| Mercredi 20 Mars 2002 |
Tout a commencé par une lettre.
Ce n'était pas la première fois que je recevais une lettre… Évidemment. Mais je dois admettre que je recevais rarement des lettres qui m’intriguaient autant que celle-ci. Souvent mes lettres venaient de ma famille, de mes amis ou encore de fans de Ren, mais des lettres d’un admirateur anonyme ? C’était rare. Quelqu’un qui affirmait qu’il me connaissait mais qu’il n’osait pas me dire en face ce qu’il ressentait pour moi. J’ai été touché par la lettre… C’était adorable, si romantique ! Sa conclusion était l’invitation à rencontrer mon admirateur secret. Notez que je l’imaginais homme alors que, concrètement, je n’avais aucune idée de son genre.
Très curieux et surtout attendri, je ne me voyais pas foutre un vent à cette personne. Du coup, je me suis rendu au lieu du rendez-vous à l’heure donnée quand bien même il faisait sombre et que je n’étais pas totalement rassuré.
Peut-être que j’aurais dû écouter mon instinct… On m’a souvent dit que ma naïveté me perdra mais j’admet que je n’aurais jamais imaginé vivre quelque chose de tel. Tout ce que je sais c’est que j’attendais sagement et puis, soudainement, c’est le vide.
Plus rien.
J’ai des bribes de souvenirs, comme des morceaux de rêve. Quelqu’un qui me porte. Une voix familière. Un rire. Un sourire même. Mais rien de clair, rien de concret. Rien jusqu’au moment où j’ouvre les yeux à nouveau.
Je ne sais pas où je me trouve. Je suis épuisé, je vois un peu trouble, je suis largué… Mais je sais que je ne reconnais pas l’endroit où je me trouve. Pas du tout. Je suis allongé sur un sol froid et dur. Mes muscles sont mous, j’ai du mal à bouger un petit temps. J’entends des voix. Des personnes qui discutent ? J’entends aussi taper, comme quelqu’un qui frapperait un mur.
« Bienvenue à l’Hôtel Olympe ! Je suis le propriétaire de ce bâtiment : Arès. »On s’adresse à moi, j’en suis sûr. Je me redresse et observe l’homme qui me parle. Un garçon aux cheveux blonds, agenouillé devant moi. Il a l’air jovial mais il ne me dit rien de bon. J’ai un frisson quand son regard se plante dans le mien. Je suis à peine éveillé et, déjà, j’ai peur. Affreusement peur.
« Je sens que tu vas te sentir comme chez toi ici ! Tu as de la chance, tu as le meilleur majordome de l’hôtel. »Qu’est-ce que—...?Un hôtel… Pourquoi ? Qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Je ne me souviens pas d'être allé dans un hôtel. D’ailleurs, je doute que cet endroit soit réellement un hôtel. On dirait plus une prison… À moins que ce soit ma peur qui s’exprime.
« Il est là, juste pour toi. »Je me tourne pour regarder le garçon qui se tient à côté de moi, debout pour sa part. Mes yeux s’écarquillent alors que je reconnais immédiatement le japonais au sourire carnassier.
... Akutenshi Busujima !?Je ne connais pas ce garçon tant que ça. Tout ce que je sais de lui, je l'ai lu dans la Gazette et je crois que c’est réciproque. Je lui ai parlé
une fois et c’était à mon anniversaire, quand il a accompagné son amie qui voulait me parler avant de disparaître se goinfrer. J’ai été mal à l’aise à ses côtés, je me souviens. Il y a un quelque chose qui n’inspire pas confiance chez ce garçon…
Salut, Gyeon~Le sourire d’Akutenshi s’étire et dévoile des canines pointues. … Je ne me souvenais pas avoir remarqué qu’il était un vampire avant aujourd’hui mais, là, avec ses yeux rouges, ça fait nul doute. Étais-je si distrait l’autre fois ? Ou alors peut-être qu’il s’est transformé entre temps ?
Qu’importe cette histoire. Akutenshi n’est pas plus rassurant en vampire qu’en sorcier lambda. J’ai juste envie de fuir… Je ne comprends pas grand chose de tout ça mais ce que je constate ne me rassure pas. J’ai beau ne pas être la baguette la plus vive de chez Ollivander, je sais sentir quand je suis dans un bourbier et, là, j’ai l’impression que je suis tombé dans un vilain traquenard…
J’essaie de bouger mes bras mais je sens mes poings liés derrière mon dos. L’un des deux garçons présent doit m’avoir enchaîné ou menotté… Ce qui ne fait qu’accentuer ma peur. J’essaie alors de me redresser mais Akutenshi appuie la semelle de sa chaussure contre mon dos pour me garder à genoux.
