Wizard Party Hard

J’avais eu l’idée du siècle ! Le jeu « Maléfices et Sortilèges » continuait de sévir un peu partout à Poudlard et jetait parfois un voile sombre sur les discussions. De plus, depuis deux mois, je n’avais pas eu l’occasion de mettre le grappin sur aucun garçon et cela commençait fortement à m’agacer. Avais-je perdu le coup de main ? Shanna disait que c’était peut-être l’histoire avec mes parents qui me perturbaient. Naomi, de son côté, pensait que j’avais flashé sur le professeur de Duels, le prince Bleddyn Iceni. Elles avaient toutes les deux tort et je comptais bien leur prouver ce soir. Car, ce soir, c’était Halloween, et on devait forcément organiser quelque chose !

J’avais donc envoyé une lettre à mon parrain et ma marraine pour savoir comment bien organiser une fête. J’avais conservé leurs réponses dans ma poche et les avais relu précieusement depuis.

« Une fête ? Mais ton père est d’accord ? Enfin, je veux dire, bien sur que ton père est d’accord si tu me dis que tu as demandé l’autorisation pour organiser quelque chose dans la salle commune. Bref, en général, j’invitais que les personnes de plus de 16 ans quand j’organisais quelque chose, parce que les plus jeunes finissaient toujours par tout gâcher. Bon, comme tu as 15 ans, j’imagine que tu peux redescendre l’âge minimum à ce niveau-là. Mais pas plus ! N’oublie pas de demander aux elfes de maison un coup de main pour la nourriture et les boissons (sans alcool évidemment !). Et ensuite, amuse-toi ! Ce sont les meilleures soirées celles-ci. »


« Une fête ?! Et tu ne m’invites même pas ?! Je plaisante. En tout cas, ça a l’air fantastique ! Je me souviens que quand un ami en avait organisé une à Poudlard, il avait mis des affiches un peu partout dans Poudlard et à Pré-au-Lard (ensorcelées bien sûr, parce que c’était une fête clandestine, mais toi, tu n’as pas eu cette idée j’espère …). C’est là aussi que mon amie Jillian avait appris qu’elle était fiancée à son futur mari. Quelle histoire ça avait fait ! Je me souviens que j’avais même bien mis tout le monde dans la panade car j’avais dragué le petit-ami de Jillian à l’époque sans le savoir. Le soir, on s’était fait un débriefing entre copines pour tout remettre à plat. Quelle histoire ! Bref, je m’égare même si j’imagine que ça doit te parler. Tu passeras bien le bonjour à tes amies ! A bientôt. »


Ils étaient juste géniaux comme parrain et marraine. Bon, je ne dirai jamais ça devant Alec ou Joey, vu les relations tendues qu’ils avaient avec leur père. James était quelqu’un de très bien en tant que parrain, mais en tant que père il craignait. Quant à Prudine, je l’adorais. C’était mon exemple. Même si elle était la mère d’un véritable con (alias Ian Wen), elle était une marraine exceptionnelle.

C’était donc avec tous ces conseils que je m’étais attelée à la tâche de mener à bien une soirée exceptionnelle pour Halloween. J’avais demandé à Alice Bennett, ma cousine, de coller les affiches partout où elle pouvait : Sara avait fait un travail de dingue pour ses affiches qui révélaient la localisation et la date de la fête seulement quand on prononçait la formule « Revelio Wizard Party ». Peut-être un peu trop basique pour un professeur, mais Sara avait tenté de renforcer ce sortilège avec deux mots supplémentaires à prononcer pour l’incantation. L’enchantement ne résisterait peut-être pas trop longtemps à des recherches poussées mais il découragerait la majorité des personnes.

Dans tous les cas, la fête se déroulerait donc mercredi soir. Un soir en semaine, certes, mais le 31 octobre ! Costumes obligatoires et heure de début d’arrivée 21h. Chacun s’était fait passer le mot pour pouvoir accéder aux passages secrets et se rendre en toute discrétion à la Cabane Hurlante.

