Alors il disait « non plus tard ». Ou bien « vois avec ta mère ». Je n’ai jamais compris pourquoi il mettait une distance comme ça avec moi. Avec Shanna aussi, mais encore c’était différent. C’est une fille et … il la traitait autrement. Alors j’ai commencé à penser qu’il ne m’aimait pas beaucoup. »
Il haussa les épaules, se souvenirs émergeant à nouveau dans son esprit de ces nuits à se triturer les méninges. Pendant qu’à côté son oncle, Amadeus, parcourait les forêts avec ses enfants. La famille parfaite.
« Et puis à Poudlard, ça s’est renforcé quand mon sang de loup a joué des siennes. A la maison, ce n’était pas un problème si mes poils poussaient d’un coup, ou si je donnais un coup trop fort dans la chaise qui allait s’étaler plus loin. A Poudlard, quand mes yeux sont devenus ambrés lors du premier soir de la Pleine Lune, j’ai senti pour la première fois la peur chez les autres. La peur et le dégoût. Personne n’a voulu partager mon dortoir cette nuit-là. »
Il baissa les yeux et eut un sourire sans joie. Il arracha une touffe d’herbe et commença à jouer avec.
« J’ai compris ce soir-là à quel point les loups-garous étaient encore mal perçus au Royaume-Uni. L’année passée, un professeur, Lupin je crois, avait enseigné la Défense contre les Forces du Mal et avait été forcé de partir dès lors que les parents avaient appris qu’il était un loup-garou. De la même façon, si mon nom inspirait le respect, j’avais perdu un certain statut dès lors que mon sang de loup s’était réveillé. Alors j’ai tout fait pour le cacher. J’ai fait en sorte qu’il se taise pour … pour essayer de rentrer dans le moule. »
Il haussa les épaules, désinvolte et prit une nouvelle inspiration. C’était comme si les fantômes de son passé étaient revenus le hanter. Il revoyait le professeur Rogue le féliciter pour ses notes tandis que Malefoy et sa bande de 4ème année l’invitaient à se joindre à lui pour le repas. Il s’était senti intégré et avec une bande d’amis qui se souciait de lui.
« Avec Greyback qui continuait à façonner son armée de loup-garou pour le Seigneur des Ténèbres, il valait mieux que je la joue profil bas. Même si j’étais … presque un putain de Mangemort … les loups-garous n’étaient pas nobles. Et ma mère avait elle-même été reniée dès lors qu’elle avait été mordue. Alors si je voulais espérer retrouver une place, ma place, je devais la jouer profil bas. »
En disant tout cela à voix haute il sentait bien que cela était ridicule à présent. Surtout pour en arriver là où il en était : à rejoindre l’Armée de Dumbledore lors de la bataille de Poudlard et à sauver la vie à plus d’un Né-Moldu. Il poussa un soupir.
« Enfin bref. C’est là que les choses ont commencé à se gâter avec ma famille qui n’acceptait plus qui j’étais. Ça avait commencé avec mon père qui ne m’aimait pas beaucoup, mais en plus ma mère s’y mettait en s’immisçant dans mon esprit. J’étais en colère. En colère contre eux qui refusait de comprendre qui j’étais. En colère contre moi de les … décevoir, j’imagine. En colère contre cette putain de guerre qui compliquait tout. Et les années passant, ça a été de plus en plus compliqué. »
Il déglutit et jeta la touffe d’herbe qui lui restait dans les mains.
« Aujourd’hui, mon père et moi on ne se comprend plus. Il a toujours refusé de me parler davantage de lui, de sa vie passée, de son enfance, de sa famille. Je n’ai jamais compris pourquoi. Quant à ma mère, elle aimerait tellement que j’accepte mon côté loup-garou qu’elle ne respecte même plus mon intimité et me force la main. J’ai l’impression que tous deux voudraient que je sois quelqu’un d’autre … quelqu’un que je ne suis pas. »
Sirius se mordit la lèvre, réalisant quelque chose.
« Je … je ne sais même pas qui je suis au fond. »
Il tourna la tête vers Louve. Il ignorait pourquoi il s’était confié à elle. Pour la première fois depuis le début de sa vie, Sirius osait enfin dire à quelqu’un ce qu’il avait sur le cœur. Et Louve l’avait écouté sans broncher.
« Jared Parkinson … c’est mon cousin. » lâcha-t-il en roulant des yeux. « Le fils de mon oncle, le neveu de ma mère. Et … je le hais tellement lui aussi. Car sa vie est tellement plus simple que la mienne bordel. »
Il secoua la tête. Toute sa vie, Jared et lui avaient fait du mieux qu’ils pouvaient pour s’éviter. Ils ne s’aimaient pas, ça ne servait à rien de forcer le destin même si leurs parents avaient bien essayé de faire du mieux qu’ils pouvaient. On avait bien vu ce que ça avait donné fin janvier …
« C’est un loup-garou à part entière, il n’a pas à choisir entre humain ou loup. Il est l’un d’entre eux. Alors que moi … moi j’aurai aimé être un simple humain. Comme ça … peut-être que mon père m’aurait plus aimé ? J’en sais rien. Mais en tout cas, j’aurai trouvé plus simplement ma place. Enfin, je suppose … »
Jeudi 21 février 2002
Après la séance éprouvante du 7 février, Louve avait proposé à Sirius de faire une pause de deux semaines. Aussi, c’était la première fois qu’ils se revoyaient depuis. Cela lui avait fait du bien d’une certaine manière de parler avec Louve de ses émotions. Jamais il ne l’admettrait à voix haute et encore moins devant Shanna, mais c’était vrai.
« Salut. » dit-il avec un bref inclinement de tête, les mains encore une fois dans les poches.
Louve était évidemment assez réticente de retenter la même méthode qu’auparavant, mais Sirius avait bien réfléchi de son côté.
« Ouais … je … je voulais te dire. J’aimerais tester à nouveau quand même. »
Il croisa son regard, afin de lui montrer à quel point il était sérieux et sincère.
« Je … je ne veux pas prendre le risque que ça se reproduise, ça, et que je ne sois pas à même de gérer seul, tu comprends ? Je sais que j’aurai toujours des colères de ce style. Et je sais que tu ne seras pas toujours là pour moi – même si franchement je comprendrais si tu décidais de jeter l’éponge avec moi. Donc, j’aimerais qu’on retente. Et … je vais essayer de trouver un autre point d’ancrage. »
Il était prêt. Il était décidé. Et il était prêt à argumenter à nouveau s’il le fallait. Mais cela parut convaincre Louve. Cependant, elle avait une autre méthode à utiliser. Cela ne semblait pas l’enchanter davantage mais elle y avait visiblement pensé. Sirius attrapa sa main et tous deux transplanèrent. Lorsqu’il ouvrit les yeux et que le sol se stabilisa sous ses yeux, ils se trouvaient dans …
« La cabane hurlante ? »
Il fronça les sourcils. Il ne s’entendait clairement pas à se trouver là. Soudain, un bruit sourd résonna dans une malle posée à côté de Sirius. Il sursauta avant que Louve lui explique qu’il s’agissait d’un Epouvantard. Le cœur de Sirius fit un bond dans sa poitrine. La dernière fois qu’il avait eu à en affronter un c’était il y a un petit peu moins d’un mois. Cela n’avait pas été bon. Pourtant, il avait décidé de retenter n’est-ce pas ? Alors il devait faire confiance à Louve.
Il sortit sa baguette qui crépitait déjà face aux bruits que faisaient la malle alors que la créature s’agitait à l’intérieur. Quelque chose grogna dans sa poitrine. La Pleine Lune était dans une semaine et il se savait plus irritable à cette période. Et sa magie était elle aussi plus instable.
Après un signe de tête vers Louve, cette dernière ouvrit la malle. Une copie conforme de Sirius en sortit. Tous deux se regardèrent un instant dans les yeux avant que le Sirius-Epouvantard ne s’effondre sur le sol. Ses yeux se révulsèrent et il hurla. Ses os craquèrent dans un bruit horrible qui fit trébucher le véritable Sirius en arrière. Il tomba et sentit l’angoisse monter. C’était une chose d’imaginer la chose, c’était une autre de l’avoir sous ses propres yeux. Pour la deuxième fois en moins d’un mois, son pire cauchemar se produisait devant lui.
Sirius Green se transformait en loup-garou.
La voix de Louve le ramena à la réalité. Il la vit, ses cheveux roux encadrant son visage, alors qu’elle l’enjoignait à se maîtriser. A se contrôler. A s’écouter.
Le sang battait dans les oreilles de Sirius et il entendait sa propre respiration alors que l’Epouvantard continuait à pousser ses cris de douleur. Ses os craquaient de toutes parts et les poils poussaient, couvrant ses vêtements et le reste de sa peau. Son visage s’allongea et un museau apparut. Les yeux noirs de Sirius disparurent pour laisser la place à de l’ambrée.
A nouveau, la voix de Louve le réveilla. Il était tétanisé sur le sol mais il devait réagir. Le point d’ancrage. Il ferma les yeux, s’efforçant à occulter les cris de douleur de l’Epouvantard. Le point d’ancrage, Sirius, le point d’ancrage. A nouveau, un air de musique lui vint de lui-même en tête. Mais il le savait à présent, cela n’était pas assez fort. Il devait trouver autre chose. Il y avait beaucoup réfléchi ces deux dernières semaines. Et il avait envie de tester quelque chose.
Il fit alors appel à ses souvenirs. Le visage de May arriva dans son esprit. Sa rencontre avec ce petit bout de femme qui l’avait fait virer du cours du professeur Collins et qui ne cessait de parler pour dire pleins de choses et rien du tout en même temps. Fey apparut elle aussi, ses souvenirs d’après la bataille de Poudlard. Elle était mal en point et boitillait légèrement. Mais comme Sirius se tenait au chevet de sa sœur, Bryn, dont il lui avait sauvé la vie, Fey était arrivée vers lui. Elle l’avait regardé un instant, comme se remémorant le dégoût qu’il lui inspirait. Et puis, elle l’avait serré dans ses bras. Il avait frissonné à ce contact puis s’était finalement laissé faire car il savait que la jeune femme en avait besoin. A partir de ce moment-là, ils avaient été amis.
Shanna arriva alors dans son esprit. Un vieux souvenir de quand ils étaient jeunes et que Shanna faisait ses premiers pas. Sirius était là et veillait à ce qu’elle ne se fasse pas mal, la réceptionnant dès qu’elle manquait de tomber. Son sourire et son rire quand elle le voyait. Mânen, la fille de Liam et Elisabeth, qu’il considérait comme une cousine. Chiante au possible elle aussi, mais avec un cœur en or. C’était elle qui avait fait découvrir la littérature classique moldue à Sirius. Et puis Maggie. Cette jeune femme qu’il venait juste de rencontrer mais qui avait déjà une saveur particulière.
Fort de ses souvenirs, Sirius ouvrit les yeux. L’Epouvantard avait désormais laissé place à un grand loup noir, un peu difforme, rendu horrible par la vision qu’en avait Sirius. Mais il ne se laissa pas décontenancer. Il sentit son propre loup intérieur gronder et s’en servit. Il balança toute la force que son loup lui inspirait dans sa baguette et lança :
« Riddikulus ! »
L’Epouvantard se métamorphosa alors en un tout petit chihuahua, aussi inoffensif qu’une Doxy. Sirius avait réussi. Il avait réussi à dominer sa peur. Un sourire sincère naquit sur ses lèvres alors qu’il levait les yeux vers Louve.
Cause you can be the beauty and I could be the monsterAvec Sirius Green Jeudi 7 février 2002
Qu'est-ce que que je m'en voulais, d'avoir laissé tout ça arriver ! Sirius ne méritait pas ça, cette torture que je lui avais infligée. Heureusement, il ne semblait pas trop m'en vouloir… Pour le moment. J'avais pas mal parlé de moi, comme l'ambiance était aux confidences, mais je ne me doutais pas du tout de ce que Sirius allait sortir comme confidence. « Je me déteste. Je me suis toujours détesté. » Ah. Bien qu'il chuchotait, je l'entendais, grâce à mon sang de loup. Maintenant qu'il le disait, je n'étais pas étonnée… Mais qu'avait-il bien pu lui arriver ? « Qu'est-ce qu'il s'est passé ? »« Je crois que ça a commencé avant que je rentre à Poudlard. J’avais peur du noir et je demandais souvent à ce qu’on me raconte une histoire pour m’endormir. » Je répondis au sourire timide qu'il me lançait. Je ne pensais pas qu'il allait me parler de choses aussi profondes, mais j'étais touchée qu'il le fasse. Alors, je me tus, et le laissais continuer. Il me raconta comment sa famille se pliait à ses exigences assez enfantines, et je fus touchée de voir comment il parlait à la fois de sa sœur et de sa mère. On ne dirait pas comme ça, mais Jared Parkinson était, en fait, assez famille.
Sirius continua son récit, sans que je ne l'interrompe. Mon cœur se serra quand il parla de ses premières années à Poudlard, en tant que demi-loup-garou. Et apparemment, il ne fut pas épargné. « J’ai compris ce soir-là à quel point les loups-garous étaient encore mal perçus au Royaume-Uni. L’année passée, un professeur, Lupin je crois, avait enseigné la Défense contre les Forces du Mal et avait été forcé de partir dès lors que les parents avaient appris qu’il était un loup-garou. De la même façon, si mon nom inspirait le respect, j’avais perdu un certain statut dès lors que mon sang de loup s’était réveillé. Alors j’ai tout fait pour le cacher. J’ai fait en sorte qu’il se taise pour … pour essayer de rentrer dans le moule. » Je me taisais depuis le début, mais cette fois, je laissais ma colère remonter. « Je ne comprends pas pourquoi les créatures sont aussi mal vues en Angleterre ! A ce stade, ce n'est plus une peur médiévale, mais une peur irrationnelle. » Ils étaient tellement enracinés dans leurs peurs qu'ils ne savaient plus distinguer la personne de la créature. Ça me faisait de la peine pour elles, et c'est bien pour ça qu'on faisait de notre pays une terre d'accueil pour tous, y compris les non-Irlandais. « Avec Greyback qui continuait à façonner son armée de loup-garou pour le Seigneur des Ténèbres, il valait mieux que je la joue profil bas. Même si j’étais … presque un putain de Mangemort … les loups-garous n’étaient pas nobles. Et ma mère avait elle-même été reniée dès lors qu’elle avait été mordue. Alors si je voulais espérer retrouver une place, ma place, je devais la jouer profil bas. »« Vous n'avez plus rien à craindre de Greyback. Je m'en suis personnellement occupé en mai 1998. » Durant le premier règne de Voldemort, l'Irlande n'y avait pas tellement prit part. Elle avait envoyé quelques agents sur le terrain, mais sans prendre contact avec le Ministère de la Magie anglais, à cause de tous les espions. Je m'étais personnellement déplacée durant la guerre de Poudlard pour arrêter ce loup-garou qui ternissait notre image.
Sirius continuait de parler. Maintenant que les vannes étaient ouvertes, il semblait ne plus pouvoir s'arrêter. Tant mieux. Il semblait avoir tellement de choses à dire, il semblait avoir tellement de choses sur le cœur qu'il avait besoin de partager. Je me tus, pour lui offrir une oreille attentive. Il commençait à parler de sa colère, et je sentis qu'on mettait le doigt sur le problème. Sa colère était envers sa famille, envers la situation, envers lui. Est-ce qu'il avait pardonné à l'ancien Sirius,un ancien presque Mangemort ? Sans parler de sa relation avec son père. J'avais l'impression qu'il avait besoin de connexions avec sa famille. Après tout, un loup était rarement seul. Un loup recherchait une meute. Bien que Sirius détestait ce côté de lui, il était bien présent. Il rejettait toute une partie de son être, de son identité ; bien sûr qu'il était en colère. Et je pouvais comprendre qu'il en voulait à ses parents, de ne pas lui offrir le soutien dont il avait besoin. « Je … je ne sais même pas qui je suis au fond. » Enfin, Sirius se tournait vers moi pour me regarder. Je lui souris doucement. « Si ça te dit, on peut chercher qui tu es ensemble. » Je marquais une pause, avant de rajouter doucement : « Merci de m'avoir dit tout ça. Evidemment, je garderai tout ça pour moi. » Je n'avais pas précisé au début, mais je comptais garder tout cela pour moi. Je voulais simplement être un soutien pour lui, une aide. J'espérais que malgré mon erreur, il continue de me faire confiance.
« Jared Parkinson … c’est mon cousin. Le fils de mon oncle, le neveu de ma mère. Et … je le hais tellement lui aussi. Car sa vie est tellement plus simple que la mienne bordel. » Je ne pus m'empêcher de tiquer. Je commençais à connaître Jared, et je savais que sa vie était loin d'être simple. Il suffisait de regarder son père qui, paradoxalement, n'était pas le plus populaire dans ma famille. Principalement à cause de ton côté bien trop obséquieux qui cachait un flagrant désir de monter les échelons de la haute société. « Pourquoi sa vie est plus simple que la tienne ? »« C’est un loup-garou à part entière, il n’a pas à choisir entre humain ou loup. Il est l’un d’entre eux. Alors que moi … moi j’aurai aimé être un simple humain. Comme ça … peut-être que mon père m’aurait plus aimé ? J’en sais rien. Mais en tout cas, j’aurai trouvé plus simplement ma place. Enfin, je suppose … » C'était donc à cause de son père qu'il était aussi déchiré par ses deux identités… Mmmh. Apparemment, Jared et Sirius se ressemblaient plus qu'ils ne le pensaient. Il fallait peut-être que je le dise à Bleddyn, lui qui se rapprochait vraiment de Jared. En tout cas, je ne voulais pas mettre Sirius en porte à faux, alors, je n'enfonçais ni lui, ni son cousin. « Si ton père ne t'aime pas à ta juste valeur, c'est lui le problème, pas toi. Ni ton sang de loup-garou. » Je me tournais vers le jeune homme, en souriant. « Je sais que c'est plus facile à dire qu'à faire, mais il faut non seulement que tu apprennes à gérer ta colère, mais aussi à t'aimer. » Bien sûr, je disais ça comme si c'était l'une des choses les plus faciles du monde, mais pas du tout. Je savais qu'on avait encore du travail sur la planche.
En parlant de travail sur la planche… « Est-ce que… Tu veux tout arrêter, ou es-tu prêt à m'accorder ta confiance une seconde fois ? » J'aurai pu comprendre si il disait non. Je ne lui en aurais même pas voulu. Après tout, c'était de ma faute si ça avait tellement dérapé aujourd'hui. Mais, à ma grande surprise, il accepta. « Je te propose de faire une pause de… Deux semaines ? Comme ça, ça te laissera le temps de te remettre de tes émotions, et moi, ça me laissera le temps de chercher une autre méthode. Celle-là ne va pas du tout. » Je me refusais de lui refaire du mal. Une fois que nous étions d'accord sur le délai de pause, je me relevais, prête à partir. Mais avant, je jetais à Sirius un dernier regard. « Prends soin de toi, Sirius Green. » Je lui fis un clin d'oeil, puis je transplanais.
Jeudi 21 février 2002
Mes occupations commençaient de plus en plus à s'accumuler. Entre mes devoirs de princesse le weekend, et d'étudiante en semaine, je cherchais désespérément le corps de mon ancêtre pour que mon père donne enfin sa bénédiction pour mon couple avec Alekseï. L'avantage était que je n'avais plus à porter ma bague de fiançaille, et c'était un énorme soulagement. Mais à toutes ces activités se rajoutaient mes recherches pour aider Sirius, le plus possible. Je devais me rappeler que c'était un poète, alors, j'allais voir ma grand-mère, la Grande Prêtresse actuelle, pour en savoir un peu plus. Quand un poète voulait régler ses problèmes, ça devait venir de soi. De son cœur. De ses tripes. Alors, j'essayais de mettre quelques petites choses en place.
Une fois cela fait, je finis par envoyer un hibou à Sirius pour lui donner rendez-vous cette semaine, quelques jours auparavant. Une fois qu'il me dit oui, je pus mettre quelques jours de côté cette histoire pour continuer de fouiller les archives irlandaises. Je délaissais mes vieux papier aujourd'hui pour rejoindre le jeune homme. « Bonjour, Sirius. »« Salut. » Bonne nouvelle, il ne semblait pas regretter d'être venu aujourd'hui ! J'essayais de garder confiance, pour lui expliquer mon plan. « Comme promis, j'ai essayé de trouver une nouvelle méthode, pour ne pas avoir à te torturer une seconde fois. » Je n'étais pas sûre que ma solution actuelle marche, mais au moins, cela devrait faire moins de dégât. Normalement. « Ouais … je … je voulais te dire. J’aimerais tester à nouveau quand même. » … Hein ?
J'étais rarement sans voix, mais là, il fallait bien dire que j'étais étonnée. Je ne pensais pas que Sirius aurait eu envie de retenter, alors que cela avait été contre productif. Un véritable désastre. « Mais… Pourquoi ? »« Je … je ne veux pas prendre le risque que ça se reproduise, ça, et que je ne sois pas à même de gérer seul, tu comprends ? Je sais que j’aurai toujours des colères de ce style. Et je sais que tu ne seras pas toujours là pour moi – même si franchement je comprendrais si tu décidais de jeter l’éponge avec moi. Donc, j’aimerais qu’on retente. Et … je vais essayer de trouver un autre point d’ancrage. » Je ne comprenais pas pourquoi il pensait que j'allais jeter l'éponge. Au contraire, j'étais bien décidée à aller jusqu'au bout. Et apparemment, lui aussi. « Je comprends. J'ai trouvé une autre méthode, je ne pense pas qu'elle soit meilleure, mais elle ne sera pas aussi… Affreuse que la précédente. Et je pense que ça va t'aider à trouver ton point d'ancrage. Alors, si tu me fais confiance… » Je lui adressais un petit sourire, avant de tendre la main. Par les dieux, faites qu'il me fasse confiance. Et surtout, faites que ça marche. Je vous en supplie.
