Mattéo Black-Peretti
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Contexte
« Vous voilà enfin. Je vous ai cherchée. »
@ Victoire
Nous sommes le jeudi 12 septembre 2002. Mattéo Black-Peretti est un étudiant en Médicomagie. Spécialisé dans la Psychomagie, il est également interne dans cette spécialité à l'hôpital Sainte-Mangouste. Vampire, il cache sa véritable nature à la société entière. Entouré de ses amis, Mattéo cherche avant tout à récupérer Clarissa.
« Vous voilà enfin. Je vous ai cherchée. »
« Hey toi ! Salut ! Hey ! Black ! »
Mattéo qui marchait d’un pas déterminé jusqu’au laboratoire où il avait son prochain cours d’Anatomie Humaine tourna la tête en arrière. Une étudiante lui adressait des signes de main et tentait de se frayer un chemin dans la foule d’étudiants. Mattéo plissa les yeux et retroussa le nez en la voyant s’approcher de lui.
« Salut ! » dit-elle, essoufflée bien que ses joues restaient parfaitement pâles.
Mattéo ne répondit pas, se contentant de hausser un sourcil.
« C’est bien toi Mattéo Black-Peretti ? »
Les mains sur les hanches, elle leva ses yeux d’un noir profond vers lui. Ses cheveux châtain ondulaient autour de son visage et elle ne dépassait pas ses épaules. Mattéo s’autorisa à respirer un instant mais il était difficile de capter une odeur particulière avec le nombre d’étudiants qui circulaient ici. Il ne la connaissait pas et son sourire trop jovial l’irritait.
« Je vais être en retard en cours. » répondit-il en tournant les talons.
Il n’avait aucune envie de discuter avec une inconnue, ni de perdre son temps à lui indiquer sa route. Mais la jeune femme le rattrapa, trottant à sa hauteur.
« Je suis Melania Blackshare. » dit-elle la main tendue. « Mon nom ne te dit rien ? »
« Absolument rien. »
Il ignorait superbement sa main, redressant le menton alors qu’il s’efforçait de maintenir une allure humaine dans la foule. Tout comme à l’hôpital, Mattéo ne tenait pas à révéler au grand jour sa véritable nature. Un nombre restreint savait ce qu’il était et cela lui suffisait. Son regard croisa un instant Parkinson qui lui jeta un regard noir. Depuis que Clarissa et lui avaient pris conscience qu’il était étudiant à l’UMS, ils faisaient tout pour l’éviter. Cela amusait beaucoup Mattéo. Ce serait sans doute sa partie de chasse la plus intéressante. Il fallait dire qu’il les avait laissé tranquille durant tout l’été, les laissant croire qu’ils avaient du répit et qu’il s’était lassé. Mais comment pourrait-il se lasser d’une fille comme Clarissa McGregor ?
« Tu es mon tuteur. »
La jeune femme vint plaquer sa main sur son torse pour le forcer à s’arrêter. Les pas de Mattéo se stoppèrent alors qu’il détaillait de la tête aux pieds l’étudiante.
« Ah oui. Peut-être. Mais ça ne m’intéresse pas. »
« Qu’importe que ça t’intéresse ! J’ai besoin d’un référent, et ton rôle est de me servir de guide. »
Si elle gardait toujours son sourire lumineux, son ton était devenu sec et déterminé.
« Il m’a fallu une semaine pour remettre la main sur toi et je ne vais pas te laisser te défiler avant d’avoir obtenu ce que je souhaitais. »
« Ah oui ? »
Il pencha la tête sur le côté, un sourire amusé aux lèvres. Melania Blackshare. Un nom totalement inconnu. Un visage totalement inconnu. Mais une volonté intéressante.
« Rappelle-moi ce que tu étudies. »
« La Médicomagie. Je suis en 1ère année et … je suis complètement larguée entre ces murs. »
Elle étendit les bras autour d’elle, bousculant un groupe d’étudiants qui lui lança des paroles plutôt fleuries. La réponse de Melania fut immédiate lorsqu’elle leva le majeur en l’air.