Pour plus de fun, j’avais aussi contacté Dae-Hyun Gyeon, mon meilleur ami. Très emballé par l’idée, il avait tout de suite voulu s’occuper de la musique et d’inviter quelques étudiants histoire de rajouter du piment à cette soirée. A nous deux, nous avions donc agrandi la maison à l’aide de quelques sortilèges. Nous avions aussi consolidé quelques passages pour que ceux-ci puissent résister à une marée d’élèves. J’avais insisté pour ajouter quelques décorations d’Halloween destinées à effrayer les plus trouillards.

Et puis, j’avais mangé rapidement le dîner d’Halloween avant de partir aussitôt dans ma salle commune, prendre mes affaires dans un sac magique que ma tante m’avait offert à Noël dernier et j’avais foncé à la Cabane Hurlante. J’étais vêtue d’une longue robe blanche au-dessus de laquelle je portais un grand manteau orange aux manches bouffantes. Dae-Hyun avait insisté pour me maquiller le visage. « Tu crois que tes groupies vont être présentes ce soir ? » me moquais-je alors qu’il s’appliquait à me faire le contour des lèvres.



Il venait d’y apposer la touche finale quand des premiers rires se firent entendre. Les invités arrivaient et la fête allait pouvoir commencer !

« Bébé Spencer est jamais chiante. Un peu pénible quand elle parle et qu’elle se casse des trucs en faisant n’importe quoi au Paradis ou dans la Serre. Mais c’est ma sœur. Elle est comme ça. » Bébé Spencer ? C’était un drôle de surnom à donner à sa sœur aînée mais … pourquoi pas ! Sa façon de parler et d’observer le monde me faisait comprendre pourquoi je ne m’étais jamais bien attardé sur Lemony auparavant. Il n’était pas vraiment le genre de garçons à m’attirer et, d’ailleurs je ne me souvenais pas l’avoir déjà vu avec une fille. Peu importait ! Je serai la première, celle qui lui ferait découvrir. J’aurai de l’importance et c’était le genre de garçons qui me fallait pour oublier le prince.

« On peut s’embrasser, maintenant ? » Je papillonnais quelques instants des yeux. Pour une surprise, c’était une surprise ! Je tournais lentement la tête vers lui et sa façon de me regarder me laissait penser qu’il était sincèrement désireux de m’embrasser. J’étais désirable et ça me plaisait. « Eh bien, on peut dire que tu n’y vas pas par quatre chemins toi ! » dis-je en riant. Je jetais un coup d’œil en arrière mais il n’y avait qu’un couple de 7ème année se bécotant contre un mur et un groupe de garçons riant parce qu’ils pensaient avoir vu une licorne dans l’orée de la Forêt. C’était un endroit assez discret et même s’il ne faisait pas très chaud, j’étais prête à jouer de mes charmes.

Je retournais mon visage vers Lemony et laissait tomber le châle qui entourait mes épaules. Je rapprochais alors petit à petit mon visage près de celui du Poufsouffle qui répondit sans mal à mon baiser. Hum, il n’était clairement pas mauvais. Vraiment pas. Je posais alors ma main sur sa joue alors que l’autre vint caresser ses cheveux. « Tu es vraiment doué … » murmurais-je avant de l’embrasser à nouveau. Je frissonnais lorsque ses mains se posèrent sur moi.

Oui, c’était parfaitement ce qu’il me fallait. Un baiser, puis deux. Des caresses et de l’attention. Tout pour oublier le prince. Tout pour oublier Bleddyn Iceni et cette humiliation. Je n’étais pas du genre susceptible, ni à me vexer trop vite. D’habitude j’étais la bonne copine, celle qui n’hésitait pas à se tourner en ridicule pour amuser la galerie et ses amies. Avec cette admiration stupide pour le prince, je m’étais perdue. J’étais devenue pathétique au point de me sentir honteuse face à Alice Parkinson. Je devais absolument rectifier ça. Et Lemony était le parfait candidat !

« Hum … qu’est-ce que tu … » Je fronçais les sourcils et essayais de rompre le baiser, sans succès. Les mains de Lemony étaient devenues bien vite entreprenantes, commençant à se glisser sous ma robe, tandis qu’une autre essayait de détacher le corset pour accéder à ma poitrine. « Attends je … » Mince, je ne pensais pas … enfin, on était quand même à l’extérieur mine de rien. Je détournais la tête pour rompre le baiser alors que ses lèvres plongeaient dans mon cou. J’avais l’impression que mon rythme cardiaque s’accélérait et que le monde tournait bien vite d’un coup.