Je ne savais pas si les dieux m'avaient écoutée ou si Sirius m'aurait quand même suivie, mais il finit par prendre ma main, et je transplanais dans l'endroit qui m'intéressait. Apparemment, le jeune homme reconnaissait tout de suite où il se trouvait. « La cabane hurlante ? » J'acquiesçais, en regardant autour de moi. « C'est ma sœur qui m'en a parlé. Il paraît qu'elle est très populaire, mais souvent déserte, alors, je pensais que c'était le meilleur endroit pour travailler. » Je n'eus même pas le temps d'expliquer ce que j'avais prévu qu'une malle commençait à faire du bruit. Enfin, c'était surtout son contenu qui se manifestait. Je m'en approchait, en passant mes doigts à la surface. « C'est un épouvantard dedans. J'ai eu un mal fou à le trouver. » J'en avais demandé si nous en avions au château, avant de me résoudre à demander au professeur Chastang si il n'en avait pas un à me confier. Il accepta volontiers. Finalement, ça servait que mon frère travaille avec lui tous les samedis.
« Ma grand-mère est la Grande Prêtresse du pays, je lui ai demandé conseil. Et je me suis rendue compte que même si ta colère était l'un des soucis, je pense que c'est ta peur qui prime. Et cette peur, tu la caches sous ta colère. » Le temps de mon explication, je m'assis sur la malle, les jambes croisées, très droite. J'avais l'impression de faire de la psychologie de comptoir, mais ça me semblait très logique. « Si tu arrives à trouver un point d'ancrage face à un épouvantard, je pense que tu pourras le trouver dans ta colère. Alors… Est-ce que tu veux essayer ? » De toute façon, même si ça dérapait, nous étions deux. Je n'aurais aucun problème à faire apparaître mon propre épouvantard, tant que je savais nous en débarrasser. Je regardais Sirius dans les yeux, qui semblait hésiter un instant. Mais il avait sa baguette en main, alors… Ça semblait être un signe, non ? Et quand il me fit un signe de tête, je sus qu'il était prêt.
Je me levais, pour me placer derrière la malle. Je me penchais pour l'ouvrir… Quand Sirius sortit de la malle. Du moins, une copie de Sirius. Intéressant. Les deux Sirius se regardèrent dans les yeux, avant que la copie ne tombe au sol. Il se mit à hurler, alors que j'entendais très distinctement ses os se briser. Je compris immédiatement, surtout avec ses confidences. Il se transformait en loup. Je regardais le réel Sirius, mais il ne bougeait pas. « Sirius, réfléchis à ce qui te rend heureux ! » Il semblait tétanisé, mais en entendant ma voix, il me regardait. Un court instant, avant de regarder à nouveau son double. Il continuait de se transformer. Des poils noirs apparurent, il continuait de hurler de douleur. Et Sirius ne leva toujours pas sa baguette. « Je sais que tu peux y arriver, fais-toi confiance ! Ça ne pourra jamais arriver, Sirius. Pense à ton côté humain ! » Je n'étais pas sûre que ça marcherait vraiment, mais il fallait qu'il retourne à la réalité. Il fallait qu'il comprenne que cette vision n'était pas lui.
Le faux Sirius avait laissé place à un loup. Pas un vrai, mais je me demandais si ce n'était pas la vision déformée du jeune homme. J'étais d'ailleurs sur le point d'intervenir, quand Sirius leva sa baguette, et cria : « Riddikulus ! » Le sort atterrit sur le faux Sirius, qui raptissa presque immédiatement, pour devenir un simple chihuahua. Je me dépêchais de l'attraper pour le remettre dans la malle, que je refermais, avant de regarder Sirius. Il me regardait, en souriant. Un vrai sourire, un sourire qui montrait qu'il était fier de lui. « Tu… Tu a réussi, félicitations !! Je savais que tu pouvais y arriver. » Je lui lançais un grand sourire, en applaudissant, avant de m'approcher de lui.
« J'ai quelque chose pour toi. » Je sortis de ma poche un petit paquet, emballé dans du papier brun. Je le tendis au jeune homme, en lui intimement de l'ouvrir. C'était un médaillon en zinc argenté, avec toutes les évolutions de la lune, en forme de croissant. « C'est le symbole de Áine of Knockaine, notre déesse de la lune. Dans nos croyances, elle est associée au Solstice d’Été. Elle amène l’espoir auprès des femmes, et leur rappelle les temps heureux. » Je fis un petit sourire amusé, alors que Sirius continuait de le regarder. « Je sais que tu n'es pas une femme, mais ce médaillon devrait te rappeler tes propres temps heureux. Et te protéger du noir de la nuit. » Je faisais écho, ici, à ses confidences d'il y a deux semaines. J'espérais ainsi rassurer le petit garçon qui se trouvait en lui. Après tout, les loups se transformaient bien la nuit, non ? Peut-être qu'il y avait eu une association quelconque ? Dans tous les cas, j'espérais que ça l'aiderait, d'une manière ou d'une autre -et surtout que ça lui fasse plaisir.
« Ça devrait aussi t'aider à contrôler ton loup. Elle est associée aux loup-garou. C'est elle que nous prions toutes les nuits de pleine lune. » Là, je commençais à mettre plus de forme dans mes mots, mais je sentais que j'allais aller sur un sentier un peu glissant. Après tout, j'avais quelque chose à dire, et j'avais un peu peur de sa réaction, alors qu'il avait eu une première victoire. « Je sais que tu détestes, non, que tu hais ton côté loup. Mais quoi que tu veuilles, il sera toujours là. Même si tu ne le veux pas. Il faut que tu apprennes à l'accepter un petit peu. Ce médaillon, si tu décides d'y croire, peut t'aider non pas à l'éliminer mais à l'apprivoiser. Et un jour, tu te rendras compte que tu auras peut-être besoin de ce cad… De ce côté de toi. » J'allais dire de ce cadeau de la nature, mais ça, c'était la propagande irlandaise qui parlait. Cette propagande servait à rassurer les créatures, pour qu'elles comprennent qu'elles n'étaient pas des monstres. Je vis une étincelle passer dans les yeux de Sirius, qui m'interpellait légèrement. Si je voulais lui arracher, je me devais de la jouer fine. « On réessaie ? » Je m'approchais le plus naturellement de la malle, avant de me retourner. « Ou as-tu quelque chose à me dire avant ? » Qu'est-ce qu'il voulait me partager ? Quelque chose qu'il avait vécu en envoyant son sort ? :copyright:️ Justayne[/color][/b]
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I'll show you how a real queen behaves, No damsel in distress, don't need to save me
Nous sommes le jeudi 21 février 2002. Sirius, fils aîné de Seth et Saoirse Green, a fait son entrée à l'UMS début septembre dans le cursus de Musique. Depuis novembre, il voit chaque semaine Louve Iceni, une loup-garou qui l'aide à accepter la partie lupine qui le ronge depuis tant d'années.
Cause you can be the beauty and I could be the monster
Louve se précipita pour attraper l’Epouvantard rendu à sa forme ridicule et le remettre dans sa malle d’origine. Elle ne voulait pas risquer que l’Epouvantard reprenne de la force. Et elle avait raison. Sirius sentait toute l’énergie qu’il avait mis là-dedans, le souffle court. Il leva les yeux vers Louve qui souriait, aussi fière que si elle entendait les premiers mots de son enfant.
« Tu… Tu as réussi, félicitations !! » « J’ai réussi. » répéta-t-il à son tour, ne pouvant masquer son sourire. « Je savais que tu pouvais y arriver. » dit-elle en l’applaudissant. « J'ai quelque chose pour toi. »
Sirius cligna quelques instants des yeux, surpris, alors que Louve sortait de sa poche un petit paquet emballé. Un cadeau ? Il l’attrapa, soudain un peu nerveux. Il ne s’y attendait pas, c’était clair. Pourquoi elle faisait ça ? Le voyant hésiter, elle lui fit signe de l’ouvrir. Sirius déglutit avant de déchirer rapidement le papier cadeau. Il souleva alors le couvercle de la petite boîte et découvrit un médaillon … en forme de croissant de lune. Il l’observa avec un mélange de curiosité et d’appréhension.
« C'est le symbole de Áine of Knockaine, notre déesse de la lune. » expliqua Louve. « Dans nos croyances, elle est associée au Solstice d’Été. Elle amène l’espoir auprès des femmes, et leur rappelle les temps heureux. » « Auprès des femmes ? » répliqua-t-il en soulevant le médaillon dans la paume de sa main.
Louve eut un sourire amusé.
« Je sais que tu n'es pas une femme, mais ce médaillon devrait te rappeler tes propres temps heureux. Et te protéger du noir de la nuit. »
Sirius croisa le regard de la princesse. Il n’y avait aucun jugement ni moquerie dans le ton de sa voix. Mais juste un clin d’œil à leur discussion d’il y a deux semaines. Cette attention lui procura une étrange sensation. Il ne savait comment réagir à dire vrai. Il n’avait jamais eu un cadeau qui le touchait autant. Il referma doucement la main et baissa les yeux, peu à l’aise avec le contact visuel.
« Merci … » « Ça devrait aussi t'aider à contrôler ton loup. » ajouta-t-elle. « Elle est associée aux loup-garou. C'est elle que nous prions toutes les nuits de pleine lune. »
Associé aux loups-garous … Une boule se forma dans sa gorge alors qu’il poussait un long soupir. Un médaillon qui lui rappelerait sans cesse ce qu’il était. Il ouvrit la paume de la main pour regarder la croissance magique de la lune qui s’opérait sur le pendentif.
« Je sais que tu détestes, non, que tu hais ton côté loup. » se reprit Louve. « Mais quoi que tu veuilles, il sera toujours là. Même si tu ne le veux pas. Il faut que tu apprennes à l'accepter un petit peu. »
Sirius réalisait qu’il y a à peine quelques semaines, il se serait surement emporté pour ce que Louve lui disait à cet instant. Il aurait grogné, hurlé même. Disant que ce n’était pas pour lui, qu’il voulait l’ignorer. Mais à cet instant, il gardait le silence. Est-ce qu’il commençait à accepter cette cruelle vérité ? Qu’il serait toujours un demi-loup ?
« Ce médaillon, si tu décides d'y croire, peut t'aider non pas à l'éliminer mais à l'apprivoiser. Et un jour, tu te rendras compte que tu auras peut-être besoin de ce cad… De ce côté de toi. »
Cette fois-ci, Sirius leva les yeux vers Louve. Ses yeux marrons, légèrement dorés, le scrutaient. Elle avait foi en ce qu’elle disait mais elle avait surtout foi … en lui. Sirius déglutit à nouveau. C’était vertigineux de réaliser à quel point elle avait confiance en lui. Mais si elle lui faisait confiance, c’était peut-être que … peut-être en valait-il la peine ?
« Merci. » répéta-t-il en serrant plus fort le médaillon entre ses doigts. « J’essaierai … de repenser à tout ce que tu as dit. »
Ce n’était pas des paroles en l’air. D’ailleurs, jamais il ne disait quoi que ce soit en l’air. Il économisait toujours sa salive pour ça. Non, il était sérieux. Il essaierait de repenser aux mots qu’elle avait choisis d’employer et à ce médaillon, à ce qu’il signifiait.
« On réessaie ? » demanda-t-elle alors en se rapprochant de la malle. « Ou as-tu quelque chose à me dire avant ? »
Sirius rangea le médaillon dans sa poche, se promettant d’y trouver une chaîne pour aller avec. Pourquoi pas proposer cette sortie à Shanna, comme ça il aurait l’occasion de lui parler de ses progrès avec Louve ? Ça changerait de leur dispute au sujet d’Oscar …
« En faites … » commença-t-il en prenant une inspiration. « Mon point d’ancrage. C’est … ce sont des souvenirs que j’ai choisis. Un peu comme j’ai fait avec mon Patronus. Sauf que, là … »
Il se mordit la lèvre inférieure, comme s’il avait peur de dire ça à voix haute. Pourtant, il le voulait. Il voulait vraiment se confier à Louve à ce sujet. Petit à petit, la jeune femme avait réussi à gagner sa confiance et il se surprenait à avoir envie de lui parler de certains de ses progrès.
« … là j’ai utilisé aussi mon loup. Enfin, je crois. J’ai senti … cette sensation quand il commence à apparaître. Mais, je crois que j’ai réussi à le diriger vers ma baguette. Et je crois qu’il m’a donné de la force pour faire ce que j’ai fait. »
Il leva les yeux vers Louve comme pour chercher son approbation ou une explication à ce phénomène. Comme elle lui avait dit, peut-être qu’il pourrait vraiment apprendre à l’apprivoiser et à en tirer quelque chose de bien. La jeune femme sourit, comme si elle attendait parfaitement qu’il dise ça. Mais elle ne s’en réjouit pas trop fort et hocha doucement la tête, comme si silencieusement elle avait compris tout ce que Sirius avait essayé de lui transmettre. A nouveau, elle lui demanda s’il était prêt à réessayer. Avec un sourire sincère, Sirius leva sa baguette :
« Allons-y ! »
Jeudi 4 avril 2002
Sirius sourit à Louve avant de piocher une nouvelle fois dans les frites qu’ils avaient réunis dans une boîte en carton entre eux.
« Je suis vraiment curieux de savoir ce que Shanna en a pensé. » admit-il. « Mais tant mieux si ta sœur a aimé. Poudlard a bien besoin de se détendre de temps en temps, même si je n’aurai jamais participé à un flashmob ou quoi que ce soit du genre. »
Il termina en deux autres bouchées son burger, écoutant avec un sourire en coin la réponse de Louve. Les semaines avaient continué de défiler et leurs entraînements s’étaient poursuivis. Sirius faisait des progrès chaque semaine, il le sentait désormais. Il avait raconté à quel point son loup lui avait été d’une aide précieuse lors de l’attentat à l’UMS un mois plus tôt et il portait le médaillon que Louve lui avait acheté. Caché sous ses tee-shirts, il reposait pourtant fidèlement chaque jour sur sa poitrine. Et il devait bien avouer que ses excès de colère avaient diminué. Il ignorait si c’était le fait qu’il faisait réellement des progrès là-dessus, ou bien si c’était la présence de Louve qui lui était devenue si familière.
Avec elle, il arrivait à comprendre un peu mieux qu’être un demi-loup n’était pas si horrible que cela. Bien sûr, jamais il ne souhaiterait être un loup-garou à part entière, mais il avait peut-être des choses à tirer de son loup. Louve n’avait pas hésité à lui confier tout ce qu’elle savait des demi-loups et des avantages qu’il pouvait en tirer. Et, petit à petit, au lieu de fuir et de rejeter sa partie lupine, celle-ci s’était agréablement montrée à lui. Au fur et à mesure, comme un animal qu’on apprivoise, Sirius avait réussi à approcher son loup, diminuant la peur que cela lui inspirait autrefois. Il y avait encore des ratés, des soubresauts où il menaçait de tout laisser tomber, mais rien d’aussi explosif qu’auparavant.
Louve et Sirius prenaient souvent le temps de manger un morceau avant de commencer leur entraînement. Surtout par un jour comme celui-ci où le soleil commençait enfin à chauffer l’Angleterre. Assis dans l’herbe, ils avaient partagé un burger et quelques frites.
« Ouais j’ai lu … » dit-il sombrement en répondant à Louve qui l’interpellait sur un autre article de la Gazette. « Je … j’ai du mal à comprendre ce qui s’est passé. Mais … ouais, on est tous inquiets. »
Il arracha une touffe d’herbe en repensant à la manière dont il avait porté secours à Dae lors de l’attentat. Ce Blue Dragons avait vraiment une dent contre lui et heureusement qu’ils avaient croisé la route du prince – et à la limite de celle de Jared – sinon les choses auraient pu être beaucoup plus grave. Mais où était Dae à présent ? Que s’était-il passé ?
Peu adepte de s’étaler sur les sentiments, il se leva d’un bond, ayant de toute façon fini de manger.
« Bon, on s’y met ? » demanda-t-il.
Louve lui sourit et tous deux commencèrent un exercice de relaxation. Sirius n’avait guère apprécié la blague au départ quand Louve lui avait proposé. Mais en faites, de plus en plus il arrivait à se détendre et c’était là qu’il pouvait effleurer sa partie lupine endormie. Pour un loup, c’était un exercice assez simple. Pour un demi-loup, cela demandait d’aller fouiller en profondeur. Et, de plus en plus, Sirius multipliait cet exercice, allant sciemment réveiller son loup pour l’apprivoiser et apprendre à le connaître.
Alors qu’il écoutait la voix de Louve et qu’il venait d’effleurer l’essence de son loup, une voix désagréable l’interrompit dans son exercice. Il ouvrit les yeux. Son sourire avait disparu instantanément car même avant de le voir, il savait qui était la personne qui approchait d’eux.
« Qu’est-ce qu’il veut c’lui-là ? » grommela-t-il.
Jared Parkinson arrivait, son sac en bandoulière, comme l’étudiant sérieux qu’il était. Sirius roula des yeux. A présent qu’il avait réveillé le loup en lui, il le sentait fourmiller dans ses doigts et ses yeux étaient légèrement ambrés.
Ses rapports avec Jared étaient … complexes. Il avait détesté durant des années silencieusement son cousin, avant qu’une grosse dispute n’éclate en janvier lors du week-end traditionnel réunissant les Parkinson, les Green et les Braeden. Mais ce week-end s’était terminé d’une étrange façon où Jared lui avait fait goûter les joints d’aconit tue-loup. Et puis, il y avait eu cet attentat à l’UMS où … bah Sirius devait le reconnaitre, Jared l’avait aidé à le ramener. Après avoir découvert les Epouvantard respectifs de chacun, voilà que Jared l’avait vu faire face à ses pires cauchemars à cause de ce sortilège de magie noire.
On pouvait dire qu’un genre de trêve s’était instauré entre eux. Sirius était forcé de reconnaître que Jared n’était pas aussi crétin qu’il le laissait apparaître. Et peut-être même qu’il avait des peurs assez raisonnables. Mais c’était plus facile de le détester. Surtout quand en cet instant Jared interrompait l’une de ses séances avec Louve.
Sirius ne voulait pas que Jared le sache. Il ne voulait pas qu’il le voit parler avec Louve, car cela signifierait qu’il s’intéressait à la famille royale, et donc à tous ces trucs que Jared adorait sur l’Irlande. Il ne voulait pas non plus qu’il voit la complicité qu’il avait développé avec Louve, ni qu’il comprenne pourquoi ils se voyaient. Ca ne regardait pas Jared et Sirius n’était pas suffisamment à l’aise pour que son cousin sache exactement les épreuves qu’il traversait. Il savait qu’il se moquerait bien de lui en apprenant ça et Sirius était prêt à le démonter s’il faisait une quelconque remarque sarcastique à ce sujet.
« Dis-lui de partir … » siffla Sirius à l’adresse de Louve.
Mais évidemment Jared avait l’ouïe fine et lança une pique bien sentie à Sirius qui ne put retenir un grondement montant dans sa poitrine.
« L’apprenti Médicomage a fini de faire joujou avec sa panoplie de savant fou ? » répliqua Sirius. « Avec ton emploi du temps soi-disant chargé, je remarque que ça ne t’empêche pas de venir foutre ton nez n’importe où. »
Sirius sentait presque le loup en lui aboyer à cette remarque. Ses poings s’étaient indéniablement serrés et son regard était dur. Toute trace du sourire qu’il avait adressé auparavant à Louve avait disparu. Il roula des épaules, sentant la tension s’accumuler en elles alors que le loup ressentait ce qui l’alimentait autrefois : peur, nervosité, colère, rage. Sirius ferma les yeux et tenta de le refouler. Mauvaise idée. Celui-ci ne voulait pas être mis au placard. La panique montait, formant un nœud dans son estomac. Il essayait de se rappeler ce que Louve lui avait enseigné : ne pas le refouler, l’apprivoiser.
Mais c’était tellement difficile de se concentrer quand ce connard de Jared était juste en face en train de faire le malin. Et si Sirius se servait à nouveau de la force du loup pour lui faire fermer son clapet ?
Cause you can be the beauty and I could be the monsterAvec Louve et SiriusJeudi 4 Avril 2002
Je ne suis plus vraiment concentré sur les cours depuis quelques jours, il s'est passé beaucoup trop de choses en peu de temps. Ce mois de mars a été intense et mouvementé. C'est trop de choses que je n'arrive pas à vraiment gérer. Trop de choses que je ne prends pas le temps d'étudier, de digérer suffisamment, tout s'enchaine sans que j'ai le temps de bien y réfléchir, de prendre du recul, je ne sais quand je vais pouvoir le faire. Il y a eu déjà la peur que Bleddyn m’annonce une peine maximale pour avoir tué lors de l'attentat début mars, pour au final avoir eu la révélation que Diabhal existe vraiment, que mon ami en est le dirigeant et qu'il me demande d'en faire parti. Moi, le gros losers, faire partie de l'armée secrète Irlandaise. C'est vraiment un truc inespérée pour la personne que je suis. Mais pour se faire, il y a une condition à respecter, et pour cela, dans deux jours je vais devoir me transformer en loup sans pleine lune en Irlande, devant toute la cour, devant mes parents, mes sœurs, devant tous les Iceni.
Ça fait deux ans que j'ai refusé le titre de Duc, et maintenant je vais y être obligé, mais j'ai besoin de l'armée, j'ai besoin de ce but dans ma vie, j'ai besoin de me sentir vivant et je ne me suis jamais aussi senti vivant que lors de l'attentat à l'université. Je n'ai pas eu peur, du moins pas pour moi, ça en dit long certainement sur ma santé mentale, mon psy ferait certainement un diagnostic à la hâte. Mais dans la demande de Bleddyn, j'ai vu là une porte, une porte que je n'ai jamais ouverte, que je n'ai jamais explorée, et je dois essayer encore, peut-être que derrière il y aura une solution ? Peut-être que derrière la vie vaudra d'être vécue. La seule fois où j'ai ressenti ça, c'est quand j'ai dormi collé contre Clarissa au Chalet, j'avais ce sentiment d'être à ma place, et j'ai le même sentiment pour Diabhal.