« Tu ne te laisses pas faire on dirait. » observa Mattéo avec un rire dans la voix. « Bon écoute, je vais être sincère : ce truc de tutorat, je m’en fous totalement. Moi aussi, je viens de débarquer ici et bien que je sois en 4ème année, je suis "complètement largué’" »
Il lui sourit, fier de renvoyer les paroles qu’elle avait elle-même utilisé sur lui.
« Maintenant, je vais vraiment être en retard alors si tu pouvais … »
Il esquissa un geste de la main pour lui faire signe de s’éloigner, ce qui n’eut aucun effet sur Melania.
« Généreux ne semble pas être ton deuxième prénom. »
Un sourcil haussé ainsi, elle lui rappelait étrangement un visage familier sans qu’il puisse y mettre le doigt dessus. Au lieu de ça, il se pencha en avant pour venir murmurer à son oreille :
« Et en plus de ça, je peux devenir un véritable cauchemar pour tous ceux qui me contrarient. »
Il se recula avant de contourner la jeune femme qui cette fois-ci ne le suivit pas. Il pressa le pas dans le couloir alors qu’un étrange pressentiment lui enserrait la poitrine. En se penchant ainsi vers elle, il avait senti une odeur bien particulière : vampire. Melania était une vampire. Mais tout comme lui, elle se cachait : les yeux noirs, prétendre être essoufflée. Elle jouait à un jeu aussi complexe que le sien.
Mais qui était-elle vraiment ?
Mattéo enfila sa cape sombre, la cape de Lorena Peretti, celle qu’il considérait comme sienne désormais. En la portant, il se sentait retrouver l’essence même de ses origines. Mattéo Orion Black-Peretti. Il était fier de son nom. Il était fier de son identité. Elle lui avait été cruellement arrachée quand il n’était encore qu’un bébé, tout comme sa vie. Celle-ci aurait été tellement différente sans l’intervention des Dwight. Il aurait été humain. Il aurait grandi auprès de ses parents. Du moins de sa mère. Il frissonna bien qu’il n’avait jamais ressenti le froid de sa vie. En s’observant ainsi dans le miroir, il avait la sensation d’avoir échoué. Ses yeux rouges sang trahissaient ce qu’il était et haïssait. Pourtant, quand Clarissa le regardait autrefois, son regard était si doux, si attentionné. Ses pupilles à elle aussi pouvaient devenir rouge sang. Elle n’était nullement effrayée par ce qu’il était. Avec elle, il pouvait croire à un avenir. Avec elle, il sentait la vie. Et ce soir, il allait la retrouver.
Il prit une inspiration et enfila ses lentilles de contact avant de sortir de sa chambre. Il possédait toujours son appartement à Southampton, assez grand pour accueillir lui et ses amis. Les Malefoy, Croupton et la belle Helaena vivaient ici. Seulement les deux derniers avaient besoin d’un lit pour dormir, les trois autres étant des vampires.
Finissant d’attacher la broche autour de son cou pour maintenir sa cape, il se dirigea vers les appartements privés des jumeaux Malefoy. La porte de Cassius était entrebâillée et grâce à son ouïe fine, Mattéo entendit les sanglots du vampire avant même d’arriver. Il s’arrêta un instant sur le seuil, écoutant les voix à l’intérieur.
« … quand il … avec … sa … je pouvais … je pouvais pas respirer … je … perdais pied … et … et … »
« Calme-toi. »
C’était la voix d’Arachneus. Bien qu’employé sur un ton doux, c’était une demande ferme.
« J’avais … juste besoin … de remettre … dans la pensine … tous ces cauchemars … »
« C’est terminé à présent. Notre père n’est plus là. Plus jamais il ne s’approchera de toi. »
« Je revois … pourtant … son visage … »
« Tu es un vampire, Cassius. Tu ne fais plus de cauche… »
« Mais le sortilège ! Le sortilège … celui de … »
Mattéo ferma les yeux. Quelques jours plus tôt, Cassius s’était battu avec un mage noir qui avait usé du sortilège Cauchemardis. Mattéo savait que les jumeaux avaient vécu de terribles épreuves alors qu’ils étaient encore humains, il y avait de cela plusieurs siècles. Mais jamais il n’aurait cru que cela les hanterait encore après tout ce temps. Il passa la tête entre les portes.