Voyons… Tu ne vas pas nous quitter quand même ? Tu viens d’arriver… On a même pas encore eut le temps de jouer !Akutenshi claque la langue comme déçu de ma réaction. Cela dit, son mauvais sourire ne le quitte pas ; j’ai l’impression qu’il se délecte de ma peur. Ça me fait encore plus peur. Les larmes me montent aux yeux progressivement et je me mets à respirer plus fort.
Laissez-moi partir… Je ne sais pas ce que je vous aie fait mais je ne voulais pas vous offenser — s’il vous plaît…Je me tourne vers le sorcier blond pour le supplier, parce que je pense que Akutenshi sera insensible à mes supplications. Je n’arrive pas à m’imaginer avoir froissé le japonais un jour et encore moins son ami blond mais c’est la première défense qui me vient. Pourquoi chercheraient-ils à me faire peur comme ça sans raison ? C’est forcément mérité… Du moins, de leur point de vue.
Akutenshi ne répond pas, il semble laisser son ami parler cette fois mais il se met à siffloter et, malgré moi, je l’entends et reconnaît ce sifflement.
London bridge is falling down...
Ceci me renvoie immédiatement au jour de l’attentat et mon esprit fait le lien. Se pourrait-il que Akutenshi soit le sorcier masqué ? Celui qui cherchait à nous attaquer, Sirius et moi ? Celui qui a manqué de me tuer…?
À cet instant, je comprends la gravité de la situation. Si Akutenshi est le garçon qui a tenté de me tuer lors de l’attentat alors je suis certainement en danger de mort, aujourd’hui. Pris de panique, je m’agite à nouveau sur place sans pouvoir me redresser comme le japonais applique toujours une pression sur mon dos et que je demeure attaché. Je me met à sangloter et, après avoir lancé un regard à Akutenshi et son sourire sadique, je me tourne à nouveau vers l’autre garçon.
Pitié… Ne me faites pas de mal… Je ferais ce que vous voulez ! Tout ce que vous voulez ! Je vous en supplie… Je—Akutenshi m’interrompt en claquant la langue et appuie son pied sur ma tête cette fois, collant ma joue au sol. Je glapis de surprise et j’admet que le contact me fait un peu mal. Je ne vais pas râler pour si peu… Si ce que je crains est exact, je risque bien pire que cette douleur superficielle.
Et si nous commencions ?Akutenshi chantonne, je le devine, à l’attention de son ami et peut-être aussi un peu de moi-même.
Devrions-nous nous servir de la magie ou d’instruments plus classiques ?Je me mets à hyperventiler en comprenant ce que Akutenshi doit insinuer. Pour une fois, j’aimerai avoir tort et m’inquiéter pour rien. Dites moi que c’est une mauvaise blague… Une blague de très mauvais goût et super flippante, mais une blague tout de même.
Si seulement on pouvait m’expliquer ce que j’ai fais de mal pour atterrir ici. Si on pouvait me donner une chance de me rattraper, d’effacer mes erreurs… Ai-je seulement fait une erreur ? Est-ce de ma faute si je me retrouve ici aujourd'hui ? J’entends, outre le fait d’avoir bêtement accepté de rencontrer un inconnu. D’ailleurs, ça me revient… Était-ce donc de leur part, cette lettre ? Tout était planifié ? C’est possible comme c'est possible qu’ils aient sauté sur l’opportunité de me trouver seul pour m'assommer et m’emmener… N’empêche que quelque chose me dit que la lettre venait des deux garçons avec qui je me retrouve actuellement.
Évidemment que c’était leur plan depuis le début… Je suis si idiot ! Tellement stupide !
Pitié…Je tente à nouveau mais la pression de la chaussure d’Akutenshi contre ma joue s’accentue. Je crois qu’il s’agace quand je supplie alors je n’ose plus l’ouvrir.
Je dois admettre avoir une préférence pour la méthode classique mais c’est ton cadeau, je te laisse choisir en premier ~Un cadeau ? Qui ? Moi ? Pourquoi ? Je mords mes lèvres en essayant de lever les yeux vers le blond, comme pour lire sur son visage. Je prie sans y croire pour qu’on me relâche en m’affirmant que tout ça c’était pour me faire peur ou pour que l’ami d’Akutenshi soit plus ouvert à la négociation… Il n’est pas possible qu’on aie envie de blesser quelqu’un comme ça juste pour s’amuser ! … Si ?