J'ai d'autres milliers de merdes qui me préoccupent aussi, ma relation pas très honnête avec Victoria, complètement bancale et subie, tout comme ma relation avec Clary. J'ai envie d'être avec Clarissa, enfin, c'est plus compliqué que ça, disons que je n'ai plus envie d'être avec Victoria, et je me sens piégé, je ne sais pas vraiment comment faire, ce qu'il faut dire et à quel moment. Vic m'a avoué penser être amoureuse de moi après notre première fois, et ça m'a terrifié. Qui peut croire ça ? Qui peut m'aimer ? Qui peut vouloir que je l'aime ? Ne comprennent-ils pas que je suis irrécupérable ? Que la vie m'a trop abimé ? je sais qu'Emy me frapperait l'arrière du crâne pour penser ça, mais Dana elle même sait que je n'aurai pas du être ici. Et dès que je sens un peu de joie, un peu de bonheur, je foire tout. Par exemple j'ai complètement merdé au Chalet avec le frère de Vic, Edmund, et avec Clary. J'ai joué au con et j'ai eu ce que je méritais. Clarissa était tellement déçue quand elle a appris que je n'étais pas célibataire, elle a cru que je me foutais de sa gueule, alors que pas du tout. Je voudrai lui donner plus, lui donner ce qu'elle attend, mais je ne suis rien de bon pour elle. Et pour tout avouer, je ne m'étais pas rendu compte à quel point elle aussi pouvait s'attendre à des choses venant de moi, s'attendre à plus, qu'elle aussi pouvait s'être attachée alors que je n'arrête pas de la prévenir que je suis qu'un connard qui ne peut que la décevoir et lui faire du mal. Et c'est le cas, c'est arrivé, bien plus tôt que je le pensais.
Puis y'a aussi la relation d'Emy avec son Blue Dragon qui me pète bien les couilles, le fait que j'ai tabassé ce connard, ça n'a rien changé à la haine que je lui porte, et puis le pire c'est que je ne me suis même pas senti soulagé de l'avoir frappé. Je ne lui fais pas confiance, j'ai peur pour Emy, mais je n'ai pas d'autre choix que de lui faire confiance à elle. Je sais que je pourrai tout lui faire arrêter, elle me l'a avoué, elle a dit que si elle avait un choix à faire, ce serait moi. Et cela me dérange, de manière générale, que les gens me choisissent moi me dérange. Je ne suis pas un choix, je ne suis pas une option. Enfin je ne devrai pas l'être, ils ne devraient pas compter sur moi, ils ne devraient pas s'attacher à moi. Quand ils me disent qu'ils tiennent à moi, qu'ils m'aiment ça me fait l'effet d'être une bombe prête à exploser à leur visage, parce que je ne resterai pas, s'il n'y a rien derrière cette porte, je ne resterai pas. Pour quoi ? Pour qui ?
Il est 13h quand je traverse un jardin pour rejoindre rapidement un bâtiment et continuer de travailler sur le traitement d'Enola. Je sens que je fais des progrès car j'ai pu réduire drastiquement le nombre de comprimés, je sais que je peux atteindre mon but, que je peux lui faciliter la vie. Je sais qu'il faut au moins que je termine ça...
Je repère alors rapidement ma future reine assise dans l'herbe avec un gars qui n'est pas mon futur roi. Je suis assez surpris, assez pour me mêler de ce qui me regarde pas. J'ai toujours peur que quelqu'un abuse de la bienveillance de Louve, elle donnerait tout son temps et son énergie pour n'importe quel péquenot comme moi. Et qu'est-ce que je dis... elle parle à Sirius, mon cousin. Je le vois arracher un peu d'herbe autour de lui. Il a oublié qu'il était un loup plutôt qu'un mouton ? Je m'approche un peu plus et regarde cette scène assez stupéfié. Mais qu'est-ce qu'il branle ? C'est quoi ce délire ?
« Qu'est-ce qu'il se passe ici ? C'est pour améliorer tes performances musicales ? »
Une sorte de yoga pour les nuls ? Pourquoi il est avec Louve c'est surtout ça la question ?
« Qu’est-ce qu’il veut c’lui-là ? »
Je regarde Louve avant de la saluer selon le protocole en me courbant comme il se doit.
« Votre altesse. »
Je repère les yeux de mon cousin, étrangement et subtilement ambrés. C'est quoi ce délire ? Comment peut-il faire cela ? Qu'est-ce qu'il se passe ici ? Les choses ont évolué avec Sirius depuis la pleine lune de janvier chez mes parents avec ma marraine. J'ai vu des choses, il a vu des choses, nos peurs les plus profondes. On en a jamais parlé mais ça a changé un truc entre nous, je l'ai trouvé moins con, moins mauvais que l'image que j'avais de lui, à cause de Poudlard, où il a toujours laissé ses amis faire, il n'est jamais intervenu pour me défendre, s'il ne m'a jamais frappé, il m'a fait du mal de son inaction. Est-ce qu'il se souvient de mes yeux implorants ? Est-ce qu'il se rappelle de mes cris ? Est-ce qu'il a seulement compris ma souffrance ? Je ne sais pas vraiment quoi penser de lui où ce qu'il pense de moi depuis janvier. Et y'a eu l'attentat où on l'a aidé avec son ami Dae, Bleddyn et moi. Je n'avais aucune animosité envers lui, mais là c'est plus fort que moi, de le voir avec la princesse Iceni m'agace. Qu'est-ce qu'il lui veut ? C'est pas son délire à lui, il a toujours détesté ce côté royal de la famille. Il n'a jamais rien voulu entendre de l'Irlande, de nos croyances, de ma vie. Ça l'a toujours bien fait chier de venir en week end chez moi, de se foutre de la gueule de ma foi, de nos convictions. Et maintenant il échange des frites avec la future Reine d'Irlande ?
« Dis-lui de partir … »
J'écarquille mes yeux. Il la tutoie ? Comment ose-t-il ! Mais il sait au moins qui s'est ?
« A l'époque t'avais pas besoin d'une fille pour me demander de partir Mich Mich. En l’occurrence une princesse.»
Je fais référence à Poudlard, à toutes ces fois où ils faisaient le malin avec ses copains, avec ce connard de Scott-Rosier. Est-ce qu'il le sait que je l'ai défoncé le week end dernier ? Est-ce que Thomas et Sirius sont encore en contact ? Évidemment qu'il sait ce à quoi je fais référence, il grogne ! J'ai envie de rire. Il est sérieux ? Il ose me grogner maintenant ? Il a réalisé que j'étais plus ce gringalet de Poudlard ? Il a pris conscience que je savais me défendre maintenant ? J'avance de trois pas vers lui.
« L’apprenti Médicomage a fini de faire joujou avec sa panoplie de savant fou ? » « L'apprenti Médicomage t'a sauvé la vie il y a un mois. » « Avec ton emploi du temps soi-disant chargé, je remarque que ça ne t’empêche pas de venir foutre ton nez n’importe où. » « C'est peut-être parce que tu ne sais pas être organisé ? Tu veux de l'aide ? »
Je fais un pas de plus pour m'approcher de Sirius. Je le regarde fermer ses yeux, serrer ses poings, est-ce qu'il va me sauter dessus comme je l'ai fais la dernière fois chez mes parents en janvier ? J'ai sauté par dessus la table pour le chopper, après ça on a été sévèrement puni et on a du enterrer la hache de guerre à notre manière, on a pu eu d'autre choix si on voulait tous les deux rentrer, ça s'est détendu entre nous après ça, du moins je le croyais.
On dirait qu'il réfléchit à tout ce qu'il pourrait me faire ou non. C'est assez fascinant de ne pas le voir me répondre du tac au tac ou me provoquer ouvertement, comme il l'a fait lors de cette pleine lune, à me chercher sur le fait que je me batte à l'UMS devant ma famille qui n'était pas au courant, ou faire des références au fait que Rogue soit mort malgré qui soit maître des potions. Pourtant il ne fait rien, il continue de se... concentrer. Non, non on dirait qu'il essaye de se calmer, de se contrôler. Je lance un regard furtif à Louve.
« Tu réfléchis à un sort qui pourrait me faire mal Mich Mich ? Ou une réplique cinglante qui pourrait me vexer ?»
Je crois qu'en terme de commentaires sarcastiques j'ai à peu près tout connu, et tout vécu en terme de sortilèges sur le marché. On peut dire que je suis assez résistant à présent. J'ai d'ailleurs hâte d'en apprendre un peu plus à Diabhal, je suis assez pressé de pouvoir pousser mes limites, de voir de quoi je suis vraiment capable, de voir ce que je peux encore supporter. Je n'ai absolument pas peur des entrainements, mais je sais que je le devrai. En fait, j'ai hâte de me confronter à d'autres loups, de ne pas retenir ma force. J'ai hâte de servir l'armée de Bleddyn, de le rendre fier, de me sentir utile.
Cause you can be the beauty and I could be the monsterAvec Sirius Green Jeudi 21 février 2002
« Merci. J’essaierai … de repenser à tout ce que tu as dit. » Les propos de Sirius me font sourire. Surtout, ils me font plaisir. J'ai l'impression que, enfin, le jeune homme commence à s'ouvrir à moi. Au monde. Mais surtout, à lui. Nous sommes sur le bon chemin pour qu'il puisse se sentir mieux dans sa peau. Je préfère toutefois ne pas insister, pour ne pas le brusquer. A la place, je lui demande si il veut me parler avant de réessayer. En effet, j'avais l'impression qu'il ne m'avait pas tout dis. « En faites … » Il prit le temps de respirer, et je l'encourageais doucement du regard à s'ouvrir. « Mon point d’ancrage. C’est … ce sont des souvenirs que j’ai choisis. Un peu comme j’ai fait avec mon Patronus. Sauf que, là … » Là, quelque chose semblait avoir changé. C'était une excellente idée d'avoir eu recours à des souvenirs heureux. Mais autre chose semblait avoir émergé, et Sirius voulait en parler. De nouveau, j'étais touchée par cette marque de confiance.
« … là j’ai utilisé aussi mon loup. Enfin, je crois. J’ai senti … cette sensation quand il commence à apparaître. Mais, je crois que j’ai réussi à le diriger vers ma baguette. Et je crois qu’il m’a donné de la force pour faire ce que j’ai fait. » Ce que j'attendais se produisait enfin. Sirius faisait enfin confiance à son loup. Il se servait de lui pour avoir ce dont il avait besoin. Même si j'avais eu du mal à concevoir son refus total d'accepter sa nature, en parlant avec lui, je comprenais mieux ce qu'il ressentait. Mais je savais qu'il ne pouvait pas faire comme si il n'existait pas. Et enfin, il semblait comprendre ce que he voulais lui dire quand je lui conseiller de cohabiter avec son loup. Je me contentais de lui sourire, de manière la plus bienveillante possible. Je ne voulais pas causer de retour en arrière possible en le pressant d'informations, ou ce genre de choses. Il devait comprendre de par lui-même. Alors, je me contentais de lui demander : « Est-ce que tu es prêt à réessayer ? » Sirius sourit, et leva sa baguette. « Allons-y ! » Alors, en étant sûre qu'il allait réussir, je rouvris le coffre.
Jeudi 4 avril 2002
Avec une certaine satisfaction, je repris une frite sous le sourire de Sirius. Je ne pouvais pas lui avouer que avant de rencontrer Alekseï, mon nouveau petit ami officiel, je ne connaissais pas ça. Ni les pizzas, les burgers, les milk-shake, les soirées étudiantes… Aliocha me montrait la réelle vie étudiante, et je commençais à la vivre de plus en plus, et pas forcément avec lui. Comme le fait de manger dehors avec d'autres étudiants. Avec Sirius, ous partagions, comme de plus en plus souvent, un repas avant de reprendre son entraînement. J'appréciais de passer ces moments avec lui, maintenant qu'il était plus ouvert, et moi, plus patiente. Nous apprenions lentement à nous connaître, même en parlant de tout et de rien. Comme du flash-mob organisé par des élèves de Poudlard, voilà quelques jours plus tôt. Je racontais à Sirius la longue lettre détaillée envoyée par Accalia sur ce simple évènement. « Je suis vraiment curieux de savoir ce que Shanna en a pensé. Mais tant mieux si ta sœur a aimé. Poudlard a bien besoin de se détendre de temps en temps, même si je n’aurai jamais participé à un flashmob ou quoi que ce soit du genre. » J'hochais la tête, le temps de finir d'avaler mes frites en attrapant une serviette en papier. « C'est vrai que j'aurai aimé voir ça. Moi non plus, je n'en ai jamais fait. Et ça avait l'air d'être un sacré évènement, selon elle. Après, Accalia se réjouit de tout, y compris des escaliers qui bougent dans tous les sens. » Elle avait tellement eu besoin de voir autre chose que l'Irlande, je ne regrettais pas de m'être battue auprès de mes parents et des Ministres pour qu'ils nous accordent cette liberté. Ça nous permettait d'ouvrir nos horizons, comme moi avec Sirius. Avant, jamais je n'avais pensé qu'on puisse vivre si mal sa nature. Maintenant, je savais que c'était possible, et je savais que j'avais désormais les armes pour aider les prochains dans sa situation.
Je m'essuyais les doigts dans la serviette en papier, en prenant mon milk-shake dans mon gobelet. « J'ai lu aussi qu'un étudiant, Dae, avait disparu… Mon frère m'a dit que c'était une connaissance à toi…? » Bleddyn les avait aidés lors de l'attentat. Il avait croisé leur route avec Jared, et ils s'en étaient sortis tous les quatre. Mais entre-temps, Dae avait disparu. « Ouais j’ai lu … Je … j’ai du mal à comprendre ce qui s’est passé. Mais … ouais, on est tous inquiets. »« J'imagine bien, oui… » Répondis-je, en essayant de prendre un ton compatissant. J'avais déjà demandé à Bleddyn si nous pouvions faire quelque chose, et il m'avait avoué qu'il y avait déjà pensé. Mais nous n'avions aucune autorité en Angleterre, alors, il n'avait rien pu faire. « Bon, on s’y met ? » Je sentais bien que Sirius n'avait plus aucune envie d'en parler, alors, il changea de sujet. On se leva tous les deux, et j'époussetais mes cuisses, avant de lui sourire. « On va commencer par la respiration, d'accord ? » Cet exercice lui permettait d'apprendre à connaître son loup, et vivre avec lui. J'avais finis par lui expliquer pourquoi il l'avait senti quand il avait mit toute son énergie dans sa lutte contre l'épouvantard. Je lui avais parlé des bienfaits de pouvoir utiliser sa force, que ça augmentait la sienne. Et que si il souhaitait la réutiliser, il devait apprendre à entrer en contact avec son loup. De toute façon, c'était nécessaire pour apprendre à vivre avec, et donc, pour calmer ses accès de colère, en s'acceptant. Tout était lié, et je pense que Sirius commence à le comprendre.
Nous étions en plein exercice. Sirius avait les yeux fermés et écoutait ma voix quand une voix nous interrompit. « Qu'est-ce qu'il se passe ici ? C'est pour améliorer tes performances musicales ? » Je me tournais pour voir qui avait parlé. Si je n'avais pas été aussi douée pour cacher mes émotions, je pense bien que j'aurai sursauté. Bleddyn n'aurait pas été content de voir que j'avais baissé ma garde. Heureusement, je me retrouvais face à Jared. Jusqu'à ce que je me rende compte que ça allait poser problème, et la réaction de Sirius ne se fit pas attendre. « Qu’est-ce qu’il veut c’lui-là ? » Jared et Sirius étaient cousins, mais surtout, ils ne s'entendaient pas du tout… Je n'étais pas sûre que c'était le moment que les deux se retrouvent en tête-à-tête. « Votre altesse. » Selon la tradition, Jared s'inclina devant moi. Autant avec Bleddyn, à l'Université, il parvenait à se comporter comme si mon frère n'était qu'un étudiant, autant avec moi, il respectait toujours l'étiquette. « Monsieur Parkinson. »
Mais Sirius se pencha vers moi et me souffla : « Dis-lui de partir … » Cette simple réaction me prouvait ses progrès. Il ne s'enfuyait pas en tournant le dos à ses problèmes. Il était prêt à continuer nos exercices, malgré l'interruption causée par son cousin. Je n'eus pas le temps de répondre que Jared s'en occupa à ma place : « A l'époque t'avais pas besoin d'une fille pour me demander de partir Mich Mich. En l’occurrence une princesse. »« L’apprenti Médicomage a fini de faire joujou avec sa panoplie de savant fou ? »« L'apprenti Médicomage t'a sauvé la vie il y a un mois. »« Avec ton emploi du temps soi-disant chargé, je remarque que ça ne t’empêche pas de venir foutre ton nez n’importe où. » Je regardais les deux échanger des piques, un par un, comme si je regardais un match de Quidditch ou un entraînement à l'épée. En fait, peut-être que l'interruption de Jared était aussi une bonne chose pour Sirius… J'observais ce dernier : ses poings étaient serrés, son regard était dur, son sourire avait disparu. Je sentais toute la tension qui s'échappait de lui, sans parler de son loup. En me concentrant, je pouvais ressentir sa colère. Sans parler de celle de Jared. Mais Sirius essayait de gérer ses émotions, véritablement. Voilà pourquoi c'était intéressant, cette interruption. Il pouvait essayer de se tester dans une situation réelle. Je le vis fermer les yeux. Je me concentrais exclusivement sur ses émotions, pour comprendre ce qu'il faisait. Et je sentis sa panique monter.
Il ne parvenait pas encore à gérer ses émotions. Pas encore. Et les commentaires de Jared n'aidait pas. « C'est peut-être parce que tu ne sais pas être organisé ? Tu veux de l'aide ? » Ce dernier s'approcha de son cousin. Lui aussi observait ses réactions. J'attendais de voir si Sirius parvenait à garder son calme, mais je n'en étais pas sûre. J'avais beau le regarder, je vis dans mon champs de vision Jared me regarder. « Tu réfléchis à un sort qui pourrait me faire mal Mich Mich ? Ou une réplique cinglante qui pourrait me vexer ? »« Assez ! Tous les deux. » Une main sur la taille, l'autre avait souligné mes propos par un geste rapide, comme pour m'imposer. Mais je savais que je l'étais déjà, au moment où j'avais ouvert ma bouche. Je savais que j'avais une aura royale impressionnante, quand je le voulais. Je savais que Jared me respectait, en tant que princesse héritière. Et surtout, je savais que mon loup avait touché le leurs, en tant que Alpha. Ils étaient obligés de se taire, et de m'écouter.
J'étais intervenue, parce que j'avais peur que Sirius craque. En tant normal, je n'aurai pas été contre qu'il se trompe, qu'il échoue une fois. Mais j'avais peur que cet échec en face de quelqu'un qu'il connaissait bien, d'autant plus quelqu'un de sa famille ne lui cause un retour en arrière. Je préférais prendre mes précautions. Et puis, il fallait en profiter pour crever l'abcès entre eux deux. « Je sais que vous avez du mal à vous entendre. Je peux comprendre ; je me suis déjà pris la tête avec mon frère. » Et Aslinn, quand il commença à s'intéresser à la psychologie, et qu'il passait son temps à analyser mon attitude froide et mon besoin d'être une princesse parfaite. Encore plus quand il commença à disserter sur mon côté maternel qui se réveillait en compagnie d'enfants. « Dans ce genre de cas, je me bats avec lui pour qu'on se défoule, comme des loups. Mais ce n'est pas une solution adéquate pour vous. Jared a un avantage, comme il s'est entraîné avec Bleddyn en novembre. » Je n'avais jamais mis Bleddyn au tapis, mais au moins, ce combat nous défoulait, et nous pouvions parler le cœur plus léger. « En l'état des choses, vous avez deux solutions : vous ignorer et continuer de nourrir vos ressentis, ou être honnête, et prendre une décision. Ensemble. » Je sentis leur envie, à tous les deux, de prendre la deuxième solution. Mais avant même que l'un des deux ne tourne les talons, je rajoutais : « Sauf que je ne vous laisse pas le choix. »
Je pris ma baguette, que je tournais vers un arbre suffisamment important pour que ses racines sortent du sol. Je lançais un sort, pour les transformer en une chaise et deux tabouret. Droite, sûre de moi, je m'installais sur la chaise. « Asseyez-vous. Tous les deux. » Je leur jetais un regard pour les dissuader de me défier. Heureusement, ils ne bronchèrent pas et se contentèrent de m'obéir. « Jared. Pile ou face ? » Je repris l'usage de son prénom exprès. Tant pis pour l'étiquette. Je n'étais pas là pour régler un problème de cour, mais une dispute familiale, dont l'un des deux partis ne faisait pas parti de mon pays. Jared choisit face. Je pris un Galion que je lançais en l'air. « Désolée, Sirius, c'est face. Tu vas être le premier à parler. » Je rangeais ma pièce, en me tournant vers lui. « Tu vas exposer à Jared toutes les raisons de ta colère. Ton cousin écoutera, en silence, n'est-ce pas Jared ? » Je lui jetais un regard entendu, pour qu'il n'en rajoute pas. « Puis il fera la même chose. Et nous trouverons ensemble ce que nous pouvons faire pour que vos contacts ne provoque pas un meurtre dans les temps à venir. » Même si c'était la promesse de ne plus se parler, au moins, ça ne provoquerait plus de conflits. :copyright:️ Justayne
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I'll show you how a real queen behaves, No damsel in distress, don't need to save me
Nous sommes le jeudi 4 avril 2002. Sirius, fils aîné de Seth et Saoirse Green, a fait son entrée à l'UMS début septembre dans le cursus de Musique. Depuis novembre, il voit chaque semaine Louve Iceni, une loup-garou qui l'aide à accepter la partie lupine qui le ronge depuis tant d'années.
Cause you can be the beauty and I could be the monster
« Tu réfléchis à un sort qui pourrait me faire mal Mich Mich ? Ou une réplique cinglante qui pourrait me vexer ? »
Un nouveau grondement monta de la poitrine de Sirius. Il savait que cela était devenu courant chez lui. Autrefois, c’était quelque chose qui se manifestait peu chez lui. Quand il était réellement en colère, ce grondement arrivait et finissait de faire perdre le contrôle à Sirius qui sentait là le loup qu’il voulait refouler faire surface. Aujourd’hui, à présent qu’il apprenait à connaître ce loup et à le laisser s’exprimer, les grondements étaient presque devenus récurrents. Il détestait cette partie animale de son être. Mais Louve lui avait dit que cela faisait parti du processus normal. Il devait laisser son loup s’exprimer, le connaître, savoir comment il était constitué, ce qui le faisait réagir avant d’apprendre à le contrôler et à le gérer. Il faisait confiance à Louve pour cela même si l’idée que son cousin l’entende ainsi lui déplaisait fortement.
« Tu n’as pas idée de … » « Assez ! Tous les deux. » les coupa soudain Louve.
Il n’avait même pas besoin de la regarder pour lui obéir. Son loup reconnaissait son Alpha et Sirius pinça les lèvres, son regard ne lâchant pas Jared.