Recroquevillé au fond de la pièce, Cassius maintenait ses jambes contre lui, se balançant. Ses cheveux blonds collaient à son visage, des larmes imaginaires roulant sur ses joues. Arachneus était près de lui. Ses mains encerclaient le visage de son frère, tandis qu’il déposait des baisers sur son front et ses joues. Leur relation était … étrange. Mais Mattéo ne se serait jamais permis de juger davantage. Ils avaient appris à se réconforter à deux.
Alors que Cassius serrait toujours ses jambes contre lui, Arachneus leva les yeux vers Mattéo, ayant senti sa présence. Rien ne pouvait surprendre le maître-espion. Ses yeux brillaient de tristesse mais c’était en le voyant ainsi que Mattéo ressentait quelque chose d’étrange au fond de lui. Lui aussi avait envie d’entrer dans cette pièce et de réconforter les deux frères. Sans doute plus Arachneus que Cassius d’ailleurs. Il avait toujours senti une … attraction étrange envers ce vampire sans prendre le temps d’explorer ce qu’il ressentait réellement.
Mattéo détourna le regard, déconcerté, et ses yeux se posèrent sur la pensine posée à côté de la porte. Des runes étaient tracées sur le contour de la pierre en marbre blanc alors qu’un liquide tourbillonnait au fond de la soucoupe. Mattéo se pencha légèrement pour voir une pièce sombre à l’intérieur. C’était un lointain souvenir des jumeaux. Un homme se dressait sur les deux corps frêles des frères encore humains et bien plus jeunes qu’ici. Ils étaient recroquevillés dans la même position qu’en cet instant alors que leur père se dressait au-dessus d’eux. Mattéo recula, ne voulant pas en voir plus. Il referma doucement la porte pour leur laisser plus d’intimité avant de se diriger à l’extérieur de l’appartement. Il n’avait pas besoin de réconfort de la part d’Arachneus. Mais du réconfort de la seule personne qui comptait réellement : Clarissa.
Le quartier général des Boadicea Paterae se trouvait à Druid’s Oak, dans son Quartier Nord. Il ne devait pas être aussi grand en temps normal mais comme c’était la rentrée, et que le club se devait de faire bon effet, les lieux avaient été agrandis magiquement. L’Atelier du fond était intact, composé de toiles cirées, de palettes de peintures, de pinceaux, d’aquarelles et de tout autre ustensile qui avaient du faire briller les yeux créatifs de Clarissa. En revanche, les pièces d’avant avaient été élargies : ainsi le hall circulaire pouvait accueillir une cinquantaine d’étudiants sans qu’ils ne se marchent dessus et la pièce remplie de fauteuils habituellement avaient été transformés avec quelques « manges-debout » et des tabourets en hauteur. Un coin bar était installé pour satisfaire toutes les papilles. Mais avec la chaleur de ce mois de septembre, les étudiants avaient préféré l’arrière-cour du quartier général. C’était un coin herbeux, avec quelques arbres pour faire la lisière du terrain. Le coin était néanmoins plus sombre que le reste de la cour qui était éclairée par des guirlandes multicolores.
Mattéo se mouvait dans le quartier général, son nez et ses yeux à la recherche de la trace de Clarissa. Mais rien. Pourtant, il s’agissait bien de son club et ayant cerné ses habitudes, il était rare qu’elle ne fasse pas une apparition lors de ce genre de soirées. Arachneus avait même dérobé son agenda pour vérifier son planning et elle avait entouré plusieurs fois cette soirée. Elle viendrait. Elle devait venir. En attendant, Mattéo devait simplement prendre son mal en patience. Et pour un vampire comme lui qui avait du mal d’une part à gérer son tempérament, et d’autre part, qui ne supportait pas la population humaine insignifiante qui l’entourait, la soirée commençait à être longue.
