Ta voix me réconforte
et le reste peu importe
et le reste peu importe
| Samedi 30 Mars 2002 |
On m’a toujours prévenu que ma naïveté me perdrait, mais j’étais loin de penser que quelque chose d’aussi horrible m’arriverait si soudainement.
Il y a eu les cœurs brisés. Puis il y a eu l’attentat… Et puis il y a eu l’admirateur secret. Je n’ai compris que cet admirateur n’était pas réellement celui qu’il prétendait être que lorsque je me suis réveillé dans le flou je ne sais où face à des individus mystérieux.
J’ai tout essayé. J’ai supplié, j’ai voulu leur offrir tout ce que j’avais… Mais ça n’a pas suffit à les convaincre de me relâcher. Pourquoi ? Je crois qu’ils voulaient simplement me voir souffrir. J’ignorais qu’il y avait des personnes qui me haïssaient à ce point… Qu’ai-je donc fait ?
J’ai eu tout le loisir de réfléchir et j’ai plusieurs pistes, finalement.
Il y a ceux qui me connaissent en tant qu’Idol. Je sais que mon frère m’a souvent raconté des histoires d’anti-fans dangereux et de fans hystériques souvent pires. Il m’a répété de nombreuses fois d’être vigilant si mon rêve était d’être une Idol. Qui sait ? Peut-être que ce fameux “admirateur secret” en était un. Peut-être qu’il s’agissait d’un fan complètement fou. Peut-être qu’il s’agissait, au contraire, de quelqu’un qui me haïssait. Qui haïssait “Ren”.
Il est aussi possible que les personnes qui m’ont séquestrées n’avaient rien à voir avec tout ça. Des personnes qui n’aiment pas Dae-Hyun Gyeon. Ou juste des tarés qui cherchaient une proie facile… Parce que c’est ce que je suis, n’est-ce pas ? Une proie facile. Tout le monde le pense. Ils ont raison.
Finalement est-ce que c’est important de savoir qui m’a kidnappé ? Cette histoire est horrible quoiqu'il en soit. J’ai souffert. Énormément. Longtemps. J’ai perdu la notion de tout ; du temps, de l’espace… Et puis, au fond, j’étais presque résigné, convaincu que je ne sortirais jamais de là. Du moins pas en vie. Je voyais déjà l’article à la une de la Gazette : “Le corps de Dae-Hyun Gyeon, Idol du groupe WANDboyZ connu sous le nom de Ren, retrouvé après des mois de recherches…”. Ils aguicheraient les lecteurs avec ce titre et l’article décrirait l’horreur de la découverte ; j’aurais été découpé en morceaux et jeté dans une benne à ordure, un malheureux serait tombé dessus en descendant ses poubelles. Une fin horrible. Ma famille et mes amis seraient déchirés. Ils ne seront plus jamais les mêmes. Après ma mort, mes amants se demanderaient comment les choses se seraient passées s’ils étaient restés avec moi. Les personnes qui m’aiment culpabiliseraient…
Mais je ne suis pas mort.
J’ai subis sans compter les coups et les tortures jusqu’à ce qu’un jour mes tortionnaires me relâchent dans la nature.
Aujourd’hui.
Je ne sais pas où je suis. Je crois que j’ai été méchamment drogué. J’étais inconscient un moment et puis, en me réveillant, j’étais là. Dans une ruelle déserte, jeté comme un sac poubelle. Je vois flou, j’ai l’impression que le monde bouge… Mais je suis dehors. Je suis dehors et mon instinct me hurle de fuir. Et s'ils revenaient me chercher ? Il faut que je m’en aille. Il faut…
Je m’appuie au mur contre lequel je me trouve dans une tentative de me lever. Tout me fait mal, mon corps doit être parsemé de plaies et de blessures après tout ça. Je manque de tomber une fois ou deux. Je ne marche pas droit, je tiens difficilement sur mes jambes. J’ai faim, j’ai froid, j’ai mal… Il pleut. Mais je n’abandonne pas. Je me lève péniblement.
Dès que j’arrive enfin à me tenir debout, je prends une pause. J’essaie de respirer correctement mais même ça c’est douloureux. Appuyé contre mon mur, je commence à marcher. Je fais un pas, puis un autre et doucement j’y arrive : j’avance. Je quitte ma ruelle pour rejoindre la rue. Ma tête tourne et je vois toujours trouble mais je crois que j’ai déjà fréquenté cette rue une fois au moins, elle m’est étrangement familière. Peut-être que je ne suis pas perdu, finalement ?
Il n’y a pas énormément de personnes qui passent ici, on dirait. J’essaie tout de même d’interpeller le peu de passants qui croisent ma route mais ceux-ci m’évitent et grimacent en me regardant. Ils doivent penser que je suis un camé ou un alcoolique qui aurait forcé sur la dose. Je ne dois pas renvoyer une belle image, déambulant dans la rue torse-nu, l’air hagard et toutes ces blessures sur moi. Sûrement les personnes qui passent par là doivent être trop malins pour se mêler à mon histoire quelle qu’elle soit.
Peut-être que si j’avais été relâché une petite semaine plus tard, ils se seraient arrêtés pour moi. Après que mon avis de recherche soit paru dans la Gazette. Évidemment, j’ignore que cela va arriver, et eux aussi du coup.
Je sens que je vais m’évanouir à nouveau. J’ai tellement mal et ma tête tourne… Elle tourne et elle tourne. Je n’arrive pas à me concentrer sur mon souffle. Je ne veux pas m’évanouir. Je sens que si je me laisse faire, je vais à nouveau me réveiller chez mes tortionnaires. J’ai si peur…
C’est là que je l’entends.
Quelqu’un qui appelle mon nom. Je crois, je n’en suis pas certain ? Peut-être que je rêve… Je lève les yeux tout de même, cherchant de mon regard fatigué d’où vient cette voix familière. Mes yeux se posent sur une silhouette qui est très floue pendant un moment. Je finis tout de même par mettre un visage dessus.
Sang…woo…
Ma voix casse alors que je tends la main pour atteindre l’homme que je suis certain de reconnaître. Vu mon état, il est fort possible que je sois en train d’halluciner ou que je me trompe de personne, mais je suis si désespéré que je saisis cette once d’espoir. Je crois que je me mets à pleurer quand j’arrive à attraper les épaules de l’homme en question et que je lève les yeux vers lui.
Aide… moi…
Je supplie en me sentant à nouveau partir. Cette fois, je n’arrive pas à lutter : je tombe de tout mon poids contre l’homme en face de moi. Ma dernière pensée, alors que je tombe à nouveau dans l’inconscience, est encore une fois une supplication.
Pitié faites que ce soit lui… Ou, qui que ce soit, faites qu’il me sauve… Qu’ils ne me retrouvent jamais…
당신의 말은깃털과 같습니다
your words are like feathers
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your words are like feathers
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