« Je sais que vous avez du mal à vous entendre. Je peux comprendre ; je me suis déjà pris la tête avec mon frère. »
Sirius lâcha un rire.
« Sauf ton respect, Louve, il s’agit plus d’une prise de tête à ce compte-là. » dit-il.
Jared réagit aussitôt, comme envieux de ne pas laisser de terrain à Sirius. Ou bien détestait-il surtout la façon qu’il avait de s’adresser à la princesse ? Ses yeux semblèrent retrouvés un éclat encore plus ambré et sa main trembla légèrement. Allez, juste une petite beigne dans sa gueule. Il était étudiant en Médicomagie, il saurait réparer ça. Il ne sentirait rien. Il avait l’habitude de s’en prendre de toute manière. Un sourire mauvais se forma sur les lèvres de Sirius et il eut l’impression de revenir quelques années en arrière, lorsque Scott-Rosier venait de le coincer dans un couloir. Mais rapidement alors, une autre image s’imposa à lui. Jared était son cousin, nom d’un bézoard ! Il ne pouvait laisser ça se reproduire. Frustré, il détourna les yeux du visage de Jared et s’efforça d’écouter ce que disait Louve pour les calmer.
« Dans ce genre de cas, je me bats avec lui pour qu'on se défoule, comme des loups. Mais ce n'est pas une solution adéquate pour vous. Jared a un avantage, comme il s'est entraîné avec Bleddyn en novembre. »
Alors quoi ? Elle voulait dire qu’il allait se prendre une sacrée raclée s’il défiait Jared ? Sirius ne demandait qu’à essayer. Et à voir le regard de Jared, celui-ci aussi.
« En l'état des choses, vous avez deux solutions : vous ignorer et continuer de nourrir vos ressentis, ou être honnête, et prendre une décision. Ensemble. »
Sirius fit craquer sa nuque, pensant que la première solution était plutôt pas mal. Mais là encore c’était son ancien lui qui s’exprimait. Nom d’une citrouille ! Concentre-toi, Green. Il ferma les yeux et s’efforça de détendre chacun de ses doigts, écoutant sa respiration. Allez Sirius. Refoule ta colère. Refoule ta colère. Refoule …
« Sauf que je ne vous laisse pas le choix. »
Sirius rouvrit les yeux et dirigea aussitôt son regard sur Louve. Ses yeux ambrés avaient disparu. Son loup semblait s’être apaisé, sans doute parce que Jared n’avait pas ouvert sa grande gueule pendant quelques secondes. Mais le loup était au taquet. Et la façon dont Louve dirigeait les choses le rendait anxieux. Elle agita sa baguette et les racines de l’arbre derrière eux formèrent une chaise et deux tabourets.
« Asseyez-vous. Tous les deux. » dit-elle en indiquant les tabourets.
Il déglutit mais s’installa quand même. Il ne regardait pas Jared car il savait qu’il était encore trop tendu pour faire face à ce crétin. Il préférait se concentrer sur la voix autoritaire mais douce de Louve.
« Jared. Pile ou face ? » dit-elle en sortant un Gallion de sa poche. « Génial … » marmonna Sirius en croisant les bras.
Il détestait le hasard. Il détestait que Jared choisisse. Et il détestait que son choix se porte sur face. C’était ce qu’il aurait choisi. Louve lança la pièce en l’air avant de la retourner sur le dos de sa main.
« Désolée, Sirius, c'est face. Tu vas être le premier à parler. » « Putain … » laissa-t-il échapper alors que son loup voulait japper de mécontentement.
Louve ne s’en offusqua pas, sans doute bien trop habituée à ses sautes d’humeur. Après tout, cela faisait des mois maintenant qu’ils travaillaient ensemble. Elle avait appris à connaître pas mal de facettes de sa personnalité, surtout les pires. Ce n’était donc pas un juron qui allait la déranger.
« Tu vas exposer à Jared toutes les raisons de ta colère. » continua-t-elle. « Ton cousin écoutera, en silence, n'est-ce pas Jared ? Puis il fera la même chose. Et nous trouverons ensemble ce que nous pouvons faire pour que vos contacts ne provoquent pas un meurtre dans les temps à venir. »
Sirius laissa échapper un rire, ses bras toujours croisés contre lui, comme pour se protéger.
« Sérieusement ? » dit-il.
Un seul regard de la princesse lui fit comprendre qu’elle ne plaisantait pas. Il jura une nouvelle fois, en silence cette fois-ci, et détourna le regard pour observer le paysage autour d’eux. Ce n’était que des champs appartenant aux habitants de Druid’s Oak. La pluie qui n’avait eu de cesse de tomber au mois de mars avait rendu l’herbe verte et haute. On n’apercevait presque plus les petits chemins qui traversaient cette campagne, non loin de Londres pourtant. C’était ce paysage que Louve avait choisi pour leurs entraînements et Sirius avait su s’y ressourcer au fur et à mesure.
Il savait qu’il n’allait pas pouvoir échapper à ce que Louve lui demandait. Exprimer les raisons de sa colère. La vaste blague. Jared, écouter en silence ? Cela relèverait du miracle ! Pourtant … Louve Iceni était sa princesse, sa future reine. Il ne ferait jamais rien pour la contrarier. S’il savait bien une chose à propos des Parkinson, c’était le respect que chacun d’entre eux vouaient à la famille royale. Sirius avait lui aussi goûté à ce respect. La manière dont Louve l’avait aidé durant cette année scolaire … il lui en serait à jamais reconnaissant.
Il déglutit et poussa un long soupir, finissant par décroiser ses bras. Il détestait ça. Parler. Exprimer ses émotions. Fallait-il déjà en être capable. Il effleurait à peine cette partie de lui. Alors en plus admettre à voix haute tout ça face au mec qu’il détestait le plus.
Il changea plusieurs fois de position. Louve attendait patiemment qu’il soit prêt. Elle ne le brusquait pas. Quant à Jared, Sirius ne le regardait pas mais il se doutait qu’il n’appréciait pas plus que lui d’être ici tout en gardant le silence par respect pour Louve.
« Je … je ne te détestais pas. Pas au départ. » commença-t-il, maladroit. « Je … Putain, je peux pas ! J’y arrive pas ! »
Il voulut se lever mais n’y parvint pas. C’était comme si la volonté de Louve continuait de s’exercer sur lui. Il n’était pas un loup, juste un demi-loup. Pourtant, à cet instant, c’était plus son loup qui s’exprimait que sa partie humaine. Il n’avait jamais su trouver d’entre-deux à ce qu’il était. Et à présent, le curseur était bien trop tourné vers le loup. Il fallait encore qu’il apprenne à le réguler.
Louve dut le sentir et se leva pour s’approcher de lui. Elle posa une main sur son épaule et lui répéta ces mots, ces mots qu’elle avait déjà employées plusieurs fois à son encontre. Ce n’était rien, pas grand-chose. Mais c’était suffisant pour apaiser le loup de Sirius. La panique qu’il sentait monter en lui n’était rien. Il fallait qu’il l’accepte. Son loup, cet Alpha dominant devait apprendre à se soumettre parfois pour arranger les choses.
Sirius ferma les yeux et prit une grande inspiration. Puis une deuxième. Et une troisième. Jared et ses façons supérieures avaient disparu. Il n’existait plus.
« Depuis qu’ils sont venus au monde, Jared, Alana et Eireann, on m’a appris que c’était mes cousins et qu’il fallait que je les accepte. Ils étaient des loups, ils faisaient parti de la cour d’Irlande, alors fallait les respecter. Alana et Eireann, ce n’était pas aussi compliqué. Elles sont des boules d’énergie et apprécient tout le monde. Mais Jared … toi … tu étais celui qui avait manqué de mourir, celui qu’il fallait protéger. »
Il rouvrit les yeux et tourna la tête vers Jared.
« Mais surtout tu étais un loup. Tu faisais la fierté de ton père. Tu étais le loup qui dirigerais la meute. Ma mère était si envieuse de la famille que vous étiez. Mon père si … »
Sa voix se bloqua et il s’arrêta un instant avant de poursuivre.
« J’enviais ta relation avec ton père. Mon père, tu ne vois que ces bons côtés. Quand vous veniez à la maison ou inversement, vous ne voyez que le père qui couve ma mère du regard ou qui va s’extasier avec Shanna de regarder un film. Avec moi, il n’y avait rien de tout ça. Il n’y a jamais rien eu de tout ça. Mon père, c’est celui qui ne parle quasiment jamais quand je suis là. Mon père, c’est celui qui va s’agacer quand je vais réclamer un peu d’attention de sa part. Mon père, c’est celui qui va préférer fuir la maison sur une intervention plutôt que de passer du temps à m’aider à faire mes devoirs. Alors que, quand je te regarde, toi et ton père … Il parait si fier quand il pose sa main sur ton épaule. Quand il vante tes résultats scolaires à Poudlard ou à l’UMS. Quand il parle durant des mois de ta promotion à la cour irlandaise. »
Ces derniers mots avaient été prononcés avec amertume, comme ce qu’il ressentait alors.
« C’est vraiment là que j’ai commencé à te détester mais parce que je te jalousais. Encore plus quand mon côté loup m’a fait défaut à Poudlard. On s’est soudain mis à me craindre quand on a compris que j’avais du sang de loup. Sauf que je n’étais pas un loup-garou. Je n’étais qu’à moitié. A moitié, toujours. Coincé entre deux. Et toi … Toi tu étais parfait. Toi tu pouvais te transformer et rendre fier notre famille. Ma mère qui adorait être une louve, tes parents qui aimaient cet esprit de meute. A Poudlard, tout était différent. Il fallait cacher ça. Alors … quand les autres ont commencé à t’en faire baver, j’ai rien dit. Parce que ça aurait signifié que nous étions pareils alors que nous ne l’étions pas. Tu étais toi, avec ta meute, la fierté de tes parents. Et j’étais moi, sorcier avec du sang de loup, un bâtard, mais qui avais néanmoins l’espoir d’être accepté parmi les autres. Si j’avais dit quelque chose, si je t’avais défendu, je … »
Plusieurs fois il y avait pensé. Quand Malefoy l’emmenait dans un toilette à l’abri des regards, quand Scott-Rosier revenait dans la salle commune avec du sang de Jared sur ses vêtements. Plusieurs fois, Sirius avait eu envie d’y aller, de les arrêter. Mais, à chaque fois …
« Je me suis montré lâche. Je me suis dit qu’il valait mieux que je me taise et que je ne dise rien. J’ai laissé faire. Quelque part, je me rassurais comme je pouvais. Je me disais que tu avais ce que tu méritais. Que de toute façon, les Iceni seraient là pour te couvrir de Gallions d’or et te faire monter en grade. Que de toute façon, ce n’était qu’un mauvais moment à passer pour toi car après t’aurais un bel avenir. »
Il sentit Jared grincer des dents et leva les yeux vers lui. Mais Jared ne pouvait pas parler. Louve le lui avait interdit. Le cœur de Sirius fit un bond dans sa poitrine mais il ne s’arrêta pas pour autant.
« J’ai appris à te détester, à te haïr. C’était la solution de facilité. Tout comme j’ai appris à me détester. Pour ce que j’avais fait, pour ce que j’avais laissé faire. Pour ce que j’étais aussi. »
Il riva son regard dans le sien, l’air sûr de lui et … à la recherche d’espoir ?
« Tu as toujours su qui tu étais. Tu ne t’es jamais posé de question. Ton avenir était tout tracé. Moi … mon père ne m’a jamais aimé je crois. Je ne sais même pas d’où je viens. Le côté Parkinson est facilement cernable. Mais mon côté Green … je ne connais rien de mes origines, qui je suis. Et pour un demi-loup qui essaie désespérément de cacher son sang impure, c’est difficile de se raccrocher à son côté sorcier quand on ne sait rien. Je cherchais juste une place. Mais que ce soit côté loup, ou côté sorcier, il n’y avait pas de place pour quelqu’un comme moi. Il n’y en a jamais eu. Trop loup pour mon père. Trop humain pour ma mère. »
Le silence retomba doucement. Sirius ferma les yeux alors que la main de Louve lâchait son épaule. Il se sentait vidé, éreinté. Il avait déjà confié une partie de tout ça à Louve. Mais tout lâcher, mettre en évidence sa lâcheté et sa haine de lui-même, il ne l’avait jamais fait face à quelqu’un qu’il détestait.
« Je sais que tu me hais également. Et je doute qu’on puisse un jour s’entendre. Mais … j’apprends à découvrir ce que je suis. Alors … peut-être qu’un jour j’apprendrais à t’apprécier. Ou du moins, à ne plus te détester. »
Il baissa la tête, sachant que les paroles de Jared allaient désormais tomber comme une avalanche d'insultes et de reproches. Il l’aurait mérité, non ? Après tout ce qu’il venait d’admettre, il se sentait ridicule. Pourtant, il venait d’exprimer ce qu’il y avait au plus profond de son être. Jared trouverait cela déplacé, hypocrite ou présomptueux, mais la vérité était là. Sirius ne s’était caché derrière aucune façade, aucun masque. Il venait d’avouer ce qu’il ressentait au plus profond de son être.
Jeudi 6 juin 2002
L’année scolaire était désormais terminée. Sirius devait bien avouer ne pas l’avoir vu passer. Tellement de choses avaient changé au cours de ces derniers mois ! Cette première année à l’UMS lui avait fait découvrir de nouvelles choses : être autonome dans son propre logement, de nouvelles têtes – devenues des amis pour certains, des ennemis pour d’autres, mais surtout l’apprivoisement de ce qu’il était. Comparé à ses excès de colère qu’il avait pu avoir encore à l’automne et cet hiver, Sirius se rendait compte qu’il était désormais plus à même de gérer les moments où l’angoisse et la colère montaient en lui. Il ne parvenait pas tout à fait à mettre le doigt sur ce qui les générait, mais le fait de savoir que son loup n’était pas là pour le condamner mais plutôt pour le protéger l’avait énormément aidé.
Mettre un terme à son amitié avec Ian l’avait aussi aidé. Il lui semblait avoir définitivement tourné le dos au passé de Mangemorts qui l’avait encore une fois tant intrigué. Ces réunions secrètes de la nouvelle génération de Sang-Pur, il ne voulait plus en faire partie. Tout comme il ne voudrait jamais être relié à la cause des Blue Dragons. Cette partie de sa vie était terminée. Jamais plus il ne prendrait part dans un conflit. Et surtout, jamais plus il ne se laisserait influencer. Du moins, c’était la volonté qu’il voulait exprimer. Néanmoins, on ne savait jamais de quoi l’avenir était fait ?
Cette première année lui avait aussi permis de découvrir davantage la musique. Lui qui avait tant douté de son choix de cursus à l’automne se découvrait une vraie passion pour cette discipline. Même si ces cours avec Dae-Hyun avaient été interrompus quelques temps avec son enlèvement, Sirius n’avait pas relâché ses efforts. Il s’était entraîné davantage sur le solfège et sur sa fluidité de mouvements sur une guitare. Il s’efforçait même de chanter davantage. C’était assez facile désormais avec ceux de son année. Mais il n’avait encore jamais poussé la chansonnette devant un public. Ce serait son futur challenge. Il ne désirait pas – ou plus – changer de cursus. Il voulait tenter sa chance en musique. Il voulait chanter, jouer, faire des scènes. Il voulait goûter à cette vie-là et au diable ce que pouvaient en penser ses parents ! Il voulait essayer.
Ce jeudi, il venait d’effectuer sa dernière séance avec Louve. Les progrès qu’il avait faits, comparé au début d’année, étaient très impressionnants. L’été arrivait, demain soir, les cours à l’UMS seraient terminés. Il ne resterait plus que quelques examens pour certains et les portes ouvertes à la fin du mois, et tout le monde partirait profiter de l’été. Sirius ne savait pas encore si la jeune femme voudrait poursuivre ses entraînements avec lui à la rentrée mais il serait toujours temps d’y penser à ce moment-là.
« Tiens, n’oublie pas ça. » dit-il en tendant une boîte restée au sol.
Ils venaient de se relever tous deux. Ils avaient en effet fait le point sur « les devoirs » de Sirius au cours de cet été et leur réunion touchait à leur fin.
Un sourire se forma au coin de ses lèvres lorsqu’il vit la réaction de Louve. C’était un cadeau, le papier était blanc et un nœud rouge refermait le paquet. Il le tendit à nouveau vers la jeune femme.
« Faut-il que je m’incline également pour offrir un cadeau à ma future reine ? »
Leurs regards se croisèrent et le sourire de Sirius disparut. Il posa un genou à terre et inclina alors aussi la tête. Lui qui trouvait autrefois ce fanatisme pour la famille royale démesurée commençait à véritablement respecter les Iceni. Louve avait été d’une aide précieuse et pourtant il n’avait guère été tendre avec elle lors des premières séances. Aussi, s’incliner ici était un témoignage de sa profonde gratitude. Après tout, c’était ce qu’elle était : une future reine. La sienne ? Sirius ne savait pas encore.
Louve lui prit le paquet des mains et commença à tirer sur le gros nœud rouge. Sirius se redressa et la regarda déballer une cape d’un rouge impérial.
« C’est une cape d’invisibilité. » précisa-t-il. « Mais je l’ai aussi agrémenté de quelques petits ajouts. »
Il tendit le doigt pour montrer le dessin de trois runes.
« Fehu, le feu. Celle qui te correspond le mieux et qui symbolise le succès. As, l’arbre, afin de t’aider à écouter les précieux conseils autour de toi quand tu seras reine. Et Bar, le bouleau. Elle aussi te caractérise, car c’est la rune de la maternité. J’ai pu voir à quel point tu étais soucieuse de chacun de tes sujets, de la même façon qu’une mère va couver chacun de ses enfants, sans faire de différence. »
Sirius montrait tour à tour les runes dessinées avec un doux sourire. Il avait été réellement impatient de pouvoir montrer son cadeau.
« J’avais pris l’option runes à Poudlard mais ce n’est pas moi qui les ai dessinés. Je me suis fait aider. Malgré tout, ce sont des runes permanentes. Et j’ai ajouté un élixir de longue vie pour objets. Ta cape devrait résister quelques décennies. Ainsi tu pourras la porter aussi longtemps que tu le voudras. Et avec ces runes, tu seras la reine la plus armée du monde entier. »
Son regard croisa une nouvelle fois celui de Louve avant de l’aider à l’enfiler. Il attacha le lacet autour de son cou, prenant soin de ne pas lui faire mal. Il l’aida aussi à relever ses cheveux roux flamboyants sur sa cape, lui donnant un air impérial.
« Elle ne devient invisible que quand tu mets le capuchon sur ta tête. Autrement, c’est une cape parfaitement normale, mais qui a la résistance pour la plupart des sortilèges. »
Il n’avait sans doute jamais autant parlé, même en présence de Louve. Il devait avouer que ces derniers bavardages résultaient plus d’une nervosité que d’une véritable envie d’informations. Il n’était pas dans sa nature d’offrir des cadeaux à n’importe qui. S’il le faisait pour Louve, c’était parce qu’elle avait sincèrement marqué son esprit et son cœur. Et à défaut de pouvoir l’exprimer clairement, il espérait que le cadeau pourrait transmettre tout ce qu’il ressentait.
Cause you can be the beauty and I could be the monsterAvec Louve et SiriusJeudi 4 Avril 2002
« Assez ! Tous les deux. »
Je déteste ça, je déteste ce qui est en train de se passer, j'ai envie de prendre mes jambes à mon cou, car je sais que ce qui va suivre ne sera pas dans mon intérêt et que je vais passer un très désagréable moment. Mais pour autant, il s'agit de Louve, de ma future reine, de ma princesse actuelle, et bientôt je serai son garde rapproché. Alors je ne peux décemment pas rebrousser chemin ou lui désobéir, j'en suis même incapable en fait. Je lance un regard noir à Sirius, tout ceci est de sa faute. Connard.
« Je sais que vous avez du mal à vous entendre. Je peux comprendre ; je me suis déjà pris la tête avec mon frère. » « Sauf ton respect, Louve, il s’agit plus d’une prise de tête à ce compte-là. » « Oh ferme ta gueule Mich Mich tu sais même pas ce que tu racontes. »
Ça m'arrache les oreilles de l'entendre la tutoyer, l'appeler « Louve » comme si c'était son amie proche et de raconter de la merde, comme si c'était lui la victime, comme s'il savait mieux que tout le monde. Je le regarde, son sourire mauvais sur les lèvres, le même qu'il y a quelques années à Poudlard, le même qu'il portait à chaque attaque de Scott-Rosier où il n'est même pas intervenu une seule fois. Pas une seule où il a agit pour me venir en aide, même après, quand j'étais en sang sur la pierre froide de la salle commune, il tournait les talons et avait ce même rictus mauvais sur les lèvres. Mes sourcils se froncent tellement je le juge en cet instant, tellement je suis déçu et blessé de le voir encore agir de la sorte des années après. Et je ne sais pas si c'est l'expression de ma surprise poignante qui le fait baisser des yeux, mais il fuit mon regard. Mais moi je ne le quitte pas des yeux, intrigué par cette attitude.
« Dans ce genre de cas, je me bats avec lui pour qu'on se défoule, comme des loups. Mais ce n'est pas une solution adéquate pour vous. Jared a un avantage, comme il s'est entraîné avec Bleddyn en novembre. »
C'est à mon tour de sourire, parce que oui, en l'état actuel des choses, si je devais me battre avec Sirius, je le laisserai en lambeau dans l'herbe haute et pas tondue, son corps disparaîtrait à la vue de tous. Mais je sais que je me ferai défoncer à la maison par ma tante et mon père.
« En l'état des choses, vous avez deux solutions : vous ignorer et continuer de nourrir vos ressentis, ou être honnête, et prendre une décision. Ensemble. »
L'option un me va plutôt bien, qu'est-ce que j'en ai particulièrement à foutre de lui ? Même si on partage le même sang, je n'ai aucun lien avec lui, aucune amitié, aucun attachement. Je ne serai même pas triste s'il venait à crever la bouche ouverte. Même si je l'ai aidé lors de l'attentat, c'était juste mon âme de sauveur, et par loyauté à la famille. Il m'a bien laissé agonisant un nombre incalculable de fois lui dans les couloirs du Poudlard, qu'est-ce qui serait différent aujourd'hui ? Il n'a pas changé. La seule différence avec ce Scott-Rosier, c'est que Sirius n'a pas eu le temps de porter la « Marque ».