Le sang qui palpitait dans les veines qui l’entouraient finissait de le mettre à rude épreuve. Tous ces humains insouciants du massacre qu’il pourrait commettre. Les dons vampiriques étaient une bénédiction. Avec, on pouvait accomplir n’importe quoi, même broyer les os d’un loup-garou. D’un loup en particulier. Un sourire se dessina sur le visage de Mattéo en s’imaginant broyer les côtes de Jared Parkinson. Mais être vampire n’était pas pour lui. Cela l’avait arraché à sa famille et l’avait contraint à un destin qu’il n’avait jamais voulu. C’était grâce à ses recherches pour guérir le vampirisme qu’il avait tenu le coup pendant toutes ces années de souffrance et de solitude. Sans ça, que lui restait-il ?
Une voix aigue lui fit tourner la tête vers la droite. Là-bas, vers les arbres qui offraient des ombres pouvant dissimuler n’importe qui, une fille se faisait acculer contre un arbre par un groupe de trois personnes. Mattéo plissa les yeux et tourna la tête, mais personne ne semblait l’avoir remarqué. L’un des hommes – car il était évident maintenant qu’il y regardait plus attentivement qu’il s’agissait de trois hommes – lui tenait le bras tandis qu’un autre ricanait en avançant vers elle. Quelque chose dans sa poitrine gronda. Cela le surprit. Certes, cette jeune femme était menacée. Mais qu’en avait-il à faire ? Il ne la connaissait pas après tout. Pourtant, un instinct le poussait à se rendre là-bas. Un instinct le poussait à lui porter secours. Ses pieds restaient pourtant profondément ancrés dans le sol comme si sa tête refusait de céder à cette folie. Il avait autre chose à faire qu’à voler au secours de jeunes filles naïves.
Pourtant, ce fut le visage d’une personne qui l’encouragea à bouger. Melania venait de sortir dans le coin herbeux et son regard venait de croiser le sien. Par la barbe de Merlin, il ne manquait plus que cette fouineuse !
Voulant l’éviter à tout prix, Mattéo se dirigea alors vers le groupe près des arbres. La jeune femme avait réussi à se dégager de l’arbre. Mais un autre homme venait de caler son torse contre son dos, venant humer son parfum. C’était comme si Mattéo le sentait lui aussi. Il n’était pas aussi près que l’humain, pourtant, il sentait les effluves de son parfum. Des épices orientales avec une note chaleureuse. C’était comme … rentrer à la maison. Comme si … c’était l’odeur qu’il avait toujours recherchée.
La jeune femme se dégagea de l’emprise de l’homme mais tomba alors à la renverse. D’un geste rapide et agile, les mains de Mattéo la saisirent sous les épaules pour l’aider à se redresser.
« Vous voilà enfin. » dit-il de cette voix si charmante qu’il savait adopter. « Je vous ai cherchée. »
Il passa un bras sur l’épaule de la jeune femme et son regard se riva sur les trois humains. Il n’avait nul besoin de ses yeux de vampire pour les effrayer. Il connaissait ces humains pour avoir déjà eu affaire à eux quelques jours plus tôt à l’UMS. En le voyant et en se souvenant de cette mauvaise rencontre qu’ils n’étaient pas prêts à oublier, ils pâlirent.
« Merci messieurs de l’avoir retrouvé. Profitez bien de la soirée. »
De sa voix doucereuse, il fit un geste de la main pour les inviter à fuir … tant qu’ils le pouvaient. Sans se faire prier, les hommes déguerpirent et retournèrent à l’intérieur. Un mince coup d’œil dans cette direction indiqua à Mattéo que Melania était toujours là. Pourtant, elle ne faisait aucun geste pour s’approcher de lui, se contentant d’observer la scène avec son verre à la main. L’attention de Mattéo se détourna d’elle lorsque la jeune femme se dégagea de son emprise. Leurs yeux se croisèrent et à nouveau, Mattéo sentit cette odeur si particulière. Elle dégageait une aura particulière. Ses grands yeux bruns le fixaient, méfiants et pourtant fascinés. Sa peau avait la couleur du cacao et ses cheveux bruns nattés lui donnaient envie de les humer de la même manière que l’homme plus tôt.
« Que fait une jeune sorcière comme vous dans la pénombre avec trois hommes ? » demanda-t-il, un demi-sourire s’affichant sur ses lèvres.