Pourtant, le couple qui se bécotait avait disparu, et les garçons qui riaient ne semblaient pas nous voir. On était bien caché, sur ce banc, dans le noir. « Arrête ! » dis-je. « Lâche-moi, je t’ai dit ! » D’un coup violent, je le repoussais pour que le Poufsouffle me lâche. Un vent froid s’engouffra entre l’espace qui me séparait de lui et j’avais l’impression d’avoir oublié comment on faisait pour respirer. « Je … j’étais d’accord pour qu’on s’embrasse. Pas pour que tu … » balbutiais-je. Je jetais un regard en arrière, cherchant vainement une personne amie qui m’aiderait.

Je sentais mon cœur battre à tout rompre alors que la douce chaleur qui était entrée en moi s’évaporait au fur et à mesure que je restais debout, immobile, à fixer Lemony. « Ah. Tu veux pas faire l’amour. C’est le consentement. » « Qu … Quoi ?! » balbutiais-je en resserrant mes bras autour de moi. Il était débile ou quoi ? C’était quoi son problème ? Pourquoi il énonçait tout haut ce que les gens disaient tout bas habituellement ? Je frissonnais, mal à l’aise. Mon châle était tombé au pied du Poufsouffle et je déglutis. « Je … oui … c’est le consentement. Et … et tu ne me l’as pas demandé. » Pourquoi je claquais des dents ? Etait-ce le froid ? La peur ? Pff … moi peur ? J’avais peur de rien.

« Les filles qu’Alice me présentent, elles veulent. Normalement. » dit-il. Il avait cette voix, très simple, très neutre. Comme s’il ne prenait pas pleinement conscience qu’il était là, avec moi, et que j’avais paniqué. J’avais envie de lui hurler dessus, de le pousser à réagir. C’était comme s’il se moquait de moi. C’était peut-être ça après tout ? Alice me faisait une blague ? Ou quelqu’un d’autre ? Quelqu’un m’en voulait et m’avait envoyé un boulet dans les pattes ? Mes émotions étaient toutes chamboulées et j’avais envie de pleurer. « Tu peux retourner là. » ajouta-t-il. La musique résonnait toujours à l’intérieur de la Cabane Hurlante mais je n’avais aucune envie d’y retourner.

Alors … il me laissait ? Il n’insistait pas ? Bien sûr, qu’est-ce que je croyais ! J’avais juste paniqué pour rien. Plus je le regardais, plus je me disais que quelque chose clochait. N’importe quel autre garçon aurait ignoré mes remarques et aurait continué. Ou bien il aurait cherché à s’excuser en m’invitant à danser. Mais pas lui. Je regardais l’intérieur de la fête, pensant à Alice. Il faudrait que je lui en touche deux mots. « Tu ne viens pas ? » demandais-je quand même, d’une voix plus douce qu’auparavant. « Moi, je vais dans la Serre. Comme tu veux rien faire. » Je haussais un sourcil, prête à exploser à nouveau. Est-ce qu’il me faisait du chantage ?! Non, il n’avait pas des réactions censées. C’était forcément autre chose. Je devais me calmer. Je passais une main dans mes cheveux. Ma coiffure était ruinée de toute façon. C’était la pire soirée à laquelle j’avais pu assister. Et le pire, c’était ce que c’était la mienne !

Je vins me rasseoir sur le banc, abattue. Pourtant, Lemony n’avait pas bougé. « Tu veux que je reste ? Ou venir. » Je levais les yeux vers lui, le visage toujours aussi triste et en même temps en colère. « Non. Je préfère rester là. Vas-y toi. » Je récupérais mon châle, remontais mes genoux sous moi, calais mon dos contre la bâtisse et m’entourais du vêtement. Il n’était pas très épais, mais au moins il me donnerait la sensation d’être entouré de bras réconfortants. « Lemony ? » demandais-je toutefois. « Est-ce que je te plaisais ? » Ma voix était triste. Je ne pensais pas que la réponse me réconforterait. En faites, je n’en savais rien. Je voulais juste un peu savoir si je l’avais un minimum attiré ou si j’avais définitivement perdu le coup de main. Peut-être que j’allais finir vieille fille ? Peut-être que j’aurai dû accepter de coucher avec lui ? Après tout, pas mal de filles de mon âge avaient sauté le pas. Pourquoi pas moi ?