« Sauf que je ne vous laisse pas le choix. »
Mon regard fuse sur Louve. Hein ? Quoi ?! Non... Putain de merde mais non ! J'ai pas envie de mettre les choses à plat avec lui, j'ai pas envie de m'exprimer sur mon passé devant Louve. Elle ne sait pas tout, elle a compris des choses, elle a déduit des choses, mais elle ne sait pas tout, et certainement pas le nom de mes bourreaux. Sirius regarde Louve de manière « apaisé », c'est assez étrange à voir, lui qui donne toujours à voir d'être en colère en permanence.
« Asseyez-vous. Tous les deux. »
Je regarde les deux tabourets qu'elle vient de métamorphoser avec des racines. Je n'ai pas envie de m’asseoir. Je vois que Sirius obtempère plus vite que moi. Je marque un temps d'arrêt, mais d'un simple regard vers Louve, je comprends que je n'ai plus le choix.
« Jared. Pile ou face ? »
Bordel de Dagda ! J'y crois pas, un jeu de hasard pour bien commencer. Mais c'est sans compter voir la gueule de Sirius et son air dégoutté. Le seul avantage, c'est que je choisisse en premier. J'articule clairement.
« Pile. » « Désolée, Sirius, c'est face. Tu vas être le premier à parler. » « Putain … »
Je réprime un sourire narquois. Parce qu'au fond, je ne sais pas à quoi m'attendre, et je n'ai pas envie de l'entendre. Même si ça fait chier Sirius, ça me fait encore plus chier. A dire vrai, j'ai même peur. Mais je suis contente de ne pas avoir à commencer le premier.
« Tu vas exposer à Jared toutes les raisons de ta colère. »
Ok, là je me sens très très mal à l'aise. Je ne suis pas prêt, vraiment pas prêt.
« Ton cousin écoutera, en silence, n'est-ce pas Jared ? Puis il fera la même chose. Et nous trouverons ensemble ce que nous pouvons faire pour que vos contacts ne provoquent pas un meurtre dans les temps à venir. »
Je ferme mes yeux, cette situation est tellement inconfortable pour moi que je suis au bord du malaise. Mon cœur bat très vite, mes mains sont moites, je déteste parler, je déteste me confier, allez demander à mes sœurs, à Emy... Quand on fait des soirées à la maison, je me fais tellement oublier à ne pas échanger et interagir avec elles quand y'a des discussions passionnées, qu'elles parlent librement de tout devant moi, je deviens un meuble, parce moi je sais pas faire ou quoi dire. Je sais pas me confier. Sirius laisse échapper un rire, il n'y croit toujours pas, et moi aussi d'ailleurs.
« Sérieusement ? » dit-il.
J'ouvre les yeux et vois Sirius les bras croisés. J'ai espoir d'entendre Louve dire que c'est une blague. Mais quand je la regarde, je sais qu'elle est sérieuse et ne nous lâchera pas. Sirius hésite un moment puis tente de se lancer. Je le regarde faire.
« Je … je ne te détestais pas. Pas au départ. »
Mon cœur commence à battre encore plus vite et plus fort. Je ne peux plus le regarder, je détourne mon regard.
« Je … Putain, je peux pas ! J’y arrive pas ! »
Je prie pour que Louve décide d'en finir avec cette expérience, mais elle ne dit rien. Un bruit assourdissant vient jusque dans mes oreilles et me brouille l'esprit. Je ne veux pas entendre la suite, pourtant je reste assis là, à attendre lentement mon sort. Ça me ramène des années en arrière, où je subissais sans rien faire, sans bouger. Aujourd'hui est un autre de ces jours, où je vais encaisser et me relever encore plus affaibli et meurtrie.
« Depuis qu’ils sont venus au monde, Jared, Alana et Eireann, on m’a appris que c’était mes cousins et qu’il fallait que je les accepte. Ils étaient des loups, ils faisaient parti de la cour d’Irlande, alors fallait les respecter. Alana et Eireann, ce n’était pas aussi compliqué. Elles sont des boules d’énergie et apprécient tout le monde. Mais Jared … toi … tu étais celui qui avait manqué de mourir, celui qu’il fallait protéger. »
Je sais qu'il me regarde, mais moi je ne peux pas encore affronter son regard. Je serre mes poings. « Celui qu'il fallait protéger ». Et il ne l'a pourtant jamais fait.
« Mais surtout tu étais un loup. Tu faisais la fierté de ton père. Tu étais le loup qui dirigerais la meute. Ma mère était si envieuse de la famille que vous étiez. Mon père si … »
Sa voix se bloque et il s’arrête de parler. Mon père fier de moi ? Mais pas du tout, au contraire, il m'a toujours comparé à lui à chacun de mes âges, et je n'ai pas « assez » comme lui.
« J’enviais ta relation avec ton père. Mon père, tu ne vois que ces bons côtés. Quand vous veniez à la maison ou inversement, vous ne voyez que le père qui couve ma mère du regard ou qui va s’extasier avec Shanna de regarder un film. Avec moi, il n’y avait rien de tout ça. Il n’y a jamais rien eu de tout ça. Mon père, c’est celui qui ne parle quasiment jamais quand je suis là. Mon père, c’est celui qui va s’agacer quand je vais réclamer un peu d’attention de sa part. Mon père, c’est celui qui va préférer fuir la maison sur une intervention plutôt que de passer du temps à m’aider à faire mes devoirs. Alors que, quand je te regarde, toi et ton père … Il parait si fier quand il pose sa main sur ton épaule. Quand il vante tes résultats scolaires à Poudlard ou à l’UMS. Quand il parle durant des mois de ta promotion à la cour irlandaise. »
Je me laisse aller à le regarder, je sens une tension en moi et j'ai envie de hurler, du crier que tout cela est faux, complètement erroné. Mon père se pavane devant la cour d'Irlande et aux yeux des autres, mais dans l'ombre, je ne suis pas un fils suffisamment bon, et je dois en faire plus. Mon père a été brillant très vite, il a toujours assumé son côté loup, il a toujours été un « guerrier », doué pour la magie sans baguette, un charmeur, il a gagné le cœur de ma mère qui était pourtant dans un autre état d'esprit lors de leur rencontre. C'était une femme forte, qui n'avait pas besoin d'un homme qui fanfaronne et se montre fier, et pourtant, ils ont finit ensemble. Et moi... moi je suis né avec des artifices, j'ai failli mourir des mes premiers instant. Faible, voué à rester faible. Il aurait voulu que je sois un loup robuste dès ma première respiration, mais j'ai été un échec. Mais dans tout ce qu'imagine Sirius, ce n'est pas le plus intriguant, tout ce qu'il raconte sur son père, je ne le savais pas. Je pensais que tout se passer bien pour lui. Comme quoi, nos deux familles sont un peu fausse en public.
« C’est vraiment là que j’ai commencé à te détester mais parce que je te jalousais. Encore plus quand mon côté loup m’a fait défaut à Poudlard. On s’est soudain mis à me craindre quand on a compris que j’avais du sang de loup. Sauf que je n’étais pas un loup-garou. Je n’étais qu’à moitié. A moitié, toujours. Coincé entre deux. Et toi … Toi tu étais parfait. Toi tu pouvais te transformer et rendre fier notre famille. Ma mère qui adorait être une louve, tes parents qui aimaient cet esprit de meute. A Poudlard, tout était différent. Il fallait cacher ça. Alors … quand les autres ont commencé à t’en faire baver, j’ai rien dit. Parce que ça aurait signifié que nous étions pareils alors que nous ne l’étions pas. Tu étais toi, avec ta meute, la fierté de tes parents. Et j’étais moi, sorcier avec du sang de loup, un bâtard, mais qui avais néanmoins l’espoir d’être accepté parmi les autres. Si j’avais dit quelque chose, si je t’avais défendu, je … »
Mon cœur bat toujours vite, mais de manière régulière maintenant, comme si j'étais en train de faire un effort constant. J'ai la gorge si serrée que je ne pourrai même pas avaler la fumée d'un joint ou une gorgée d'alcool. D'ailleurs c'est ce dont j'ai besoin là tout de suite, de me mettre minable, de boire et fumer, d'oublier toute cette situation bien trop dérangeante. Je déteste ce moment, c'est un supplice, une torture d'entendre mon cousin se confier, d'autant plus que je sais combien ça doit être dur pour lui aussi. Ni lui ni moi avons envie de cela. Mais Louve pense qu'on en a besoin...
« Je me suis montré lâche. Je me suis dit qu’il valait mieux que je me taise et que je ne dise rien. J’ai laissé faire. Quelque part, je me rassurais comme je pouvais. Je me disais que tu avais ce que tu méritais. Que de toute façon, les Iceni seraient là pour te couvrir de Gallions d’or et te faire monter en grade. Que de toute façon, ce n’était qu’un mauvais moment à passer pour toi car après t’aurais un bel avenir. »
J'enfonce mes ongles dans la pomme de ma main et serre ma mâchoire si fort que mes dents grincent. Ça devient de plus en plus difficile de ne pas intervenir, de ne pas parler. Sirius me regarde alors, j'ai une rage sourde en moi, de la lave dans mes veines. Comment a-t-il pu penser que j'aurai un bel avenir après tout ça ? Alors que j'étais un loup-garou torturé. Ils auraient pu me tuer, sous l'ère des Carrow, j'aurai pu mourir que personne n'aurait rien fait, car ça aurait été dans le « règlement » de l'école. Et au fond, c'est sans doute ce que j'attendais, qu'on abrège mes souffrances. Comme je n'avais pas réussi moi même...
« J’ai appris à te détester, à te haïr. C’était la solution de facilité. Tout comme j’ai appris à me détester. Pour ce que j’avais fait, pour ce que j’avais laissé faire. Pour ce que j’étais aussi. »
Mon visage se détend devant cette confidence. Sirius me regarde droit dans les yeux. Alors il regrette ? Il se sent coupable ? C'est vrai ça ? J'ai toujours cru qu'il en avait toujours rien eu à foutre de moi, de tout ce qu'il n'avait pas fait, de tout ce qu'on m'avait fait. J'apprends qu'il se déteste pour ça. Je ne sais pas comment réagir à cela, c'est un élément nouveau dans la conscience de mes traumatismes. Sirius était « ma famille » à Poudlard, on aurait du se protéger mutuellement, il n'en a eu que faire. Sauf que j'apprends que finalement si... ça l'a aussi marqué.
« Tu as toujours su qui tu étais. Tu ne t’es jamais posé de question. Ton avenir était tout tracé. Moi … mon père ne m’a jamais aimé je crois. Je ne sais même pas d’où je viens. Le côté Parkinson est facilement cernable. Mais mon côté Green … je ne connais rien de mes origines, qui je suis. Et pour un demi-loup qui essaie désespérément de cacher son sang impure, c’est difficile de se raccrocher à son côté sorcier quand on ne sait rien. Je cherchais juste une place. Mais que ce soit côté loup, ou côté sorcier, il n’y avait pas de place pour quelqu’un comme moi. Il n’y en a jamais eu. Trop loup pour mon père. Trop humain pour ma mère. »
Mais comment il arrive à dire tout ça putain ? Comment il fait pour se confier aussi facilement. Juste un instant, j'ai l'impression qu'il se fout de ma gueule et qu'on nous espionne pour voir ma réaction et se foutre de ma gueule d'avoir cru de si belles paroles. Alors je regarde autour de moi, et mon regard croise celui de Louve, et je sais que ça peut pas être une putain de blague. Tout ce délire est réel. Sirius est sérieux, et le pire c'est que tout m'est adressé, comme des excuses, comme des confidences, comme... une confession.
Est-ce que ça arrive trop tard ? Où est-ce que c'est le bon moment ? Je n'en sais rien. Un silence de plomb s'abat sur nous, il est si lourd que je me sens étourdi un instant. Qu'est-ce qu'il faut que je réponde à ça putain ? Je suis finalement bien content de ne pas avoir le droit de parler, juste d'écouter. Pourtant Sirius reprend et j'ai envie de lui dire de fermer sa gueule, que je ne peux pas en supporter plus, même pour lui. Je vois qu'il est épuisé par cet exercice, je vois qu'il n'est pas à sa place en disant tout cela, et j'imagine le courage qu'il lui a fallu pour tout me dire. Mais je n'arrête pas de penser que du courage, il aurait du en avoir à Poudlard aussi...
« Je sais que tu me hais également. Et je doute qu’on puisse un jour s’entendre. Mais … j’apprends à découvrir ce que je suis. Alors … peut-être qu’un jour j’apprendrais à t’apprécier. Ou du moins, à ne plus te détester. »
Ma poitrine se baisse et se soulève toujours aussi rapidement, j'ai l'impression de courir un marathon. J'ai connu bien des moments malaisant, mais celui là est dans mon top 5 à présent. Je sens le regard de Louve peser sur moi, elle m'invite à parler à présent. Mais ma bouche est si pâteuse et sèche que je ne sais même pas si je pourrai articuler. Je ne dis rien pendant au moins cinq bonnes minutes, au point où je suis sûre qu'ils se disent que je ne dirai rien du tout. Je me sens tétanisé, pour autant, je repense à tout ce qu'il vient de me dire. N'est-ce pas l'occasion pour éclaircir des choses avec lui ? Il n'y aura pas de pareil moment à l'avenir.
« Tout ce que tu dis, c'est que des conneries, j'ai jamais entendu autant de conneries de la part de quelqu'un. »
J'aperçois le regard de Louve et même si elle est maître dans la gestion de ses émotions et ses mimiques, je décèle de la surprise. Mais c'est le regard de Sirius qui me fait comprendre que ce que je viens de dire peut être mal interprété. J'aperçois de la déception au fond de ses pupilles. Je ne voulais pas dire que tout ce qu'il me raconte est mensonge, mais que ce qu'il pense par exemple par rapport à ma famille est faux.
« Ma relation avec mon père n'est pas aussi belle que tu l'imagines. Rien de ce que je fais n'est assez bien pour lui. Je ne le rends pas assez fier, je le déçois souvent. Je n'ai pas pris le même chemin que lui pour les études, ni les mêmes ambitions, à savoir rentrer dans la cour. Il joue au fier devant au Palais oui, pour donner le change, mais je ne suis pas à la hauteur du loup qu'il voudrait que je sois. Il voudrait que je lui ressemble plus, mais je n'en ai aucune envie. C'est des conneries aussi de croire que je sais qui je suis et que j'aurai un bel avenir en Irlande. »
Les veines de mes mains ressortent tellement je serre et desserre les poings. J'ai même du sang sous les ongles tellement je les plantes dans ma chair.
« Je n'ai jamais voulu quitter l'Irlande. Mon père m'a forcé à venir à Poudlard, pour me sociabiliser. Chaque jour que Dana fait, je le déteste pour ça, il est responsable en partie de tout ce qui m'est arrivé, si je n'avais pas quitter l'Irlande, je n'aurai pas vécu la haine à Poudlard. Je ne t'aurai pas vu m'abandonner, t'étais le seul que je connaissais, le seul sur qui je pouvais compter, mes sœurs n'étant pas chez les Serpentard. Et t'as rien fait toutes ces années. Je n'aurai pas été aussi d... »
… détruit. Mais le mot reste au fond de ma gorge.
« J'ai espéré un sacré nombre de fois que tu interviennes, pas seulement toi, d'autres. T'es pas le seul responsable, beaucoup ont vu, ont su et n'ont rien fait. Moi le premier JE n'ai rien fais pour que ça s'arrête. Je n'ai interpelé personne, même si Rogue se doutait. Je n'ai pas été le loup fort et fier de mon père, j'étais exactement celui qu'il s'imagine, trop faible. Tu l'as dit... celui qui a failli mourir et qu'il faut protéger. Mais personne ne l'a jamais fait. Et puis, j'ai arrêté d'attendre de l'aide ou du soutien, petit à petit, jour après jour, mois après mois, années après années, coups après coups, je n'ai plus eu une seule once d'espoir. Plus jamais. »
Je ne sais pas s'ils peuvent comprendre que je parle en général. Je n'ai plus d'espoir pour la vie, pour avoir une belle vie, sereine et heureuse. Je n'ai plus d'espoir qu'on me vienne en aide. Je n'ai confiance en personne, jamais personne n'a été capable de m'aider. Pas avant les Iceni, mais j'attends toujours qu'ils me lâchent, qu'ils me laissent tomber, qu'ils fassent comme tout le monde, qu'ils détournent leur regard et me laisse dans le néant de ma vie. Je suis anesthésié, paralysé depuis tellement d'année, même l'alcool et l'aconit tue loup en fumette ne me font pas me sentir un peu mieux. C'est juste un cercle vicieux. Une spirale infernale de souffrance physique et psychique.
« Je suis devenu un putain de doué en Médicomagie, j'ai du me débrouiller tout seul, parce que des fois, j'étais tellement à terre que je ne pouvais même pas ramper jusqu'à Madame Pomfresh, j'ai testé plein de truc sur moi pour me soigner, j'ai beaucoup appris et progressé. Mais même ça, c'était pas assez pour mon père. La Médicomagie, c'est pas un truc de loup, pas un truc de Duc, c'est pas assez soldat, pas assez guerrier. Ni même les potions. Comment je pourrai aider l'Irlande en soignant des bobos ? Même avec ma marraine Élisabeth qui essayait de le convaincre. Non, rien n'est assez bien pour le Duc Parkinson. J'ai pourtant appris beaucoup sur les loups et les créatures magiques, j'ai appris vite et seul. C'est ce que j'ai toujours été... »
Seul.
C'est comment je me sens depuis tellement d'année, depuis toujours en fait, même si les gens seraient choqués, car je forme un trio fusionnel avec mes sœurs. Depuis ma naissance j'ai des jumelles, et on a grandit ensemble in-utéro déjà. Ça parait inimaginable que je puisse me sentir ainsi, mais c'est le cas.
« Quoi qu'il en soit, j'ai aussi pensé des conneries sur toi, je pensais que tu avais une meilleure relation avec oncle Seth , mais je me suis trompé. Saiorse donne pas à croire qu'il y a un problème entre vous, elle ne s'est jamais confiée devant moi en tout cas. Elle n'a d'ailleurs pas à envier notre famille, ou surtout moi, moi je suis une cause perdue, parles-en à mon père, tu seras content d'apprendre quel genre de looser t'as pour cousin. Je... être un demi-loup aurait été une option plus favorable pour moi, mon père n'aurait rien attendu de moi, il ne m'aurait jamais envoyé à Poudlard et je n'aurai pas eu à faire ce qu'on fait ici maintenant. Et d'ailleurs, si vous me le permettez votre Altesse, je souhaiterai retourner en cours.»
Je me tourne vers Louve, légèrement courbé devant elle pour le respect. Ce n'est pas vrai, je n'ai pas cours avant une bonne heure mais ce moment devient insoutenable et éprouvant. Je déteste parler, je me sens encore plus faible, encore plus minable et les idées noires deviennent envahissantes et incontrôlables.
C'est avec soulagement que Louve accepte de lever son ordre et de me laisser partir. Je la salut respectueusement, lance un regard à mon cousin et je disparais aussi vite que je suis apparu. Comme il me reste du temps, je transplane dans une petite ruelle où je sais que je peux trouver de quoi fumer. Je sais que j'avais fait beaucoup d'effort, que j'avais drastiquement diminué voir arrêté depuis mes entraînements avec Bleddyn, mais là, j'en ai trop besoin. Le stress de cet échange a eu raison de mes bonnes volontés et il faut faire taire les idées morbides qui me traversent l'esprit avant que je reprenne les cours de l'après midi.
Vendredi 17 Mai 2002
Ça fait un peu plus de 15 jours que je suis en Irlande, séjournant au Palais, d'abord avec Emy et Clary, ensuite seulement avec Clary et à présent tout seul. Je suis sous surveillance et je vois le psychomage tous les jours. J'ai tous les deux jours une prise de sang et un bilan complet pour voir mon état physique général. Je n'ai plus de traces d'aconit-tue loup où tout autre ingrédient du poison que j'avais réalisé. Je pourrai reprendre ou plutôt vraiment commencer les entraînements avec Diabhal dès la semaine prochaine.
Je rentre en Angleterre lundi 20 mai pour reprendre les cours. Clarissa est partie dans sa famille, elle me manque, on dirait un toxicomane, j'ai des tremblements et des sensations douloureuses de son absence, je lutte de toutes mes forces pour ne pas foncer la voir. J'ai besoin d'elle, plus que tout. Elle fait partie de mes gardes fou, notamment avec Bleddyn, Emy, Louve, mes sœurs... et j'angoisse qu'ils aient cette responsabilité. Évidemment je ne le lui ai pas dit, ni à Aslinn. Mais pour le moment, ils sont le seul lien qui me garde ici vivant. Avant cela, je n'avais jamais attendu rien de personne, j'ai toujours voulu être libre de mes choix, de ma vie, ne vouloir dépendre de personne, faire tout tout seul, sans jamais attendre d'aide. Maintenant, tous autant qu'ils sont, ils m'ont « imposé » leur soutien, leur aide, et à ce jour, je suis totalement dépendant d'eux, de leur présence, encore plus de celle de Clary avec qui je suis lié. Et tant que je serai « lié » avec elle, je ne pourrai pas... je ne peux plus... enfin, il faut que je prenne soin de moi pour prendre soin d'elle, autant que possible.
Avant de retourner en Angleterre, j'ai une permission de 3 jours chez « moi », chez mes parents plus précisément. Je n'ai voulu contrarier personne, alors j'ai accepté de revenir le vendredi et le samedi et j'ai demandé à revenir le samedi soir et dimanche dans mon appartement à Druik Oak, Emily s'est portée « garante » de ma surveillance pour la partie « Londres ». Là encore je ne dis rien, en fait, je me laisse porter et « guider ». Je sais que plus je vais lutter plus mon cadre sera restreint, alors j'acquiesce quand c'est assez supportable, quand ça devient intolérable, comme passer 3 jours avec mon père, je m'y oppose. Je choisi mes combats. Passer la nuit avec Emily n'est en rien un poids, on l'a fait un nombre incalculable de fois. Mon seul soucis, c'est de ne pas pouvoir voir Clary. J'ai peur que ses parents lui interdisent de me fréquenter. J'ai plus peur de ça que de mourir.