Elle n’avait pas encore prononcé un mot à son intention pourtant il sentait d’ici son attitude revêche. Elle n’avait pas l’air si jeune que ça, ni si naïve non plus. Qui était-elle ? Quel était son nom ? Que faisait-elle ici ? Jamais Mattéo n’avait connu une pareille fascination pour une personne avant … Clarissa.
Mattéo qui marchait d’un pas déterminé jusqu’au laboratoire où il avait son prochain cours d’Anatomie Humaine tourna la tête en arrière. Une étudiante lui adressait des signes de main et tentait de se frayer un chemin dans la foule d’étudiants. Mattéo plissa les yeux et retroussa le nez en la voyant s’approcher de lui.
« Salut ! » dit-elle, essoufflée bien que ses joues restaient parfaitement pâles.
Mattéo ne répondit pas, se contentant de hausser un sourcil.
« C’est bien toi Mattéo Black-Peretti ? »
Les mains sur les hanches, elle leva ses yeux d’un noir profond vers lui. Ses cheveux châtain ondulaient autour de son visage et elle ne dépassait pas ses épaules. Mattéo s’autorisa à respirer un instant mais il était difficile de capter une odeur particulière avec le nombre d’étudiants qui circulaient ici. Il ne la connaissait pas et son sourire trop jovial l’irritait.
« Je vais être en retard en cours. » répondit-il en tournant les talons.
Il n’avait aucune envie de discuter avec une inconnue, ni de perdre son temps à lui indiquer sa route. Mais la jeune femme le rattrapa, trottant à sa hauteur.
« Je suis Melania Blackshare. » dit-elle la main tendue. « Mon nom ne te dit rien ? »
« Absolument rien. »
Il ignorait superbement sa main, redressant le menton alors qu’il s’efforçait de maintenir une allure humaine dans la foule. Tout comme à l’hôpital, Mattéo ne tenait pas à révéler au grand jour sa véritable nature. Un nombre restreint savait ce qu’il était et cela lui suffisait. Son regard croisa un instant Parkinson qui lui jeta un regard noir. Depuis que Clarissa et lui avaient pris conscience qu’il était étudiant à l’UMS, ils faisaient tout pour l’éviter. Cela amusait beaucoup Mattéo. Ce serait sans doute sa partie de chasse la plus intéressante. Il fallait dire qu’il les avait laissé tranquille durant tout l’été, les laissant croire qu’ils avaient du répit et qu’il s’était lassé. Mais comment pourrait-il se lasser d’une fille comme Clarissa McGregor ?
« Tu es mon tuteur. »
La jeune femme vint plaquer sa main sur son torse pour le forcer à s’arrêter. Les pas de Mattéo se stoppèrent alors qu’il détaillait de la tête aux pieds l’étudiante.
« Ah oui. Peut-être. Mais ça ne m’intéresse pas. »
« Qu’importe que ça t’intéresse ! J’ai besoin d’un référent, et ton rôle est de me servir de guide. »
Si elle gardait toujours son sourire lumineux, son ton était devenu sec et déterminé.
« Il m’a fallu une semaine pour remettre la main sur toi et je ne vais pas te laisser te défiler avant d’avoir obtenu ce que je souhaitais. »
« Ah oui ? »
Il pencha la tête sur le côté, un sourire amusé aux lèvres. Melania Blackshare. Un nom totalement inconnu. Un visage totalement inconnu. Mais une volonté intéressante.
« Rappelle-moi ce que tu étudies. »
« La Médicomagie. Je suis en 1ère année et … je suis complètement larguée entre ces murs. »
Elle étendit les bras autour d’elle, bousculant un groupe d’étudiants qui lui lança des paroles plutôt fleuries. La réponse de Melania fut immédiate lorsqu’elle leva le majeur en l’air.
« Tu ne te laisses pas faire on dirait. » observa Mattéo avec un rire dans la voix. « Bon écoute, je vais être sincère : ce truc de tutorat, je m’en fous totalement. Moi aussi, je viens de débarquer ici et bien que je sois en 4ème année, je suis "complètement largué’" »
Il lui sourit, fier de renvoyer les paroles qu’elle avait elle-même utilisé sur lui.