« Vas-y. Je te demande pardon, je n'voulais pas t’empêcher de partir. » dis-je en essuyant d’un geste très élégant mon nez. « Vas-y, je te jure. Ca va aller. » Je lui adressais un sourire d’encouragement. Non, Lemony n’était pas le problème. Il avait juste été maladroit. Et moi, j’avais fait les choses dans le désordre, de la mauvaise façon. J’avais voulu oublier le prince en me jetant dans les bras de n’importe quel garçon et j’avais paniqué pour aucune raison. Je voyais bien qu’en regardant Lemony il était tout à fait inoffensif. Qu’est-ce qui clochait chez moi ? Pourquoi est-ce que j’essayais toujours de m’attirer des problèmes ? J’aurai aimé qu’Alec soit là. Alexander Davis. Lui, il avait toujours su me réconforter quand j’avais une blessure ou quand mes frères m’embêtaient trop. Lui, il était toujours là pour moi.

Il avait dit qu’il aimait bien mes yeux. Je souris et haussais les épaules. Pourtant, je sentais poindre les larmes au coin des mes yeux. Oh non ! Je ne voulais pas pleurer. Ca allait ruiner tout mon maquillage. Je m’efforçais de les refouler. « Vi' ! Je te cherchais partout ! Qu’est-ce que tu foutais ? » Je sursautais en voyant Billy arriver avec son costume de dalmatien. Il vint s’asseoir sur le banc à côté de moi, rejeta sa tête de chien en arrière et en profita pour dégager ses cheveux. « Ooooh par Merlin ! » Il éclata de rire, ne me regardant pas. « Joey m’a contraint à mettre ce maudit costume et on n’a même pas gagné ! » Il secoua la tête et sourit. Il semblait heureux. Juste heureux d’avoir fait un truc débile avec sa meilleure amie. « Qu’est-ce que tu … » Il sembla enfin réaliser que j’étais là, toute seule, en dehors d’une super fête. Il tourna la tête vers moi et fronça les sourcils. Mince, mon maquillage avait finalement dû couler. « Quoi, j’ai une sale tête ? » Ma voix était un peu étranglée et je baissais la tête. Déçue.

« Qu’est-ce qui s’est passé ? » demanda-t-il en passant un bras dans mon dos. Je posais ma tête contre son épaule, bercée par sa douce voix. « J’ai tout gâché avec un mec … encore … » Il parut vouloir dire quelque chose mais se ravisa. Avait-il pensé à quelque chose ? S’était-il dit que ce n’était pas ce que je devais entendre aujourd’hui ? Il embrassa alors le sommet de mon crâne. « Peu importe. Tu as encore toutes tes amies à l’intérieur. » dit-il d’une voix apaisante. « Et puis, si on ne l’arrête pas, Joey va rafler tout ce qu’il y a au bar. » Je levais les yeux vers lui et il sourit. « Allez viens, hors de question que tu restes toute seule à cette fête que tu as organisée. » Il me donna un petit coup d’épaule avant de se relever du banc. Il remit sa tête de dalmatien en place et m’adressa un clin d’œil.

« Allez, Victoria Prewett a encore une piste à enflammer ce soir ! » J’attrapais sa main tendue vers moi et souris. « D’accord ! Mais avant j’ai vraiment deux mots à dire à notre chère cousine ! » Billy éclata de rire alors qu’une nouvelle musique commençait dans la Cabane Hurlante. « Ouh la ! Si en plus Alice était dans le coup, je ne donne pas chère de sa peau ! » Il éclata de rire et je fis de même en retrouvant la chaleur réconfortante de la fête. La soirée n’était pas gâchée, pas totalement en tout cas.