Je suis actuellement dans ma chambre chez mes parents, debout en plein milieu, après qu'Alana ait ouvert la porte pour nous faire rentrer. Je suis figé bien que mes mains tremblent. Ma chambre est impeccablement rangée. J'avais mis de l'ordre partout, pensant ne jamais revenir ici. Eireann vient alors effleurer ma mains droite.
« Tu trembles, c'est encore l'aconit ? » « Non tout va bien, c'est... » je soulève mes mains qui tressautent sans que je ne puisse le maîtriser même avec de la volonté. « C'est Clarissa. » Je renifle et viens mettre les mains dans mes poches pour que mes sœurs arrêtent de s'inquiéter.
« Tu penses que tu vas trouver une solution ? Est-ce que c'est dur pour elle aussi ? »
Mon cœur se serre et je ressens un vertige profond. Que ma sœur pose la question est douloureux, parce que je connais la réponse. Oui, c'est aussi difficile pour elle que pour moi, car nous sommes liés tous les deux encore. Je hoche simplement la tête pour dire "oui".
« Moi j'aimerai que tu ne trouves jamais de solution. »
Alana et moi tournons la tête vers notre sœur Eireann.
« Quoi ?! On a dit qu'on se disait tout maintenant. Et je vais être honnête, le fait que tu sois lié à elle, ça me rassure à moi, car je sais que tu n'essayeras pas de te faire du mal encore. Tu l'aimes trop pour ça... pour lui faire du mal à elle.» « Eireann... on en a déjà parlé, mais ce n'est pas possible, il faut qu'on brise ce lien, ce n'est pas une vie pour elle et c'est bien trop dangereux. » « Dangereux pour quoi ? Parce que tu vas recommencer ? »
Mes épaules s'affaissent, je comprends son angoisse, je comprends sa colère et toutes ses questions, je comprends sa peur, et je ne peux pas l'engueuler ou la raisonner, elle a le droit d'être en colère contre moi et de ne plus me faire confiance. Il va falloir que je retrouve la confiance de tout le monde maintenant, je dois assumer mon acte, bien que c'est tout ce que je ne voulais pas, et j'étais bien sûr de ne pas revenir et de ne pas subir tout ça. Mais voilà, je suis vivant, et je dois faire avec à présent.
« Je sais que tu mettras du temps à me refaire confiance, mais ce lien, on ne le connait pas, on ne sait pas jusqu'où ça peut aller, à quel point on est dépendant l'un de l'autre. Et puis je vais reprendre les entraînements pour devenir garde royal, je vais prendre des coups, et Clarissa va les ressentir, au début on va aménager les leçons, pour éviter cela, mais je vais devoir trouver à rompre ce lien, si je veux vraiment passer aux choses sérieuses et finir la formation.»
Je ne peux évidemment pas parler de Diabhal, mais je peux pas passer mes leçons à éviter les coups et faire que du technique et du cardio. Il va falloir que j'apprenne à me battre.
« Viens là bébé.»
Je sors les mains de mes poches et j'ouvre mes bras vers elle. Il ne faut qu'une seconde pour qu'Eireann s'engouffre contre mon torse et me serre. C'est tellement rare que je le fasse pour qu'elle loupe une occasion. Je viens caresser doucement ses cheveux.
« Je suis là maintenant Ok ? » « OK »
J'écarte un bras et Alana comprends immédiatement que c'est une place pour elle dans ce « câlin ». On se serre tous les trois jusqu'à ce que la voix de mon père retentisse en bas des marches. Je me tends immédiatement et tous mes muscles se raidissent. Les filles le sentent et me relâchent.
« La famille est là, on va passer à table. »
Mes parents ont organisé un repas pour mon « retour », avec toute la famille. Je ne m'y suis pas opposé, ma tante, ma marraine, tout le monde a été inquiet pour moi. Évidemment je n'ai pas envie de les voir, ni de sentir leur regard de pitié et d'inquiétude, mais je sais que ça leur fait du bien, ainsi qu'à mes sœurs qui vont revoir leur cousins et cousines. Ils ont besoin de se soutenir dans cette épreuve que je leur ai tous infligé. J'en ai parlé longuement avec le psy. J'accepte de faire un pas vers eux, de choisir lequel faire. Et un repas ne va pas me... tuer.
On descend avec les filles et je salut tout le monde, je vois qu'en fait ils font des efforts pour ne pas avoir l'air d'en faire tout une histoire, en fait, on dirait qu'il ne s'est rien passé, et je me sens un peu soulagé de ne pas avoir à affronter des questions, des pleurs. Est-ce que quelqu'un leur a parlé, pour leur dire comment agir ? Je n'en sais rien, mais ça me va très bien. Mon regard croise celui de Sirius, c'est le seul qui ne baisse pas les yeux au bout de quelques secondes. On se fixe et j'ai l'impression qu'on se comprend. On ne s'était pas vraiment revu depuis notre échange forcé avec Louve dans le parc de l'UMS.
Le repas se passe étrangement bien, il faut dire que je ne suis pas vraiment présent. Je suis là physiquement, mais mon esprit est ailleurs. Je n'écoute pas les banalités qu'ils se racontent, je réponds à certaines questions innocentes qu'on me pose mais ça s'arrête là. Pour une fois mon père n'est pas un vrai connard avec moi, et personne ne s'attend à ce que je change de comportement.
Ils décident tous de finir la soirée dans le salon autour de truc à boire plus fort, mais j'ai pas envie de « traîner » avec eux comme si c'était un soir de pleine lune. Je suis super gêné de savoir pourquoi ce rassemblement familial a été organisé. Là je reconnais ma limite, j'en ai fait des listes avec le psy.
« Est-ce que je peux sortir marcher avec Sirius ? »
Toutes les têtes se tournent vers moi simultanément, comme si tout le monde était en train de me surveiller discrètement du coin de l’œil et qu'ils n'attendaient que ça, me regarder en face. Je vois que Sirius est surpris.
« Enfin, si t'es d'accord Sirius ? »
Mon père regarde ma tante, ma tante regarde ma mère, et finalement cette dernière nous autorise. Je regarde alors Sirius qui accepte de venir. Alors que je vais dans le hall pour récupérer des chaussures, j'entends ma mère dire à mon cousin de ne pas me quitter des yeux. Je sais très bien pourquoi, ils ont tous peur que je profite d'une seconde sans "nounou" pour essayer de me tuer à nouveau.
Sirius et moi sortons, nous restons silencieux un moment, nos pas se dirigent naturellement vers l'ancienne cabane où nous avions trouvé un Epouvantard la dernière fois. Sans se parler, nous sommes allés dans la même direction. Je pousse la porte le premier et m'assure que la pièce où on avait vu l'Epouvantard est bien fermée. Je fais signe à Sirius et on commence à regarde le reste de la cabane. On se fait un coin en poussant les objets qui encombrent la circulation.
« Est-ce que tu l'as pris avec toi ?»
Je n'ai pas besoin d'en dire plus pour qu'il comprenne. Je parle de l'aconit tue loup que je lui avais envoyé avant ma tentative de suicide. Il sort le pochon et le brandit devant nous. Je souris alors et me laisse tomber sur un vieux sofa poussiéreux.
« Oh putain génial, t'assure. J'en pouvais plus de ce repas ! »
Sirius prépare le joint, pendant que je regarde le plafond. Je sais que je ne devrai pas en prendre, j'ai eu d'énormes doses dans le sang il y a encore 15 jours, mais j'ai beaucoup de chose à gérer pour résister à la tentation, surtout après un tel repas et effort de sociabilisation. J'étais si bien au Palais. Sirius allume la cigarette de fortune et me la passe après avoir tiré dessus le premier.
Je regarde un instant le joint, et je viens quand même tirer une grosse latte en fermant les yeux de plaisir. Pourtant je réalise que c'est plus tellement aussi bon que dans mon imagination, c'est assez fade. Le plaisir, le vrai, j'y ai goûté, et ce n'est pas avec cette drogue là, c'est plutôt quand ma bouche embrasse celle de Clarissa. Mon ventre se noue alors instinctivement et je pense à elle. PUTAIN de merde !! Tout ce que je fais, elle peut le ressentir ! Je sursaute et rend le joint à Sirius. Il faut que j'arrête de déconner putain.
« Vas-y finit le, je peux pas vraiment en prendre dans mon état et aussi parce que je suis lié à elle. »
On reste encore cinq minutes silencieux et puis je me lance en pensant à ma séance d'hier avec Aslinn. « Choisi tes combats Jared » m'a-t-il. « Pour guérir, il faut souffrir. Pour aimer, il faut s'ouvrir. Pour avoir la paix, il faut faire face au chaos. La vie est souvent destinée à nous apporter un équilibre, la lumière suit toujours. »
« Merci de m'avoir accompagné, t'était pas obligé. C'est mon premier moment de vrai liberté depuis que j'ai essayé de me suicider. »
J'ai la sensation qu'il ne faut pas que je mâche mes mots avec Sirius, c'est pas un gosse et je sais qu'il peut entendre tout ce que j'ai à dire.
« J'ai toujours quelqu'un qui me surveille 24h sur 24, j'ai même entendu mes sœurs planifier ma « garde » avec ma copine et ma meilleure amie. Au Palais, j'ai l'illusion d'être seul, mais je sais qu'il y a des personnes qui me guettent en permanence, mais eux sont plus discret qu'Eireann et Alana.»
Je lâche un rire fébrile.
« C'est l'enfer mec, j'ai voulu mourir pour connaître la paix, et au final, je suis revenu pour qu'on me colle encore plus au cul, tout ce que j'adore t'imagine... »
Je croise son regard, et j'ai l'impression qu'il ne sait pas s'il doit rire ou rester sérieux, alors je lâche un nouveau rire, c'est nerveux. C'est la première fois depuis des semaines que je plaisante autant sur ça. Finalement je pars dans un rire incontrôlable, comme la dernière fois en janvier avec lui, presque au même endroit. Je finis par me calmer et reprendre ma respiration.
« Tu sais que je lui ai défoncé la gueule ? A mon père ! Je sais pas si tante Saoirse en a parlé chez vous. Mais je lui ai tout balancé, tout ce que j'avais sur le cœur, toute ma haine, ça m'a fait du bien sur le moment, mais... je sais pas si ça a changé quelque chose. Et toi, comment ça se passe avec ton paternel ?»
Cause you can be the beauty and I could be the monsterAvec Sirius Green ♕ Jeudi 4 avril 2002 ♕
Quand je vois la manière dont les deux cousins se parlent, je sais qu'il faut que j'intervienne. Enfin, non, il ne le faut pas, mais je le veux. Il y a une vieille rancune tenance entre les deux, sans même les connaître, je la sens entre les deux. Alors, je les force à s'asseoir, et je laisse le hasard choisir entre les deux qui parlera le premier. La pièce désigne Sirius, qui ne semble pas content. « Sérieusement ? » Je lui jette un regard sévère. Oui, je suis très sérieuse. Je ne leur laisse pas le choix, alors que les deux sont réunis et avec une figure neutre. Je ne le quitte pas des yeux alors que lui détourne le regard, le temps d'admirer le paysage.
Je sentais bien que le jeune homme était mal à l'aise. Il restait silencieux, à changer plusieurs fois de positions. Cherchait-il ses mots, ou bien le courage de se lancer ? Je restais silencieuse, lui laissant le temps dont il avait besoin. « Je … je ne te détestais pas. Pas au départ. Je … Putain, je peux pas ! J’y arrive pas ! » Je pouvais sentir sa détresse La même qu'au départ, quand il ne savait pas vivre avec son côté lupin. Pourtant, il commençait, petit à petit. Comme quoi, tout n'était pas impossible. Je me levais de mon siège et je m'approchais de lui. Posant une main sur son épaule, je chuchotais à son oreille, suffisamment bas pour que lui seul entende : « Tu peux y arriver. Tu pensais ne pas y arriver avec ton côté loup, et pourtant, tu l'écoutes plus. Tout est possible. Tu en es capable. » Mon ton était rassurant, maternel, à la fois pour Sirius mais également pour son loup. Dans ma voix, je mis également un léger ronronnement de mon propre loup, pour lui demander de se calmer. D'arrêter de grogner intérieurement. De me faire confiance, et de faire suffisamment confiance en Sirius pour le laisser gérer seul.
Le loup de Sirius dût le sentir, et le jeune homme aussi, car je les sentis se détendre. J'attendis quelques secondes, et quand Sirius commença à parler, je retournais discrètement sur mon siège. « Depuis qu’ils sont venus au monde, Jared, Alana et Eireann, on m’a appris que c’était mes cousins et qu’il fallait que je les accepte. Ils étaient des loups, ils faisaient parti de la cour d’Irlande, alors fallait les respecter. Alana et Eireann, ce n’était pas aussi compliqué. Elles sont des boules d’énergie et apprécient tout le monde. Mais Jared … toi … tu étais celui qui avait manqué de mourir, celui qu’il fallait protéger. » Je cachais ma surprise. Je ne savais pas que Jared avait manqué de mourir… Je lui avais sauvé la vie, avec l'aide de Bleddyn, quand mon frère l'avait trouvé à moitié mort après une bagarre. Mais ce n'était donc pas la première fois ?
J'essayais de m'effacer, d'être la plus discrète possible quand Sirius commença à parler de sa famille. De leur famille. De comment il vivait sa nature de demi-loups alors que ses cousins étaient de vrais loups. Il parlait également de la relation entre son père et Jared, en l'enviant. Une nouvelle fois, je dûs cacher ma surprise. D'après ce que Bleddyn m'avait dis, leur relation n'était pas au beau fixe. Mais peut-être était-ce ça, le noeud du problème. Qu'ils ne se connaissaient pas autant qu'ils le pensaient. Peut-être qu'ils avaient plus de choses en commun qu'ils ne le pensaient… « C’est vraiment là que j’ai commencé à te détester mais parce que je te jalousais. Encore plus quand mon côté loup m’a fait défaut à Poudlard. On s’est soudain mis à me craindre quand on a compris que j’avais du sang de loup. Sauf que je n’étais pas un loup-garou. Je n’étais qu’à moitié. A moitié, toujours. Coincé entre deux. Et toi … Toi tu étais parfait. Toi tu pouvais te transformer et rendre fier notre famille. Ma mère qui adorait être une louve, tes parents qui aimaient cet esprit de meute. A Poudlard, tout était différent. Il fallait cacher ça. Alors … quand les autres ont commencé à t’en faire baver, j’ai rien dit. Parce que ça aurait signifié que nous étions pareils alors que nous ne l’étions pas. Tu étais toi, avec ta meute, la fierté de tes parents. Et j’étais moi, sorcier avec du sang de loup, un bâtard, mais qui avais néanmoins l’espoir d’être accepté parmi les autres. Si j’avais dit quelque chose, si je t’avais défendu, je … » Je regarde discrètement Jared, qui semble avoir oublié ma présence. J'entends son cœur battre vite. Cela fait un moment qu'il est comme ça. Ainsi donc, il avait été harcelé à Poudlard… Un nouveau soupçon se confirmait. Pourtant, jamais je n'aurais deviné que son cousin avait laissé faire. Ce qui pouvait également expliquer la haine de Jared envers son cousin. « J’ai appris à te détester, à te haïr. C’était la solution de facilité. Tout comme j’ai appris à me détester. Pour ce que j’avais fait, pour ce que j’avais laissé faire. Pour ce que j’étais aussi. » Sirius aussi avait des raisons de haïr son cousin, au fond. De bonnes raisons ? Je n'étais pas bien sûre. Mais une chose se dégageait de ce tableau : ils avaient vraiment eu besoin de tout mettre à plat, et d'être honnêtes. Parce que même si ça ne les réconciliait pas, cela permettait qu'ils sachent ce qu'il en était véritablement.
Je croise le regard de Jared. Je vois qu'il tombe des nues face à cette confession. Pourtant, je n'arrête rien. Le jeune homme a besoin de l'entendre, et son cousin a besoin de le dire. « Je sais que tu me hais également. Et je doute qu’on puisse un jour s’entendre. Mais … j’apprends à découvrir ce que je suis. Alors … peut-être qu’un jour j’apprendrais à t’apprécier. Ou du moins, à ne plus te détester. » Je l'espérais, sincèrement, pour eux. Aslinn avait beau ne pas être mon cousin de sang, il était l'une des plus belles choses qui étaient arrivé à notre famille, y compris pour ma tante, qui ne voulait pourtant pas d'enfants. Aslinn était comme un second frère, il était comme Bleddyn et Accalia : un roc sur lequel compter, et en même temps, un ami avec qui rire et passer du temps. Un membre de la famille avec qui j'avais pu avoir des conflits, mais qui se résolvaient toujours le soir-même. Souvent avec une discussion, alors que, comme dit précédemment, je me battais avec Bleddyn pour régler nos disputes. Bref, j'espérais qu'un jour, les deux soient en capacité de compter l'un sur l'autre. Comme j'ai l'impression que Sirius a finit de dire ce qu'il avait sur le cœur, je me tourne vers Jared, l'invitant silencieusement à prendre la parole.
Pourtant, il ne dit rien. Il reste dans ses pensées, pendant plusieurs minutes. Je finis par me demander si il compte dire quelque chose. Je lui laisse le temps de réunir ses pensées, comme pour Sirius. J'espère ne pas avoir à utiliser mon pouvoir royal sur lui. Ce n'est pas le lieu, et franchement, même si je leur ai imposé cette discussion, c'était en tant que personne inquiète, pas en tant que princesse. « Tout ce que tu dis, c'est que des conneries, j'ai jamais entendu autant de conneries de la part de quelqu'un. » Une nouvelle fois, je suis surprise. Surprise de cette réaction. Je me tourne vers lui. « Jared… » Mon ton n'est ni autoritaire, ni implorant. Plutôt maternel. Toujours maternel. Je ne veux pas lui mettre la pression. Je ne veux pas l'obliger. Je veux seulement qu'il y mette du sien. « Ma relation avec mon père n'est pas aussi belle que tu l'imagines. Rien de ce que je fais n'est assez bien pour lui. Je ne le rends pas assez fier, je le déçois souvent. Je n'ai pas pris le même chemin que lui pour les études, ni les mêmes ambitions, à savoir rentrer dans la cour. Il joue au fier devant au Palais oui, pour donner le change, mais je ne suis pas à la hauteur du loup qu'il voudrait que je sois. Il voudrait que je lui ressemble plus, mais je n'en ai aucune envie. C'est des conneries aussi de croire que je sais qui je suis et que j'aurai un bel avenir en Irlande. » Mes mains sagement posées sur mes genoux, je me retins de serrer le tissu de ma veste entre mes doigts. Je sais que sa dernière phrase ne m'était pas visée, mais… Je me sens quand même coupable. Où est-ce que nous avons échoué pour qu'un membre de notre cour puisse croire que son avenir serait mauvais dans son pays ? Dans notre pays ?
Je sais que nous ne sommes pas les responsables. Je sais que son père l'est, après tout, il est en train de raconter les raisons pour lesquelles il le déteste. Et pourtant, j'aurais aimé le voir plus tôt. Être présente, et lui tendre une main. Mais si j'en parlais à Aslinn, je savais ce qu'il me dirait : j'étais trop jeune encore pour distinguer ce genre de choses, et trop préoccupée par mon éducation et ma préparation à la transformation. Il n'empêchait pas que je le regrettais. « Je suis devenu un putain de doué en Médicomagie, j'ai du me débrouiller tout seul, parce que des fois, j'étais tellement à terre que je ne pouvais même pas ramper jusqu'à Madame Pomfresh, j'ai testé plein de truc sur moi pour me soigner, j'ai beaucoup appris et progressé. Mais même ça, c'était pas assez pour mon père. La Médicomagie, c'est pas un truc de loup, pas un truc de Duc, c'est pas assez soldat, pas assez guerrier. Ni même les potions. Comment je pourrai aider l'Irlande en soignant des bobos ? Même avec ma marraine Élisabeth qui essayait de le convaincre. Non, rien n'est assez bien pour le Duc Parkinson. J'ai pourtant appris beaucoup sur les loups et les créatures magiques, j'ai appris vite et seul. C'est ce que j'ai toujours été... » Une nouvelle fois, je sens les regrets m'envahir. Comment pouvait-il croire que ses capacités ne valaient rien ? Comment pouvait-il croire qu'il ne valait rien ? Alors que j'avais lu son carnet de recherches. Je me souviens de mes mots exacts quand je lui avais rendu à son réveil, après lui avoir sauvé la vie ; je n'avais pas tout compris, mais c'était extraordinaire. Nous avions besoin de Médicomages comme lui à la cour. Je voulais lui offrir un poste après ses études, ou même pendant. Je n'avais pas encore eu l'occasion, et je cherchais un bon moment pour le faire. Comme par exemple, la fin des économies que je réalisais pour lui construire son propre laboratoire depuis que j'avais lu ce fameux carnet…
« Quoi qu'il en soit, j'ai aussi pensé des conneries sur toi, je pensais que tu avais une meilleure relation avec oncle Seth , mais je me suis trompé. Saiorse donne pas à croire qu'il y a un problème entre vous, elle ne s'est jamais confiée devant moi en tout cas. Elle n'a d'ailleurs pas à envier notre famille, ou surtout moi, moi je suis une cause perdue, parles-en à mon père, tu seras content d'apprendre quel genre de looser t'as pour cousin. » Il fallait que je reparle de tout cela à Bleddyn. Ce dernier l'avait accueilli quelques jours chez lui, peut-être qu'il pouvait le refaire, quand il aurait moins de choses à penser ? Il fallait montrer à Jared qu'il n'était pas seul. Il fallait que nous nous organisions. « Je... être un demi-loup aurait été une option plus favorable pour moi, mon père n'aurait rien attendu de moi, il ne m'aurait jamais envoyé à Poudlard et je n'aurai pas eu à faire ce qu'on fait ici maintenant. Et d'ailleurs, si vous me le permettez votre Altesse, je souhaiterai retourner en cours. » Quand Jared s'adressa directement à moi, je me réveillais de mes pensées, surprise. J'avais imaginé qu'il laisserait le temps à Sirius de réagir, mais apparemment pas. « Oui, bien sûr. Hum… » J'hésitais un instant. J'avais été surprise de voir que Jared avait utilisé l'étiquette de la cour : la manière de s'adresser à moi et sa posture, alors que nous étions à l'Université. Cela me faisait hésiter sur ma manière de répondre : le tutoiement, ou le vouvoiement ?