« Maintenant, je vais vraiment être en retard alors si tu pouvais … »
Il esquissa un geste de la main pour lui faire signe de s’éloigner, ce qui n’eut aucun effet sur Melania.
« Généreux ne semble pas être ton deuxième prénom. »
Un sourcil haussé ainsi, elle lui rappelait étrangement un visage familier sans qu’il puisse y mettre le doigt dessus. Au lieu de ça, il se pencha en avant pour venir murmurer à son oreille :
« Et en plus de ça, je peux devenir un véritable cauchemar pour tous ceux qui me contrarient. »
Il se recula avant de contourner la jeune femme qui cette fois-ci ne le suivit pas. Il pressa le pas dans le couloir alors qu’un étrange pressentiment lui enserrait la poitrine. En se penchant ainsi vers elle, il avait senti une odeur bien particulière : vampire. Melania était une vampire. Mais tout comme lui, elle se cachait : les yeux noirs, prétendre être essoufflée. Elle jouait à un jeu aussi complexe que le sien.
Mais qui était-elle vraiment ?
Fin de journée
Mattéo enfila sa cape sombre, la cape de Lorena Peretti, celle qu’il considérait comme sienne désormais. En la portant, il se sentait retrouver l’essence même de ses origines. Mattéo Orion Black-Peretti. Il était fier de son nom. Il était fier de son identité. Elle lui avait été cruellement arrachée quand il n’était encore qu’un bébé, tout comme sa vie. Celle-ci aurait été tellement différente sans l’intervention des Dwight. Il aurait été humain. Il aurait grandi auprès de ses parents. Du moins de sa mère. Il frissonna bien qu’il n’avait jamais ressenti le froid de sa vie. En s’observant ainsi dans le miroir, il avait la sensation d’avoir échoué. Ses yeux rouges sang trahissaient ce qu’il était et haïssait. Pourtant, quand Clarissa le regardait autrefois, son regard était si doux, si attentionné. Ses pupilles à elle aussi pouvaient devenir rouge sang. Elle n’était nullement effrayée par ce qu’il était. Avec elle, il pouvait croire à un avenir. Avec elle, il sentait la vie. Et ce soir, il allait la retrouver.
Il prit une inspiration et enfila ses lentilles de contact avant de sortir de sa chambre. Il possédait toujours son appartement à Southampton, assez grand pour accueillir lui et ses amis. Les Malefoy, Croupton et la belle Helaena vivaient ici. Seulement les deux derniers avaient besoin d’un lit pour dormir, les trois autres étant des vampires.
Finissant d’attacher la broche autour de son cou pour maintenir sa cape, il se dirigea vers les appartements privés des jumeaux Malefoy. La porte de Cassius était entrebâillée et grâce à son ouïe fine, Mattéo entendit les sanglots du vampire avant même d’arriver. Il s’arrêta un instant sur le seuil, écoutant les voix à l’intérieur.
« … quand il … avec … sa … je pouvais … je pouvais pas respirer … je … perdais pied … et … et … »
« Calme-toi. »
C’était la voix d’Arachneus. Bien qu’employé sur un ton doux, c’était une demande ferme.
« J’avais … juste besoin … de remettre … dans la pensine … tous ces cauchemars … »
« C’est terminé à présent. Notre père n’est plus là. Plus jamais il ne s’approchera de toi. »
« Je revois … pourtant … son visage … »
« Tu es un vampire, Cassius. Tu ne fais plus de cauche… »
« Mais le sortilège ! Le sortilège … celui de … »
Mattéo ferma les yeux. Quelques jours plus tôt, Cassius s’était battu avec un mage noir qui avait usé du sortilège Cauchemardis. Mattéo savait que les jumeaux avaient vécu de terribles épreuves alors qu’ils étaient encore humains, il y avait de cela plusieurs siècles. Mais jamais il n’aurait cru que cela les hanterait encore après tout ce temps. Il passa la tête entre les portes.
Recroquevillé au fond de la pièce, Cassius maintenait ses jambes contre lui, se balançant. Ses cheveux blonds collaient à son visage, des larmes imaginaires roulant sur ses joues. Arachneus était près de lui. Ses mains encerclaient le visage de son frère, tandis qu’il déposait des baisers sur son front et ses joues. Leur relation était … étrange. Mais Mattéo ne se serait jamais permis de juger davantage. Ils avaient appris à se réconforter à deux.