« Tu peux y aller. Je te remercie pour ton honnêteté. » J'avais opté pour la première solution. Après tout, je l'avais tutoyé plusieurs minutes auparavant. Et j'avais peur de le mettre mal à l'aise si j'agissais comme au palais. Je lui souris bienveillamment quand m'offrit une révérence, avant de tourner les talons et de partir. Je regardais alors Sirius. « Je suis désolée de vous avoir imposé ça, mais je reste persuadée que vous en aviez besoin. » Je voulais être honnête, mais la dernière chose que je voulais était de perdre la confiance que le jeune homme avait enfin placé en moi depuis quelques semaines. « Je comprendrai que tu ne veuilles plus me voir, mais… J'espère qu'au contraire, on continueras nos cours. Tu es sur la bonne voie, et… Ça m'embêterait que tout s'arrête maintenant. » Heureusement, heureusement, le jeune homme ne me rejette pas. Il ne semblait pas encore convaincu des bienfaits de cette confrontation, mais il n'était pas en colère. Je souris doucement. « Alors… A la semaine prochaine, Sirius ? » Rassurée. J'étais rassurée.
♕ Jeudi 6 juin 2002 ♕
Je n'en revenais pas que l'année était en train de toucher à sa fin. En regardant le ciel, je n'en revenais pas de tout ce qui avait changé en douze mois.
Il y a un an, je débattais -ou suppliais- mon père de nous laisser être scolarisés, pour changer d'air. J'étais fiancée à un homme que je n'aimais pas, et je voulais juste vivre une année dans la peau d'une personne normale avant de partir dans le métier où j'étais destinée. Aujourd'hui, j'adorais mes études, j'avais soutenu mon mémoire comme une étudiante lambda, je sortais avec un homme que j'aimais à la folie, et qui savait autant me faire rire que me sortir les yeux de la tête, et pourtant, nous cherchions ensemble une relique disparue depuis 2 000 ans pour pouvoir légitimer mon couple. Et surtout, j'avais plus confiance en mes futures capacités de reine.
Oh, politiquement, historiquement, économiquement, je commençais à être au point. C'était humainement que je doutais. Mais quand je voyais le demi-loup assis à mes côtés, je savais que j'en étais capable. Il avait fait d'énormes progrès, dans sa confiance en lui et sa manière d'aborder son loup, et je sentais bien que c'était en parti grâce à moi. Bien que Sirius avait fais le plus gros du travail, je savais que le coup de pouce venait de moi. Ça me flattait, mais surtout, ça me rassurait.
Notre dernier cours touchait à sa fin. Bien que ça m'attristait, une partie au fond de moi me disait que ça me permettrait de me dégager du temps pour me reposer et vaquer à mes recherches avec Aliocha. Pourtant, j'étais émue. Encore plus quand Sirius me retint de partir : « Tiens, n’oublie pas ça. » Je fronçais les sourcils, mais avec un sourire amusé. « Ne pas oublier quoi ? » Le jeune homme me tendit alors une boîte blanche avec un noeud rouge. Je clignais des yeux, pas sûre de savoir quoi dire. Ni penser. « Tu m'as offert un présent ? Mais… Tu… » Oh, par les dieux. J'avais pourtant l'habitude de recevoir beaucoup de choses, mais de Sirius, c'était une réelle surprise. Notre relation n'était pas la même qu'au début, certes, mais je ne pensais pas qu'il voudrait me témoigner une reconnaissance quelconque.
Alors que je n'avais pas encore osé prendre le paquet cadeau, Sirius me le tendit à nouveau. « Faut-il que je m’incline également pour offrir un cadeau à ma future reine ? » Je ne pus m'empêcher de rire doucement. « Je ne suis pas ta future reine, voy… » Mais quand je vis son regard, je compris à quel point il était sérieux. Mon sourire disparu, mais le sien aussi. Lentement, Sirius posa un genou à terre tout en baissant la tête. Dans une position de respect la plus totale. Une position que je n'avais pas pensé un jour le voir adopter, parce que jamais nous n'avions adopté ce genre de relation. Dès le début, par exemple, il m'avait appelé par mon prénom.
Je sentis l'émotion monter en moi, ainsi que les larmes. Sauf que j'avais tellement l'habitude de tout refouler que je serrais mes dents un instant, pour avaler la boule qui était dans ma gorge, avant de murmurer : « Redresse-toi, Sirius. Merci d'avoir pensé à moi pour un cadeau… » Je pris le paquet, dans l'espoir qu'il fasse ce que je lui dise. Je ne voulais pas ouvrir son cadeau alors qu'il était à genoux devant moi. Ça me gênait trop. Heureusement, le jeune homme se leva, et je commençais à défaire le noeud. Dans la boîte se trouvait un tissu rouge impérial, typiquement le genre de rouge que nous portions dans ma famille. Le rouge qui représentait le sang de nos ennemis, comme je l'avais expliqué à Alekseï. En dépliant le tissu, je me rendis compte qu'il m'avait offert… « Une cape ? » J'étais agréablement surprise. On m'offrait souvent des diamants, des tissus, mais pas un cadeau aussi… Adapté à l'évolution de notre relation. Comme si il y avait réfléchi. « C’est une cape d’invisibilité. » Incapable de cacher ma surprise, je me tournais vers lui, les yeux ronds.
Par les dieux, Sirius m'avait offert l'un des cadeaux les plus précieux qui pouvait exister en ce monde ! « Mais je l’ai aussi agrémenté de quelques petits ajouts. » Il pointa du doigt trois petits dessins sur le tissu. Je reconnus des runes, sans savoir les lire. « Fehu, le feu. Celle qui te correspond le mieux et qui symbolise le succès. As, l’arbre, afin de t’aider à écouter les précieux conseils autour de toi quand tu seras reine. Et Bar, le bouleau. Elle aussi te caractérise, car c’est la rune de la maternité. J’ai pu voir à quel point tu étais soucieuse de chacun de tes sujets, de la même façon qu’une mère va couver chacun de ses enfants, sans faire de différence. » Une nouvelle fois, l'émotion s'empara de moi. Je n'osais pas serrer la cape contre moi, de peur de l'abîmer. Pourtant, seuls les dieux savaient à quel point j'en avais envie. Pour lui prouver à quel point son cadeau me touchait. « Tu as dessiné des Runes pour moi sur cette cape… » Comment je pouvais lui montrer ma gratitude ? Et puis, ces runes prouvaient à quel point il me connaissait… Aslinn, Bleddyn et Accalia pourraient en témoigner quand je leur montrerai ce cadeau. « J’avais pris l’option runes à Poudlard mais ce n’est pas moi qui les ai dessinés. Je me suis fait aider. Malgré tout, ce sont des runes permanentes. Et j’ai ajouté un élixir de longue vie pour objets. Ta cape devrait résister quelques décennies. Ainsi tu pourras la porter aussi longtemps que tu le voudras. Et avec ces runes, tu seras la reine la plus armée du monde entier. » Il avait réellement réfléchi à mon cadeau… Il l'avait personnalisé. Il avait tout fait pour qu'il me corresponde personnellement. Et surtout, par ses paroles, il me montrait à quel point j'étais légitime pour régner.
Nos regards se croisèrent. Je dus avouer que le mien était sûrement légèrement embué. Ça ne l'empêcha pas de se mettre derrière moi, pour m'aider à mettre la cape. Il attacha le noeud autour de mon cou, avant de m'aider à sortir mes cheveux de mon dos. Je ne savais pas de quoi j'avais l'air, mais je me sentais confiante. Puissante. « Alors, est-ce que je suis invisible ? » Plaisantais-je. « Elle ne devient invisible que quand tu mets le capuchon sur ta tête. Autrement, c’est une cape parfaitement normale, mais qui a la résistance pour la plupart des sortilèges. » Je passais ma main sur le tissu, une nouvelle fois. « Merci, Sirius. Du fond du cœur. » Je n'arrivais pas à prendre le ton que je prenais au palais, chaleureux mais détaché. Là, il devait sentir toute l'émotion dans ma voix. « Tu m'as prouvé que j'étais capable de régner sur un royaume, mais aussi sur des êtres humains, avec des émotions. Tu n'es pas irlandais, mais tu as reconnu ma légitimité, et tu me l'as montrée. Tu n'imagines pas à quel point cela compte pour moi. » Je lui avais peut-être rendu service toute cette année, mais lui aussi m'avait rendu un service énorme. Je ne l'oublierai jamais. Que ce soit ce service, ou lui. Je lui en serai éternellement reconnaissante. :copyright:️ Justayne
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I'll show you how a real queen behaves, No damsel in distress, don't need to save me
Nous sommes le jeudi 4 avril 2002. Sirius, fils aîné de Seth et Saoirse Green, a fait son entrée à l'UMS début septembre dans le cursus de Musique. Depuis novembre, il voit chaque semaine Louve Iceni, une loup-garou qui l'aide à accepter la partie lupine qui le ronge depuis tant d'années.
Cause you can be the beauty and I could be the monster
La première remarque de Jared ne tarda pas à fuser.
« Tout ce que tu dis, c'est que des conneries, j'ai jamais entendu autant de conneries de la part de quelqu'un. »
Sirius s’agita sur son tabouret alors que Louve le rabrouait d’un air plus maternel qu’autoritaire :
« Jared… »
Sirius tourna la tête vers Jared, le regard dur et … blessé. Il avait joué le jeu, lui. Il avait dit ce qu’il ressentait, il avait exprimé sa vérité. Comment pouvait-il se permettre de juger ça ? Il aurait voulu se lever et lui dire sa façon de penser, mais les instructions de Louve étaient très claires : il devait écouter à son tour Jared en silence.
« Ma relation avec mon père n'est pas aussi belle que tu l'imagines. » reprit son cousin d’un ton moins dur. « Rien de ce que je fais n'est assez bien pour lui. Je ne le rends pas assez fier, je le déçois souvent. »
Sirius fronça les sourcils. Lui ? Ne pas rendre fier son père ?
« Je n'ai pas pris le même chemin que lui pour les études, ni les mêmes ambitions, à savoir rentrer dans la cour. Il joue au fier devant au Palais oui, pour donner le change, mais je ne suis pas à la hauteur du loup qu'il voudrait que je sois. Il voudrait que je lui ressemble plus, mais je n'en ai aucune envie. »
Alors ça, c’était une première surprise. Si Sirius ne montrait rien sur son visage qui affichait comme à son habitude un air dégagé, presque froid, dans sa tête, tout remuait. Amadeus n’était donc pas aussi bienveillant qu’il le croyait ? Sirius n’avait jamais pris le temps de s’intéresser aux Parkinson. Les jugeant infréquentables de par leur génétique lupine, Sirius passait le moins possible de temps avec eux. Pourtant, le peu qu’il voyait, c’était une famille soudée et fière de chacun de ses membres. Mais visiblement, Sirius n’avait pas aussi bien observé qu’il n’aurait dû. Ce n’était guère une surprise. Il n’avait jamais été fin observateur. Il laissait plutôt ce rôle à Maggie qui, sans le connaître depuis des années, arrivait à mettre le doigt sur des choses tellement évidentes.
« C'est des conneries aussi de croire que je sais qui je suis et que j'aurai un bel avenir en Irlande. » poursuivit Jared, pratiquement immobile si on faisait abstraction de ses poings qui se serraient et se desserraient sur ses genoux. « Je n'ai jamais voulu quitter l'Irlande. Mon père m'a forcé à venir à Poudlard, pour me sociabiliser. Chaque jour que Dana fait, je le déteste pour ça, il est responsable en partie de tout ce qui m'est arrivé, si je n'avais pas quitté l'Irlande, je n'aurai pas vécu la haine à Poudlard. »
Les choses auraient été alors bien différentes. Si Jared n’était pas venu à Poudlard, il serait resté de son côté, en Irlande, et Sirius du sien, en Ecosse. Ils auraient continué à faire leurs vies très différentes, très séparées, mais sans que la haine ne vienne se rajouter à leur relation déjà tendue.
« Je ne t'aurai pas vu m'abandonner, t'étais le seul que je connaissais, le seul sur qui je pouvais compter, mes sœurs n'étant pas chez les Serpentard. Et t'as rien fait toutes ces années. Je n'aurai pas été aussi d... »
Ses mots se coupèrent et Sirius détourna le regard de son cousin. Il ne pouvait continuer à le regarder. Il n’aurait jamais cru que ces mots le toucheraient, pourtant c’était le cas. C’était facile d’ignorer la détresse de Jared à Poudlard. Même s’ils partageaient le même dortoir, Sirius faisait tout pour ignorer sa présence. Même quand il rentrait avec de nouvelles cicatrices, Sirius replongeait le nez dans son livre comme s’il s’agissait d’un simple elfe de maison. Même quand les autres Serpentard se réjouissaient des sévices qu’ils avaient exécuté sur le loup-garou de leur maison, Sirius changeait de pièce.
Tout le temps, à chaque fois, il avait fui, ignorant le problème, refusant de s’en mêler ou même d’en avoir connaissance. Mais aujourd’hui, il suffisait d’entendre les mots se bloquer dans la gorge de Jared, de croiser son regard froid et dur ou de voir la violence qui se déchaînait en lui pour voir l’impact que cela avait eu sur lui. Toutes ces années de torture l’avaient changé. Non, elles l’avaient détruites. Et Sirius n’avait rien fait pour ça. Autrefois il arrivait à se persuader que Jared ne représentait rien pour lui, comme il rejetait en bloc sa partie lupine. Mais aujourd’hui qu’il apprenait à la connaître, aujourd’hui que Jared et lui avaient partagé quelques joints d’aconit tue-loup ou que cet idiot lui avait sauvé la vie lors de l’attentat de l’UMS … aujourd’hui, Sirius se sentait coupable. Honteux. Lâche.
Il serra les poings alors que son regard se fixait sur un tronc d’arbre derrière l’épaule de Louve qui ne lâchait pas son regard du visage de Jared.
« J'ai espéré un sacré nombre de fois que tu interviennes, pas seulement toi, d'autres. » continuait Jared. « T'es pas le seul responsable, beaucoup ont vu, ont su et n'ont rien fait. Moi le premier JE n'ai rien fait pour que ça s'arrête. Je n'ai interpelé personne, même si Rogue se doutait. Je n'ai pas été le loup fort et fier de mon père, j'étais exactement celui qu'il s'imagine, trop faible. Tu l'as dit... celui qui a failli mourir et qu'il faut protéger. Mais personne ne l'a jamais fait. Et puis, j'ai arrêté d'attendre de l'aide ou du soutien, petit à petit, jour après jour, mois après mois, années après années, coups après coups, je n'ai plus eu une seule once d'espoir. Plus jamais. »
Rogue. Sirius s’était moqué de la mort du professeur de potions en janvier dernier, déclenchant l’hystérie de Jared. Il savait que c’était l’un des professeurs préférés de son cousin, mais aujourd’hui, il comprenait pourquoi. Jared ne considérait pas cet homme seulement comme un potionniste brillant, mais comme l’homme qui savait pour son harcèlement. Le seul qui savait.
Sirius déglutit. Longtemps il s’était haï pour ce qu’il était. Mais il comprenait qu’il n’était pas le seul à se détester ainsi. Jared partageait ce dégoût de lui-même, si ce n’était plus.
« Je suis devenu un putain de doué en Médicomagie, j'ai dû me débrouiller tout seul, parce que des fois, j'étais tellement à terre que je ne pouvais même pas ramper jusqu'à Madame Pomfresh, j'ai testé plein de truc sur moi pour me soigner, j'ai beaucoup appris et progressé. Mais même ça, c'était pas assez pour mon père. La Médicomagie, c'est pas un truc de loup, pas un truc de Duc, c'est pas assez soldat, pas assez guerrier. Ni même les potions. Comment je pourrai aider l'Irlande en soignant des bobos ? Même avec ma marraine Élisabeth qui essayait de le convaincre. Non, rien n'est assez bien pour le Duc Parkinson. J'ai pourtant appris beaucoup sur les loups et les créatures magiques, j'ai appris vite et seul. C'est ce que j'ai toujours été... »
Un Médicomage. Là non plus, Sirius n’aurait jamais pensé que cela puisse être une honte pour Amadeus. Certes, il était un loup fier, un Alpha qui aimait diriger sa meute. Mais jamais Sirius n’aurait imaginé qu’Amadeus puisse ne pas soutenir son fils dans ses projets. Jared était bien plus seul que Sirius ne l’aurait cru. Il n’avait pas une meute, ni de soutiens irlandais comme il le croyait. Jared était un loup solitaire, brisé de l’intérieur, avec une forte haine pour lui-même, plus que pour les autres.
C’était facile de détester Sirius. Maggie aurait surement dit que c’était une façon de se raccrocher à quelque chose de plus réel, de diriger sa haine vers quelqu’un. Mais quand il ne restait plus ça, quand Louve les encourageait à se libérer de cette haine de l’un et de l’autre, qu’est-ce qui resterait pour Jared ?
« Quoi qu'il en soit, j'ai aussi pensé des conneries sur toi, je pensais que tu avais une meilleure relation avec oncle Seth, mais je me suis trompé. Saiorse donne pas à croire qu'il y a un problème entre vous, elle ne s'est jamais confiée devant moi en tout cas. Elle n'a d'ailleurs pas à envier notre famille, ou surtout moi, moi je suis une cause perdue, parles-en à mon père, tu seras content d'apprendre quel genre de looser t'as pour cousin. »
Sirius déglutit et tourna lentement en direction de Jared sans pour autant croiser son regard, encore trop gêné par leurs révélations mutuelles.
« Je... être un demi-loup aurait été une option plus favorable pour moi, mon père n'aurait rien attendu de moi, il ne m'aurait jamais envoyé à Poudlard et je n'aurai pas eu à faire ce qu'on fait ici maintenant. Et d'ailleurs, si vous me le permettez votre Altesse, je souhaiterai retourner en cours. »
Sirius leva les yeux vers Jared qui, le regard droit, attendait l’ordre de Louve. Son regard se dirigea vers la princesse qui hocha la tête, un peu surprise par cette demande.
« Oui, bien sûr. Hum … Tu peux y aller. Je te remercie pour ton honnêteté. »
Jared ne traîna pas. Il s’inclina légèrement et jeta un dernier regard vers Sirius. Un dernier regard qui signifiait quoi ? J’ai réglé mes comptes avec toi, c’est fini ? Ou à titre de revanche ? Il ne resta pas davantage pour s’expliquer et tourna les talons pour reprendre le chemin qu’il avait emprunté plus tôt. Sirius le regarda s’éloigner, le cœur battant. Même son loup s’était mis au repos pour laisser sa partie humaine gérer tout ça.
« Je suis désolée de vous avoir imposé ça, mais je reste persuadée que vous en aviez besoin. »
Sirius croisa le regard de Louve qui avait légèrement penché la tête sur le côté.
« Je comprendrai que tu ne veuilles plus me voir, mais… J'espère qu'au contraire, on continuera nos cours. Tu es sur la bonne voie, et… Ça m'embêterait que tout s'arrête maintenant. »
Sirius secoua la tête.
« Je … ne t’en veux pas. » répondit-il après une hésitation.
Il n’arrivait pas à maintenir le regard vers la princesse, aussi préféra-t-il se concentrer sur le tronc d’arbre derrière elle qu’il avait fixé pour s’aider.
« Je ne suis pas convaincu comme toi que nous avions besoin de … »
Sa voix se coupa. Il ne savait pas très bien ce qu’il allait dire. Quelque part, il était soulagé d’avoir dit ce qu’il avait à dire à Jared, et d’entendre la vérité de sa bouche, mais d’autre part … il sentait toutes les pensées négatives l’envahir sur sa conduite durant les années à Poudlard. Il avait cherché à se rattraper avec Fey et les jumeaux McGregor. Les seuls avec qui il avait osé se racheter. Pourquoi eux ? Pourquoi pas Jared ? Cette question le taraudait alors qu’un mot tournait en boucle dans sa tête : LÂCHE. LÂCHE. LÂCHE.
« Je ne veux pas abandonner nos cours non plus. » reprit-il en changeant de sujet.
Furtivement, il croisa le regard de Louve qui souriait.
« Alors… A la semaine prochaine, Sirius ? »
Elle devait sentir que tout ceci l’avait éprouvé comme cela avait éprouvé Jared qui s’était éclipsé. Sirius se leva de son tabouret, les jambes flageolantes, son esprit se perdant dans ses pensées.
« A la semaine prochaine. Merci. »
Il tourna les talons. Il savait exactement chez qui aller pour mettre de l’ordre dans ses pensées. Cillian Reid, son parrain.
Vendredi 17 mai 2002
Sirius ne disait toujours pas un mot alors qu’ils avaient transplané chez les Parkinson, en Irlande. Un repas familial alors qu’ils ne se réunissaient qu’une fois par an, lors de la première Pleine Lune de l’année. Mais aujourd’hui les circonstances étaient différentes.
« Tu te souviens de ce qu’on t’a dit ? »
Seth posa sa main sur la taille de Saoirse en jetant un regard d’avertissement à Seth.
« Pas de débordement comme l’autre fois. Jared a encore besoin de repos et pas qu’on ranime les anciennes querelles. »
Sirius s’efforça de ne pas foudroyer son père du regard alors que sa mère sonnait à la porte d’entrée.
« Mais ça ira. » chantonna sa mère en jetant un coup d’œil derrière son épaule. « Sirius sait parfaitement ce qu’il a à faire. »
Le cœur battant, Sirius acquiesça alors que la porte d’entrée s’ouvrait. Reagan les embrassa chacun leur tour avant de se décaler pour les laisser entrer. Les Braeden étaient déjà là et Mânen adressa un signe de main à Sirius alors que Shanna la rejoignait.
Les discussions allaient déjà bon train. Chacun semblait parfaitement quoi dire ou quoi faire pour agir le plus naturellement possible. Bien sûr, il fallait retrouver une atmosphère normale pour Jared. Sirius prit une grande inspiration avant de balayer la pièce du regard. Aucune trace de son cousin ni de ses sœurs.
Quelques semaines plus tôt, Sirius avait reçu un paquet par hibou. En le déballant, il avait reconnu l’aconit tue-loup que Jared préparait habituellement pour la fumer. Tout y était. Une bonne quantité. Comme s’il avait vidé tout son stock. Un étrange sentiment l’avait enserré à la poitrine. Pourquoi son cousin lui faisait-il ce cadeau ? Quelques heures après, sa mère était venue le trouver à l’UMS pour lui annoncer que Jared avait fait une tentative de suicide. Elle s’était effondrée en larmes dans ses bras et Sirius l’avait serré maladroitement contre lui, assis sur une table de pique-nique dans le parc de l’UMS.