Alors que Cassius serrait toujours ses jambes contre lui, Arachneus leva les yeux vers Mattéo, ayant senti sa présence. Rien ne pouvait surprendre le maître-espion. Ses yeux brillaient de tristesse mais c’était en le voyant ainsi que Mattéo ressentait quelque chose d’étrange au fond de lui. Lui aussi avait envie d’entrer dans cette pièce et de réconforter les deux frères. Sans doute plus Arachneus que Cassius d’ailleurs. Il avait toujours senti une … attraction étrange envers ce vampire sans prendre le temps d’explorer ce qu’il ressentait réellement.
Mattéo détourna le regard, déconcerté, et ses yeux se posèrent sur la pensine posée à côté de la porte. Des runes étaient tracées sur le contour de la pierre en marbre blanc alors qu’un liquide tourbillonnait au fond de la soucoupe. Mattéo se pencha légèrement pour voir une pièce sombre à l’intérieur. C’était un lointain souvenir des jumeaux. Un homme se dressait sur les deux corps frêles des frères encore humains et bien plus jeunes qu’ici. Ils étaient recroquevillés dans la même position qu’en cet instant alors que leur père se dressait au-dessus d’eux. Mattéo recula, ne voulant pas en voir plus. Il referma doucement la porte pour leur laisser plus d’intimité avant de se diriger à l’extérieur de l’appartement. Il n’avait pas besoin de réconfort de la part d’Arachneus. Mais du réconfort de la seule personne qui comptait réellement : Clarissa.
Quelques heures plus tard
Le quartier général des Boadicea Paterae se trouvait à Druid’s Oak, dans son Quartier Nord. Il ne devait pas être aussi grand en temps normal mais comme c’était la rentrée, et que le club se devait de faire bon effet, les lieux avaient été agrandis magiquement. L’Atelier du fond était intact, composé de toiles cirées, de palettes de peintures, de pinceaux, d’aquarelles et de tout autre ustensile qui avaient du faire briller les yeux créatifs de Clarissa. En revanche, les pièces d’avant avaient été élargies : ainsi le hall circulaire pouvait accueillir une cinquantaine d’étudiants sans qu’ils ne se marchent dessus et la pièce remplie de fauteuils habituellement avaient été transformés avec quelques « manges-debout » et des tabourets en hauteur. Un coin bar était installé pour satisfaire toutes les papilles. Mais avec la chaleur de ce mois de septembre, les étudiants avaient préféré l’arrière-cour du quartier général. C’était un coin herbeux, avec quelques arbres pour faire la lisière du terrain. Le coin était néanmoins plus sombre que le reste de la cour qui était éclairée par des guirlandes multicolores.
Mattéo se mouvait dans le quartier général, son nez et ses yeux à la recherche de la trace de Clarissa. Mais rien. Pourtant, il s’agissait bien de son club et ayant cerné ses habitudes, il était rare qu’elle ne fasse pas une apparition lors de ce genre de soirées. Arachneus avait même dérobé son agenda pour vérifier son planning et elle avait entouré plusieurs fois cette soirée. Elle viendrait. Elle devait venir. En attendant, Mattéo devait simplement prendre son mal en patience. Et pour un vampire comme lui qui avait du mal d’une part à gérer son tempérament, et d’autre part, qui ne supportait pas la population humaine insignifiante qui l’entourait, la soirée commençait à être longue.
Le sang qui palpitait dans les veines qui l’entouraient finissait de le mettre à rude épreuve. Tous ces humains insouciants du massacre qu’il pourrait commettre. Les dons vampiriques étaient une bénédiction. Avec, on pouvait accomplir n’importe quoi, même broyer les os d’un loup-garou. D’un loup en particulier. Un sourire se dessina sur le visage de Mattéo en s’imaginant broyer les côtes de Jared Parkinson. Mais être vampire n’était pas pour lui. Cela l’avait arraché à sa famille et l’avait contraint à un destin qu’il n’avait jamais voulu. C’était grâce à ses recherches pour guérir le vampirisme qu’il avait tenu le coup pendant toutes ces années de souffrance et de solitude. Sans ça, que lui restait-il ?
Une voix aigue lui fit tourner la tête vers la droite. Là-bas, vers les arbres qui offraient des ombres pouvant dissimuler n’importe qui, une fille se faisait acculer contre un arbre par un groupe de trois personnes. Mattéo plissa les yeux et tourna la tête, mais personne ne semblait l’avoir remarqué. L’un des hommes – car il était évident maintenant qu’il y regardait plus attentivement qu’il s’agissait de trois hommes – lui tenait le bras tandis qu’un autre ricanait en avançant vers elle. Quelque chose dans sa poitrine gronda. Cela le surprit. Certes, cette jeune femme était menacée. Mais qu’en avait-il à faire ? Il ne la connaissait pas après tout. Pourtant, un instinct le poussait à se rendre là-bas. Un instinct le poussait à lui porter secours. Ses pieds restaient pourtant profondément ancrés dans le sol comme si sa tête refusait de céder à cette folie. Il avait autre chose à faire qu’à voler au secours de jeunes filles naïves.
Pourtant, ce fut le visage d’une personne qui l’encouragea à bouger. Melania venait de sortir dans le coin herbeux et son regard venait de croiser le sien. Par la barbe de Merlin, il ne manquait plus que cette fouineuse !
Voulant l’éviter à tout prix, Mattéo se dirigea alors vers le groupe près des arbres. La jeune femme avait réussi à se dégager de l’arbre. Mais un autre homme venait de caler son torse contre son dos, venant humer son parfum. C’était comme si Mattéo le sentait lui aussi. Il n’était pas aussi près que l’humain, pourtant, il sentait les effluves de son parfum. Des épices orientales avec une note chaleureuse. C’était comme … rentrer à la maison. Comme si … c’était l’odeur qu’il avait toujours recherchée.
La jeune femme se dégagea de l’emprise de l’homme mais tomba alors à la renverse. D’un geste rapide et agile, les mains de Mattéo la saisirent sous les épaules pour l’aider à se redresser.
« Vous voilà enfin. » dit-il de cette voix si charmante qu’il savait adopter. « Je vous ai cherchée. »
Il passa un bras sur l’épaule de la jeune femme et son regard se riva sur les trois humains. Il n’avait nul besoin de ses yeux de vampire pour les effrayer. Il connaissait ces humains pour avoir déjà eu affaire à eux quelques jours plus tôt à l’UMS. En le voyant et en se souvenant de cette mauvaise rencontre qu’ils n’étaient pas prêts à oublier, ils pâlirent.
« Merci messieurs de l’avoir retrouvé. Profitez bien de la soirée. »
De sa voix doucereuse, il fit un geste de la main pour les inviter à fuir … tant qu’ils le pouvaient. Sans se faire prier, les hommes déguerpirent et retournèrent à l’intérieur. Un mince coup d’œil dans cette direction indiqua à Mattéo que Melania était toujours là. Pourtant, elle ne faisait aucun geste pour s’approcher de lui, se contentant d’observer la scène avec son verre à la main. L’attention de Mattéo se détourna d’elle lorsque la jeune femme se dégagea de son emprise. Leurs yeux se croisèrent et à nouveau, Mattéo sentit cette odeur si particulière. Elle dégageait une aura particulière. Ses grands yeux bruns le fixaient, méfiants et pourtant fascinés. Sa peau avait la couleur du cacao et ses cheveux bruns nattés lui donnaient envie de les humer de la même manière que l’homme plus tôt.
« Que fait une jeune sorcière comme vous dans la pénombre avec trois hommes ? » demanda-t-il, un demi-sourire s’affichant sur ses lèvres.
Elle n’avait pas encore prononcé un mot à son intention pourtant il sentait d’ici son attitude revêche. Elle n’avait pas l’air si jeune que ça, ni si naïve non plus. Qui était-elle ? Quel était son nom ? Que faisait-elle ici ? Jamais Mattéo n’avait connu une pareille fascination pour une personne avant … Clarissa.
@ Victoire
Mattéo Black-Peretti