Jared n’était pas mort cette nuit-là. Des personnes étaient arrivées à temps pour lui porter secours mais la convalescence serait longue. Il avait été rapatrié au palais irlandais où les Médicomages étaient à son chevet.
C’était une sensation étrange. D’abord le cadeau, puis la disparition de Jared. Même en sachant qu’il mettait fin à ses jours, il avait eu une attention pour lui. Il l’avait détesté et Sirius avait été l’une des personnes qui lui avait fait le plus de mal au cours de sa vie. Et pourtant …
Mais Sirius n’avait eu aucune émotion en façade. Il était resté de marbre face à l’annonce de sa mère. Shanna l’avait tenu régulièrement au courant des dernières nouvelles par hibou. Et finalement un repas avait été annoncé ce vendredi. Jared devait sentir que sa famille était toujours autour de lui. Quant à Sirius, il n’avait pas l’impression que tout ça soit réel.
Alana et Eireann descendirent en premier l’escalier, suivies de près par Jared. Son teint était un peu plus blafard qu’à l’accoutumée, mais globalement il restait le même. Si ce n’était ses yeux. Moins durs qu’à l’accoutumée, ils balayèrent la pièce du regard avant de saluer tout le monde.
Et si Jared n’avait pas raté son coup ? Et si à la place de faire un repas pour célébrer son retour à la maison, le repas était pour les obsèques de son cousin. Si à la place de voir tous ses sourires et ses mines réjouis, des sanglots s’échappaient encore de la gorge de Reagan. Si Alana et Eireann étaient effondrées dans un coin, ne pouvant décrocher un mot depuis la mort de leur jumeau. Si un silence de mort régnait dans l’atmosphère. Comment Sirius aurait-il réagi ? Que pouvait-on ressentir ?
Son regard croisa celui de Jared. Il n’arrivait même pas à comprendre ce qu’il ressentait. C’était la première fois qu’ils se revoyaient depuis … depuis que Louve les avait obligés à parler de ce qu’ils ressentaient. Et depuis ? Depuis ils s’étaient ignorés. Depuis, Sirius ne savait plus ce qu’il ressentait au sujet de son cousin. Comme il l’avait annoncé, il ne pouvait plus le détester. L’aimait-il ? Il ne savait pas. Il ne savait plus. C’était juste un grand neutre entre eux. Comme le regard qu’ils échangeaient à présent. Le paquet d’aconit – soumis au sortilège Reducto – tressautait contre sa cuisse dans la poche de son pantalon. Devait-il le lui rendre ? Maintenant ? Plus tard ? Pas sûr qu’oncle Amadeus apprécie de le voir … Jared devait surement suivre un régime strict après sa tentative de suicide.
Les invités s’installèrent à table et les discussions se poursuivirent au cours du repas. Naturellement. Ce n’était que des banalités. Les adultes parlaient plus que les adolescents. Pourtant, les Braeden essayaient d’amener de nouveaux sujets de discussions, Alana et Eireann répondant avec joie à cet échange. Sirius et Jared les écoutaient silencieusement, répondant parfois par des monosyllabes.
A la fin du repas, comme à leur habitude, les adultes se décalèrent dans le salon. Les éclats de rire de Saoirse et Reagan résonnaient dans la pièce, comme une délivrance après des semaines d’inquiétude, tandis qu’Elisabeth et Liam mimaient une anecdote qui leur était arrivée récemment.
La voix de Jared brisa cet instant.
« Est-ce que je peux sortir marcher avec Sirius ? »
Toutes les têtes convergèrent vers lui, et celle de Sirius suivit le mouvement. Il voulait … lui parler ? Non, ça ne rassemblait pas à Jared. Non, il voulait certainement récupérer son paquet d’aconit. C’était une ruse. Comme seul un Serpentard savait le faire. Ou peut-être qu’il y avait un peu de deux ? Sirius ignorait pourquoi, mais cette dernière pensée lui réchauffait le cœur.
« Enfin, si t'es d'accord Sirius ? » « … oui … ok ! Allons-y. »
Jared acquiesça et alla enfiler ses chaussures dans le hall.
« Sirius ? » l’interpella Reagan. « Fais attention à lui. Tu … comprends ? »
Un sourire crispé se ficha sur son visage alors que ses doigts s’attardaient machinalement sur un lacet de sa veste. Il n’avait jamais vu sa tante ainsi. En faites, tout cela donnait l’impression que la soirée avait été une mascarade où chacun avait joué un rôle détendu. Jusqu’à maintenant.
Reagan lui demandait de ne pas le lâcher des yeux. On ne savait jamais : s’il décidait de se suicider à nouveau au détour d’un chemin. Ridicule. Pourtant, Sirius savait que s’il balançait ça à sa tante, cela ne l’aiderait pas à les laisser partir. Au contraire. Et Sirius rêvait plus que tout d’échapper à ce décor de faux-semblant. Et puis … le fait qu’on lui demande de veiller sur son cousin … n’était-ce pas un peu ce qu’on lui avait demandé de faire à Poudlard et ce pour quoi il avait échoué ? La vie lui offrait-elle une nouvelle chance ?
« On n’ira pas loin. Et on va rester ensemble. » promit Sirius.
Reagan lui sourit et le serra brièvement dans ses bras. Encore une fois, c’était étrange de la part de sa tante. Bien sûr, les loups étaient toujours plus tactiles. Mais avec Sirius ou Jared, cela avait été toujours une règle implicite : pas trop de démonstration. Sirius déglutit mais la laissa faire avant de rejoindre Jared qui l’attendait sur le pas de la porte.
Les discussions se turent lorsqu’ils refermèrent la porte et le silence s’installa entre eux. Un silence agréable, comme un moment nécessaire pour leur permettre de recharger les batteries. Plusieurs mois plus tôt, ils avaient marché sur ce même chemin, dans la même direction que vers la cabane où il se rendait à présent. Ils n’avaient nulle besoin de se parler pour savoir que c’était là qu’ils voulaient aller se poser.
Le chemin n’était plus encombré par la neige et c’était un sentier de terre avec quelques feuilles et branches qui accompagnaient leurs pas. L’air était doux, annonçant un été chaud. Les mains dans les poches, Sirius repensait à tout ce qu’il allait dire à Jared. En vérité, il n’avait rien préparé. Mentalement, il avait relégué tout ça au fond de son esprit, l’ayant classé comme un dossier qu’il ressortirait plus tard quand il le faudrait. Mais à présent qu’il feuilletait mentalement toutes les informations liées à sa relation avec Jared, son cerveau n’arrivait pas à déterminer quels sentiments prédominaient. Il n’y avait plus de colère ni de haine. Plus vraiment d’appréhension si ce n’était qu’il ne savait pas ce que Jared ressentait de son côté. Il n’avait plus la force de le détester. Il n’avait plus de raison surtout.
Peut-être que Louve avait raison. Cette mise à plat avait été nécessaire. Il avait longtemps ressenti de la honte, de la lâcheté et des remords. Mais la vie avait laissé une nouvelle chance à Jared, tout comme elle en laissait une à Sirius. Il pouvait faire mieux. Il devait faire mieux. Pas seulement pour ses amis. Mais aussi pour sa famille. Ce serait plus compliqué avec certains. Mais avec Jared, il pouvait commencer à esquisser un pas dans sa direction.
Jared entra en premier dans la vieille cabane. Elle n’avait pas changé par rapport à la dernière fois. Son cousin s’assura que la porte où ils avaient trouvé l’Epouvantard était bien fermée tandis que Sirius dégageait avec un Wingardium Leviosa quelques objets pour pouvoir s’installer. Ils n’avaient pas besoin de se parler pour se comprendre. C’était étonnant quand on savait qu’ils s’étaient détestés pendant des années en se trouvant très différent l’un de l’autre.
« Est-ce que tu l'as pris avec toi ? » demanda finalement Jared.
Sirius sortit de sa poche le paquet avec l’aconit tue-loup et le lui tendit. Un sourire se dessina sur le visage du loup-garou.
« Oh putain génial, t'assure. » s’exclama-t-il en se laissant tomber sur le sofa.
Un nuage de poussière s’en dégagea.
« J'en pouvais plus de ce repas ! » ajouta-t-il. « Toi aussi ?! »
Une lueur amusée passa dans son regard alors qu’il rapprochait deux caissons en bois. Sur l’un il s’installa, et sur le deuxième, il commença à préparer un joint.
« J’ai pioché dans le paquet quelques fois. » avoua-t-il en faisant rouler entre ses doigts la feuille. « Ca m’a beaucoup aidé. »
C’était une façon de le remercier de ce cadeau. La première fois qu’il avait tiré une taffe là-dessus, il s’était senti planer à trois milles. La sensation que cela lui procurait était incommensurable. Il savait que ce n’était pas sain, pourtant, dans des périodes de grand stress, il avait apprécié pouvoir se rouler un joint.
« Et voilà ! »
Il claqua des doigts et une flamme apparut. Il rapprocha la cigarette des flammes et elle s’alluma aussitôt. Il tira une longue taffe dessus et prit le temps d’expirer, appréciant la décharge que cela produisait dans tout son corps. Les muscles de ses épaules se détendirent et il ferma les yeux pour apprécier toutes les sensations de la détente, avant de tendre le joint à Jared.
Jared tira lui aussi dedans avant de grimacer. Sirius le regarda lui rendre le joint, comme dégoûté.
« Qu’est-ce qu’il y a ? » demanda-t-il, étonné. « Vas-y finit le, je peux pas vraiment en prendre dans mon état et aussi parce que je suis lié à elle. »
Sirius ouvrit la bouche, surpris. Jared se souciait assez de quelqu’un pour vouloir faire les choses bien. D’accord, il ne le connaissait pas énormément mais c’était en tout cas la première fois qu’il en parlait avec autant de franchise face à Sirius. Et la « elle » qui se cachait derrière ce pronom devait surement être Clarissa McGregor. Elle était l’une des sœurs des jumeaux McGregor et … Shanna lui avait indiqué dans les lettres qu’elle était aussi convalescente avec Jared en Irlande. Sirius n’avait pas compris exactement ce dont il s’agissait et comme il n’avait pas posé beaucoup de questions, tout ceci restait flou.
« Merci de m'avoir accompagné, t'était pas obligé. » reprit Jared après quelques minutes de silence où Sirius avait fini par le rejoindre sur le sofa, bien plus moelleux que le caisson. « C'est mon premier moment de vraie liberté depuis que j'ai essayé de me suicider. »
Sirius tira une nouvelle bouffée et ne put retenir un sourire.
« Je ne suis pas étonné. » dit-il. « J’ai l’impression que tout le monde pense que tu vas recommencer sitôt qu’ils auront le dos tourné. »
Jared hocha la tête.
« J'ai toujours quelqu'un qui me surveille 24h sur 24, j'ai même entendu mes sœurs planifier ma « garde » avec ma copine et ma meilleure amie. Au Palais, j'ai l'illusion d'être seul, mais je sais qu'il y a des personnes qui me guettent en permanence, mais eux sont plus discret qu'Eireann et Alana. »
Il lâcha un rire et Sirius croisa son regard. Il y a un peu plus d’un mois, il avait exprimé sa solitude. Mais à l’entendre aujourd’hui, de nombreuses personnes se souciaient de lui. Le plus important était surtout de savoir si Jared le voyait comme tel ? C’était une chose d’être entourée, mais si on se sentait solitaire, il n’y avait pas grand-chose qui pouvait changer cela à part en être soi-même conscient. Et … avoir des personnes bienveillantes autour de soi.
« C'est l'enfer mec, j'ai voulu mourir pour connaître la paix, et au final, je suis revenu pour qu'on me colle encore plus au cul, tout ce que j'adore t'imagine... » reprit-il avec un nouveau rire.
Sirius le suivit. Il sentait que pour Jared, c’était nécessaire de plaisanter de tout ça. Tout le monde autour de lui avait mis tellement de sérieux, de peine et de remords, qu’il avait besoin de quelqu’un pour relâcher la pression.
« Tu sais que je lui ai défoncé la gueule ? » « A qui ? » demanda Sirius en expirant la fumée. « A mon père ! »
Sirius émit un hoquet de surprise.
« Je sais pas si tante Saoirse en a parlé chez vous. Mais je lui ai tout balancé, tout ce que j'avais sur le cœur, toute ma haine, ça m'a fait du bien sur le moment, mais... je sais pas si ça a changé quelque chose. »
Alors, il avait lâché ça aussi ? Sirius déglutit, fasciné et en même temps un peu envieux. Jared avait réussi à parler à son père. Comme il disait, il n’était pas certain que cela change quelque chose, mais c’était sorti.
« Faut croire que les conneries de Louve nous inspirent … » grommela-t-il avec une pointe d’amusement.
Jared tressaillit, muscles tendus.
« Pardon ! » se reprit-il. « Je sais que tu n’aimes pas quand je ne respecte pas … votre truc … d’étiquette ou machin … »
Il fit un moulinet avec sa main et tira une nouvelle taffe sur le joint d’aconit tue-loup. Comme à chaque fois, le joint l’aidait à délier sa langue et à se détendre. L’appréhension qu’il avait pu ressentir avait totalement disparu. Jared secoua la tête, comme pour dire que ça allait.
« Je n’y connais rien à vos traditions et … sincèrement, je m’en fous un peu. Mais ça ne m’empêche pas de respecter énormément … la princesse. »
Il espérait que le terme choisi n’hérisserait pas les poils de Jared, sans mauvais jeu de mot.
« Elle m’a beaucoup aidé. »
Ça, Jared pouvait le comprendre. Jared regarda Sirius un instant, comme s’il essayait de deviner s’il mentait ou s’il était sincère. Finalement ses épaules se détendirent.
« Les Iceni sont vraiment de bonnes et de belles personnes » dit-il. « Si tu apprends à leur faire confiance ils te le rendront, et même si tu n'as pas confiance en eux, ils feront en sorte de gagner ta confiance. »
Sirius hocha la tête. Il ne connaissait que Louve de la famille Iceni. Bleddyn partageait son club et avait échangé quelques mots rapides au cours des soirées étudiantes sans plus de cérémonie. Quant à la dernière de la fratrie, Sirius ne la connaissait pas. En somme, Sirius ne pouvait se fier qu’aux dires de Jared auxquels, pour une fois, il souhaitait accorder du crédit.
« Et toi, comment ça se passe avec ton paternel ? » reprit Jared.
Les yeux dans le vague, Sirius haussa les épaules.
« Rien de nouveau. »
Il approcha la cigarette de ses lèvres avant de lâcher un rire nerveux.
« Il m’a encore fait la leçon tout à l’heure avant de rentrer chez vous. Il avait peur que je te provoque ou un truc dans le genre. »
Il haussa les épaules et inspira cette fois-ci la fumée avant de rejeter sa tête en arrière pour jouir parfaitement des sensations.
« Je suis désolé d'être responsable d'un sermon de ton père. Je sais que mon comportement anime la famille. Ce n'est pas ce que je voulais, je ne voulais pas tout ça... »
Sirius baissa la tête mais ne répondit rien. Il se doutait que Jared n’avait pas eu l’intention de revenir en faisant cet acte. Il ne comptait pas faire face aux conséquences car il aurait alors disparu.
Sirius préféra changer de sujet.
« Tu dis que tu fais attention maintenant … avec elle … » reprit-il. « Clarissa est donc ta … petite-amie ? » « C'est pas ma... c'est... je sais pas vraiment ce qu'on est. »
Sirius fit rouler sa tête sur le dossier du sofa et eut un sourire qui dévoila ses dents.
« Genre, Jared Parkinson a une petite-amie maintenant ? »
Était-ce une pointe de provocation encore ? Pourtant, il n’y avait aucune haine derrière, ni de colère. Juste un rictus amusé comme si l’idée-même lui était inconcevable. Jared planta son regard dans celui de Sirius, comme s'il réalisait un truc important.
« Bah merde alors, je crois que j'ai une petite amie … »
Soudain, un pli soucieux barra le front de Jared comme s’il réalisait vraiment ses paroles.
« Mec, tu veux me dire que t’as jamais eu de petite-amie avant ? »
Sirius fronça les sourcils. Lui n’avait jamais connu de filles. Mais Jared … Sirius ne pouvait pas croire qu’avec son entrée à l’UMS il n’avait pas eu quelques petites-amies.
« Tu n’sortais pas genre avec … la meilleure amie de Shanna ou un truc comme ça ? » « Victoria, la cousine de Clarissa... » répondit Jared. « Je crois qu'il n'y avait qu'elle en couple avec moi, j'étais pas vraiment dans ce délire, je n'avais pas les mêmes sentiments. »
Sirius ne pouvait juger. A part le fait qu’elle était aussi épuisante qu’une tornade lorsqu’elle venait chez les Green, Sirius n’avait pas d’avis sur elle, et encore moins sur sa relation avec Jared. Aussi, Sirius écoutait sans rien dire lorsque Jared poussa une exclamation.
« Waouh, c'est du délire de parler comme ça, de penser comme ça. Mais avant Clary j'ai .... c'est différent avec elle. »
Sirius osa lever les yeux vers lui et vit que Jared paraissait troublé, comme s’il réalisait encore ce que la jeune femme était par rapport à lui. Jamais Sirius n’avait connu quelqu’un comme Jared semblait attaché à elle. Est-ce qu’il le connaîtrait un jour ? C’était une question qu’il se posait encore …
« Toi t'as quelqu'un ? Quelqu'un à qui tu tiens ? »
Sirius roula des yeux.
« Pas vraiment. » marmonna-t-il avant de changer de sujet.
Il remballa le pochon d’aconit tue-loup avant de le tendre à Jared qui refusa de le reprendre. Sirius le regarda plusieurs instants, le regard perdu. Aucun sourire ne se dessinait sur son visage tandis que son cerveau tentait de se mettre en marche, anesthésié par le pouvoir de la plante qu’il venait de fumer.
« Pourquoi moi ? » demanda-t-il enfin. « Tu … ne me détestes plus ? »
Son regard était rivé sur un fil du sofa qui dépassait et avec lequel il jouait. Il n’arrivait pas à regarder Jared en face.
« Je déteste à peu près le monde entier. Je me déteste plus que n'importe qui. Maintenant j'essaye de détailler chaque personne et ce que je ressens pour elle. Tu sais un délire avec le Psychomage que je suis obligé de voir. »
Ah oui ! Jared devait surement suivre une thérapie forcée après tout ça. Sirius ne connaissait pas le nom du Psychomage. Tout ça ne l’avait jamais tenté avant … avant Maggie.
Jared se tourna vers Sirius avec un pseudo regard noir.
« Je t'avertis, fais aucun commentaire sur le connard que je dois voir à la cour, j'ai du mal à encaisser de voir sa tête une fois par semaine. »
Sirius sourit et leva les mains.
« J’ai rien dit. »
Jared se réinstalla dans le fauteuil, songeur.
« Et je crois que te concernant, ce n'est pas que je te déteste, j'apprends à décortiquer les sentiments, parce que je suis comme anesthésié depuis tellement d'année que tout se mélange. Et je sais, ce n'est pas de la haine pour toi, je ne te déteste pas Sirius. Je sais pas comment je vais pouvoir te pardonner, j'crois que tu m'as déçu parce qu'au contraire... je t'aimais bien à la base, même si j'ai jamais su le dire. Je crois que je me sens trahi, c'est différent d'avec Scott-Rosier, je l'ai jamais aimé, lui je le déteste. »
Sirius baissa la tête, se mordillant la lèvre.
« Je crois … que j’ai envie de changer. » déclara-t-il alors. « Je veux dire, je crois pas, j’en suis sûr. Je veux changer. Pour Shanna en particulier. Mais … pour moi aussi. »
Il déglutit, hésitant à allumer un nouveau joint.
« J’ai découvert pas mal de choses à mon sujet ces derniers mois. Et notamment le fait d’arrêter de me détester pour ce que j’ai fait … ou pas fait dans le passé. Quelqu’un m’a dit que j’avais toujours la possibilité de faire mieux. De m’améliorer. Et c’est ce que je veux faire. »
Jared observa Sirius avec attention, comme s’il cherchait à répondre quelque chose qui serait à la hauteur des efforts que fournissait son cousin pour s’exprimer avec autant de sincérité.
« J'ai pas de problèmes avec ça mec. » déclara-t-il. « J'essaye aussi et je sais combien c'est pas évident. Si t'y arrives, tu me donneras des conseils avisés, parce que je suis vraiment pas doué. » « On verra ça … »
Sirius lâcha un rire mais n'ajouta rien de plus. Un silence se réinstalla. Un silence apaisant. Un silence dont ils avaient cruellement eu besoin tous les deux.
Jeudi 6 juin 2002
L’émotion de Louve était palpable. Même si elle tentait de ne rien en montrer, elle paraissait sincèrement touchée. Sirius ne pensait pas en avoir autant mais cette humanité le transperçait en plein cœur. Jamais il n’aurait cru, quelques mois auparavant, qu’il aurait un lien aussi puissant avec la future reine d’Irlande.
« Merci, Sirius. Du fond du cœur. »
Il inclina légèrement la tête. Ce n’était pas elle qui devait le remercier mais bien le contraire. Cela le mettait mal à l’aise, alors il noua ses mains derrière le dos et tenta de soutenir son regard.
« Tu m'as prouvé que j'étais capable de régner sur un royaume, mais aussi sur des êtres humains, avec des émotions. Tu n'es pas irlandais, mais tu as reconnu ma légitimité, et tu me l'as montrée. Tu n'imagines pas à quel point cela compte pour moi. »
Sa mâchoire trembla légèrement et il sourit. Il aurait voulu lui en dire tout autant. Lui exprimer tout ce à quoi elle avait participé dans son évolution cette année. Mais rien ne sortait. A la place, il inclina à nouveau la tête.
« Je dois aller en cours. » articula-t-il enfin. « Mais … je … Enfin … à bientôt. »
Il commença à marcher à reculons, attrapant son sac et adressant un signe de la main maladroit à la princesse, avant de tourner les talons pour regagner le sentier à petits trots. Il l’avait fait. Oui. Cela comptait pour lui aussi.